Christophe Castaner est-il fâché avec les chiffres ?

Gilets jaunes 17 novembre

Si les chiffres du ministère de l'Intérieur sont très, très contestables dès lors qu'il s'agit de comptabiliser le mécontentement des citoyens, nous pouvons, en épluchant les réseaux sociaux, avoir une idée beaucoup plus proche de leur réalité.

Je rappelle combien ceux de la Manif pour tous avaient été trafiqués, jusqu'aux photos aériennes qui ont vu effacer à coups de Photoshop des dizaines de milliers de manifestants.

Eh bien, là, en ce 17 novembre, rebelote ! Avec témérité, l’ensemble des chaînes de télévision reprenaient allègrement le chiffre officiel de 282.710 gilets jaunes répertoriés sur les soi-disant 2.000 points de blocage. Un chiffre qui, se voulant extrêmement précis, démontre, s'il le fallait, la tricherie gouvernementale. Confirmé par le ténébreux député LREM Aurélien Taché qui, sur BFM, a prétendu que le gouvernement ne lâcherait rien, quel que fût le nombre de Français mécontents.

Car, en parcourant les réseaux sociaux et en visionnant la multitude de vidéos et de photos, on se rend compte que la réalité est effectivement tout autre. Peut-être en avez-vous fait vous-même l'expérience en vous promenant ou en manifestant au milieu des gilets jaunes (qui sont, d'ailleurs, plutôt verdâtres !).

De Guillaume Peltier à Jean-Luc Mélenchon, qui a tweeté : « Les Français découvrent par millions la manipulation des chiffres de participation et la dramatisation à laquelle se livre le pouvoir à chaque occasion. » L'opposition a bon dos de relever les chiffres fantasmagoriques du gouvernement. Car même les journaux locaux trichent.

Sur la Toile, on s'aperçoit que le blocage de la France a été bien réel. Je prends mon cas. Celui de l'île de Ré - La Rochelle. Samedi, jour où les Français font leurs courses, les centres commerciaux aux alentours étaient déserts, bloqués par des gens peu habitués à manifester, "par le bas de l'échelle", comme les désigne Jupiter. La ville, les routes, le pont apparaissaient comme étant un jour où l'on restait chez soi, comme si la vie s'était arrêtée. Et de retour sur la Toile, les photos et vidéos s'accumulent : des milliers de gilets jaunes sur l'autoroute A10 à Châtellerault. Des milliers de Lyonnais, de Bordelais, de Lillois dans la rue, sur les routes. 2.000 points de blocage ? Mais je crois que chaque ville, petite, moyenne ou métropole, était occupée. Regardez, à Dax, le long défilé de gilets fluo défilant le long de l'Adour, qui n'avait jamais vu autant de monde sur ses rives !

À Déols (Indre), à en croire les réseaux sociaux, la plupart de ses 8.000 habitants se seraient retrouvés tout autour des ronds-points de la ville, avec le même costume jaunâtre. À Saint-Girons, dans l'Ariège, ce seraient 2.000 des 6.500 habitants qui ont bloqué quatre routes. Etc. On arrive vite, très vite au chiffre bidon de 282.710 (et pourquoi pas 282.711, car je suis sûr que je n'ai pas été comptabilisé).

La mobilisation des policiers en colère est même allée plus loin. En démontrant, avec la complicité d'une machine à calculer, que "500 manifestants x 2.000 points = 1.000.000 (1 million) de manifestants et non 282.710, comme l'annonce La République en marche via son porte-parole Christophe Castaner"...

Décidément, le ministère de l'Intérieur a des problèmes avec les chiffres et autres statistiques lorsqu'il s'agit de dire la vérité aux Français.

Quant à l'ineffable BHL, reprenant le chiffre officiel, il s'est réjoui, par tweet interposé, de l'échec des gilets jaunes. Sans parler de Jean Quatremer, qui parle d'un « mouvement beauf largement d'extrême droite ». Non, Monsieur, les beaufs sont restés au chaud, chez eux, et c'est la France d'en bas, celle qui souffre du macronisme, qui est sortie en gilet jaune !

Et combien de millions de Français ont exposé leur gilet jaune sur le tableau de bord de leur véhicule ?

Il faudra donc se méfier des chiffres officiels du rassemblement parisien de samedi, au Champ-de-Mars, auquel il faudra additionner les centaines de points de rassemblements des gilets jaunes disséminés à travers la France.

Floris de Bonneville
Floris de Bonneville
Journaliste - Ancien directeur des rédactions de l’Agence Gamma

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