Attal débattra avec Bardella : pourquoi un tel retournement ?

attal bardella

Alors que la campagne des élections européennes s’approche de la dernière ligne droite, une question se pose pour les trois principaux candidats, Jordan Bardella (RN), Valérie Hayer (Renaissance) et Raphaël Glucksmann (Place publique/PS) : comment, quand et, surtout, avec qui débattre ?

Le président du Rassemblement national a pour le moment choisi d’être économe de sa parole, préférant arpenter la province plutôt que squatter les plateaux télévisés. Logique : on gagne plus de voix à la foire de Beaucroissant, près de Grenoble, qu’en allant faire le beau dans les studios parigots.

Pour Valérie Hayer, talent en devenir et promis à le rester, c’est un peu différent, sa stratégie médiatique étant suspendue au bon vouloir d’Emmanuel Macron. Quant à Raphaël Glucksmann, tout content d’être là, il est prêt à débattre avec tout le monde, son chien et ses voisins de palier compris. Plus sérieusement, si le Château gouverne mal, il se défend plutôt bien, sachant mieux que personne flairer d’où vient le danger : Marine Le Pen et Jordan Bardella.

Un ordre directement venu de l’Élysée

Le candidat RN a longtemps exigé un tête-à-tête avec Gabriel Attal, Premier ministre, principalement nommé à Matignon pour contrer l’actuelle star des sondages. Longtemps, Gabriel Attal a refusé, avant de réviser sa position, sous influence directe de l’Élysée, à en croire Le Canard enchaîné de ce mardi 30 avril : « Je souhaite que le Premier ministre débatte avec Jordan Bardella pour le forcer à sortir de toutes ses ambiguïtés ! » Mieux, selon la même source : « Sa campagne, c’est un film des années 30. Vous avez l’image et pas le son. Bardella est un rentier du silence. Il faut le forcer à dire ce qu’il pense sur l’Ukraine, sur l’agriculture, sur l’économie et même, soyons fous, sur l’Europe ! »

Hormis le fait que dans « les années 30 », les films étaient généralement sonorisés depuis Le Chanteur de jazz d’Alan Crosland (1927), – quand on cite l’Histoire, il toujours conseillé de mieux la connaître –, ce procès en incompétence présumée est désormais un argument usé jusqu’à la corde. Pour deux raisons.

La première ? Si les maires du Rassemblement national étaient si mauvais, pourquoi la majeure partie de ces édiles auraient-ils été réélus dès le premier tour, lors des dernières élections municipales ?

La seconde ? Railler l’absence de programme économique du RN est-il encore un argument valable, venant du « Mozart de la finance » qui a endetté la France à hauteur de mille milliards d’euros en seulement sept ans ?

Miser sur l’incompétence du RN

Malgré tout, le choix de Gabriel Attal est opportun, étant l’un des rares à avoir fait souvent jeu égal avec Jordan Bardella lors de précédents débats télévisés. Seulement voilà, au bout de quatre mois à Matignon, il est déjà en passe d’être carbonisé, à force de se voir instrumentalisé, car il a été promu davantage en tant « qu’arme anti-Bardella » que pour ses qualités propres. Ce qui pourrait donner corps à cette rumeur persistante selon laquelle l’Élysée s’accommoderait d’une dissolution de l’Assemblée nationale, à la fois demandée par Marine Le Pen et Jordan Bardella, au lendemain des prochaines élections européennes. Quitte à dissoudre l’idiot à peine utile de la Macronie dans la foulée, Gabriel Attal.

Ici, deux hypothèses peuvent être envisagées sur la stratégie du Président en place, si tant est qu’il en ait une. La première ? Évacuer la possibilité d’une future arrivée du RN au pouvoir, misant sur l'incapacité du parti à se frotter aux affaires, une fois Jordan Bardella installé à Matignon. Ce qui pourrait laisser le champ libre à un autre candidat du « système » : Édouard Philippe est le nom évident qui vient à l’esprit.

Le second ? Enfoncer un coin entre Jordan Bardella et Marine Le Pen en misant sur le succès de son protégé. Et répéter ainsi le scénario ayant opposé, en 1993, un Édouard Balladur promu à Matignon par François Mitterrand. Lequel, chargé de préparer la place de Jacques Chirac dans les deux ans à venir, tenta de voler de ses propres ailes. Avec le résultat qu’on sait.

Mais l’Histoire nous dit aussi qu’en matière politique, rien ne se passe jamais tout à fait comme prévu. Jacques Chirac, dont tout le monde disait alors qu’il ne gagnerait jamais, finit par décrocher la timbale. L’avenir nous dira bientôt s’il ne s’agit là que de simples spéculations.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

39 commentaires

  1. Cela me semblerait tout à fait normal que Bardella et Attal tiennent un débat. J’ai hâte de voir le résultat !

  2. Vu le bilan de la Macronie depuis sept ans, vu les coups de couteaux mortels qui se succèdent chaque jour, vu les remèdes dérisoires apportés, je ne crois pas qu’un débat puisse permettre à ATTAL de justifier de quelques manières que ce soit cette effrayante réalité… Il faudrait être nul de chez nul pour ne pas le ridiculiser. Et Bardella est loin d’être nul… Le petit ATTAL (La voix de son maître) a tout intérêt à l’éviter…

  3. Oserais-je plaindre Attal ? Il sera comme le taureau avant l’estocade finale….. et je ne suis aps du tout fan de corridas pourtant… Cela dit Attal peut encore désobéir à son gourou (Macron) et demissionner. Néanmpins ce débat est une bonne nouvelle pour Bardella…. et le RN pour le 9 juin.

