Marlène Schiappa compare LMPT aux terroristes islamistes : qu’en pense Emmanuel Macron ?

Depuis des mois, on la considère avec indulgence. Elle parle avant de réfléchir, elle est impulsive, primesautière et sans filtre. C'est ce qui fait son charme, dit-on. Elle dit qu'elle préfère "faire de la politique avec son cœur qu'avec une calculette". Il n'est pas interdit, non plus, d'en faire avec son cerveau. Et c'est, de toute évidence, l'un et l'autre - le cœur et le cerveau - qu'elle avait oubliés pour le récent entretien accordé à Valeurs actuelles : pour elle, il existe une "convergence idéologique" entre "La manif pour tous" et les "terroristes islamistes", même si "elle ne les met pas sur le même plan". Madame est trop bonne, la bonté de Madame la perdra. On peut dire, en effet, qu'un micro-détail les sépare : La Manif pour tous n'a assassiné personne.

On s'arrêtera là, c'est déjà presque trop. Comme s'il fallait faire la preuve que la Manif pour tous n'a rien de commun avec les terroristes islamistes !

Il est écrit, décidément, que ces millions de Français parfaitement pacifiques devront boire la coupe jusqu'à la lie.

En attendant, cette déclaration irresponsable, provocante, insensée est extrêmement dangereuse dans notre société hautement inflammable :

Dangereuse parce que c'est donner un blanc-seing à toutes les manifestations de violence à l'endroit de cette population, réputée catholique : pardi, puisqu'ils sont comparables à des terroristes islamistes, ils doivent être châtiés comme il se doit ! Rappelons qu'en un mois, ce sont neuf églises qui ont été profanées ou vandalisées. Dans la nuit de lundi à mardi, l'école (!) Saint-Vincent de Sète a été taguée de façon fort inquiétante : "La seule église qui illumine est celle qui brûle" (sic).

Dangereuse parce qu'en creux, on banalise le terrorisme islamique : si ce n'est donc que cela…

Dangereuse parce qu'elle valide l'idée que quiconque n'est pas d'accord avec Marlène Schiappa, et donc, par capillarité, avec le gouvernement auquel elle appartient, même si son mode d'expression est très policé, sera aussitôt disqualifié, diabolisé, diffamé. C'est délétère pour le débat démocratique, déjà dans un état critique.

Dangereuse parce qu'elle risque de rouvrir un autre front, alors que la page gilets jaunes n'est même pas encore tournée : comme l'écrit avec perspicacité 20 Minutes, "c'est le genre de phrase qui pourrait provoquer une levée de boucliers du côté des militants de la Manif pour tous". C'est le "genre de phrase" en effet.

Finkielkraut a réagi très fortement au micro de Sonia Mabrouk sur Europe 1 : "C'est ignoble, cette idée est complètement folle."

Même Caroline Mécary, dont on connaît pourtant l'animosité envers la Manif pour tous, a exprimé sa désapprobation sur CNews avec la même Sonia Mabrouk.

Dire que c'est Emmanuel Macron qui clame urbi et orbi vouloir lutter contre la haine qui sévit dans notre société. Dire que c'est lui qui a, jadis, reconnu que cette population-là avait été trop humiliée.

La Manif pour tous, dénonçant cet "amalgame scandaleux", a indiqué sur son compte Twitter exiger des excuses immédiates. D'autres, de plus en plus nombreux, demandent sa démission. La balle est dans le camp d'Emmanuel Macron.

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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