Maryam Pougetoux, une ambassadrice du voile qui ira beaucoup plus loin que Mennel Ibtissem

Capture d'écran
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L'UNEF, syndicat étudiant en perte de vitesse et davantage abonné, ces derniers mois, aux affaires de harcèlement qu'aux vraies réflexions syndicales, a brillamment réussi sa métamorphose : un coup de voile et tout est effacé, une virginité est retrouvée, on ne parle plus que d'elle, que de ça. Et comme c'est cool, le voile. On guette toutes les apparitions médiatiques de la nouvelle coqueluche. Je veux, bien sûr, parler de Maryam Pougetoux, la star de la semaine.

Et c'est BuzzFeed News qui, avec ses serviteurs David Perrotin et Paul Aveline, lui a longuement ouvert ses colonnes. D'emblée, nous sommes prévenus :

Tout le monde ne parle plus que de sa tenue. Pourtant Maryam Pougetoux, 19 ans, aurait préféré qu’on lui parle de son engagement syndical.

Sauf que sur quatre pages, jamais elle n'aborde la réforme de l'université, les blocages, Parcoursup, etc. Non, elle réussit le tour de force de revendiquer une normalité et une coolitude (dans sa "famille musulmane qui compte des catholiques et où les dîners se passent très bien") et de nous expliquer : "Mon voile n’est absolument pas un symbole politique."

Et son message syndical, alors, il est où, puisqu'il ne faut pas voir ce voile, ni surtout y voir de message politique, car - c'est bien connu - les leaders syndicaux de l'UNEF ne font jamais de politique et encore moins une leader musulmane systématiquement voilée dans toutes ses apparitions médiatiques ?

Il y a six mois, le voile a voulu se frayer un chemin identique de normalité, imprimer dans tous les esprits de "The Voice" ce message - bien sûr, nullement politique, nullement prosélyte, nullement religieux, non, non, rien de tout ça : "Regardez comme je suis belle, gentille et épanouie, avec mon voile."

La belle Mennel Ibtissem a été bêtement rattrapée par des tweets qui disaient quand même qu'elle avait eu des sympathies pour un islam politique assez dangereux, celui des terroristes…

Aujourd'hui, en plein mouvement étudiant - et en plein ramadan, mais cela n'a aucune signification politique ni prosélyte -, la présidente de l'UNEF de la Sorbonne - à chacun son "The Voice" – vient nous chanter la même chanson du voile léger, transparent, apolitique. Léger comme un air de printemps, le jour de Pentecôte.

La prochaine étape ? Faisons un rêve ! Autrefois, l'UNEF, poulinière du Parti socialiste, vous ouvrait les portes des gouvernements socialistes et parfois du pouvoir suprême : tel est le point commun des sieurs Manuel Valls, Jean-Yves Le Drian, Michel Rocard, François Hollande, Lionel Jospin, Julien Dray, Harlem Désir, Benoît Hamon, Jack Lang, Bruno Julliard et Jean-Christophe Cambadélis. Aujourd'hui, l'UNEF, après une parenthèse douloureuse d'affaires de harcèlement, se choisit d'autres leaders. Une jeune étudiante voilée qui ne parle que de son voile pour nous expliquer tout ce qu'il n'est pas. Une sorte de théologie négative, quoi.

Et demain ? Ben oui, il faudra vous y faire, "The Voice" et la Sorbonne vous y auront préparés : que ce soit Maryam ou une autre, la prochaine étape, c'est la table du Conseil des ministres et l'Élysée.

Mais, bien sûr, le voile n'y aura toujours AUCUNE signification politique.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

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