  4. Je n’ai regardé aucun débat et n’en regarderai aucun puisque ma religion de droite est faite depuis bien longtemps ! En revanche, et simplement par curiosité, je regarderai celui-ci car, si Attal n’est à mon avis qu’une coquille vide remplie de la voix de son maître, Bardella montrera-t-il une vraie personnalité, voire du charisme, ou sera-t-il simplement le clone de sa patronne lorsqu’elle s’est retrouvée face à Macron en 2017 ?

  5. Face à un Bardella imperturbable, Attal a certes du bagout, mais risque fort de perdre son calme…A voir peut-être?

  6. Bardella doit refuser de débattre avec Attal, il doit lui répondre qu’il n’a pas à discuter avec un faux premier ministre potiche, mais qu’il ne se confrontera qu’à Macron, puisque le président (qui doit se situer de par sa fonction au dessus des paris) fait campagne pour le PIRE des partis 24 heures sur 24.

    • C’est Bardella qui au départ demandait un débat avec Attal qui refusait au prétexte qu’étant lui premier ministre ce n’était pas son niveau… Maintenant il faut que les deux y ailles et puissent exprimer clairement leurs points de vue.

    • Bardella est convié à un débat avec Attal qui est le 1er ministre, du fait qu’il a des chances de faire tomber le gouvernement avec les élections européennes et que dans ce cas il remplacerait Attal, devenant le nouveau 1er ministre dans un gouvernement de cohabitation. Logique… Aucune logique pour Bardella Macron…

  7. Bardella a tort d’afficher ses ambitions nationales avec autant de naïveté.
    Il doit se concentrer sur l’enjeu des européennes et ne pas parler seulement d’immigration.
    Nous attendons qu’il dise clairement ce qu’il pense de la transition écologique et du carnage économique qui en découle, qu’il se prononce sur le marché européen de l’électricité, qu’il nous parle de défense européenne si chère à notre président, etc
    Un autre que lui aurait largement de quoi mettre Attal en difficulté sur des sujets strictement européens. Sa jeunesse et son inexpérience risquent de lui coûter cher. En le choisissant comme tête de liste, MLP a fait preuve de légèreté.

  8. Je ne regarderai pas ce « débat », qui la plupart du temps tourne à l’empoignade de chiffonniers, surtout de la part des macronistes. Attal n’étant pas le plus insolent ni le plus minable des « nervis » à macron.

    • Au contraire, le débat sera intéressant pour mettre le vizir Attal face au bilan financier catastrophique de son calife, à son incapacité à agir sur la durée dans un ministère et à l’immigration qui nous submerge avec parfois des conséquences gravissimes entrainant la mort d’enfants, de femmes et d’hommes français.

  9. Mais en cas de dissolution, le piège dans lequel il ne faut pas tomber, et d’accepter d’être 1º ministre ! Le petit micron a suffisamment de pouvoir de nuisance pour torpiller le RN ! (souvenez-vous de la cohabitation Mitterrand/ Chirac…)

    • Vous avez entièrement raison. Même avec une majorité écrasante à l’AN, le pouvoir de nuisance de la Macronie serait grand. La constitution de la Ve a été rédigée sur mesure par et pour un grand homme. Le général n’avait pas prévu qu’un avorton nuisible et toxique, puisse être élu. En conséquence, les moyens de destituer un tel incapable sont faibles…

  10. « Sa campagne, c’est un film des années 30. Vous avez l’image et pas le son. Bardella est un rentier du silence. Il faut le forcer à dire ce qu’il pense sur l’Ukraine, sur l’agriculture, sur l’économie et même, soyons fous, sur l’Europe ! » Venant d’un parti dont le président ne s’est même pas donné la peine de faire campagne aux Présidentielles. Ils ne manquent pas d’air…

  11. Le temps de parole de Attal sera t’il décompté du temps de campagne de la Macronie ? En tous les cas, je trouve que Macron et sa bande occupent perpétuellement l’espace les médias avec leurs numéros de cirques qui n’apportent rien à la France, bien au contraire …

    • excellente question ! comment sera décompté ce temps de parole ? celui là et bien d’autres, car la Macronie est friande de « tours de France » (grands débats etc…), tous les prétextes sont bons… à surveiller de près

  12. Allez Jordan montrez lui ses incompétences ,ses incohérences, lui et son maître sont vos adversaires ne vous y trompez pas car s’ait sur le chemin de la discorde qu’il vous emmènera alors méfiance se sont des malfaisants et il fait bien leurs faire comprendre que derrière vous se profile une belle majorité de Français les droites sont de votre côté.

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