Petite sociologie de l’électorat Macron : c’est Brigitte !

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Je me suis longtemps demandé pourquoi, dans sa com', Macron mettait en avant de façon obsessionnelle le couple fusionnel atypique qu'il forme avec son épouse retraitée. Les envols de bisous lors des meetings, les unes de Paris Match à la plage, en télésiège, la promenade dans les dunes du Touquet, et jusqu'au « tendre baiser » sur scène « pour fêter les résultats du premier tour » (Gala, encore, le nouveau Journal officiel de la République française, précise qu'il "a fougueu­se­ment embrassé celle qui l’ac­com­pagne depuis le début de sa folle ascen­sion".) : cela m'apparaît, systématisé à ce point, ridicule. Et je ne sais comment ce ridicule pourra tenir quinze jours, voire cinq ans. Vous me direz qu'il y a un public pour cela : ma mère et ma belle-mère, chez la coiffeuse, sous leur casque.

Certes, c'était une façon de remplir le vide et du programme et du personnage lui-même. C'était aussi un moyen de gommer l'image du banquier dur et du hollandais mou qu'était M. Macron, de se montrer moderne et tendance, avec ce couple improbable, cette famille recomposée où, sans enfant, il joue le rôle du père, beau-père, grand-père. Et là, ça pouvait attirer un électorat jeune, prêt, en ces temps de brouillage des repères, à se laisser séduire le temps d'un printemps par cette « recomposition ». De ce point de vue, l'opération a remarquablement « marché » pour le premier tour.

Mais le calcul politique était en réalité plus profond. En effet, quand on examine la sociologie du vote Macron, ce vote est tout sauf jeune et populaire. S'il est confirmé que M. Fillon était le leader du vote senior, où il cartonnait à 35 %, il y était talonné par M. Macron, à 28 %… Autre parenté forte : M. Macron a régné sans partage sur les catégories sociales supérieures, les CSP+ : selon une étude OpinionWay publiée par Le Point, chez les cadres et les professions intellectuelles supérieures, M. Macron arrive en tête avec 33,3 % ! Enfin, la géographie de sa carte électorale confirme qu'il a bien été le candidat favori des privilégiés du système : il est arrivé en tête dans les grandes villes et dans la France de l'ouest.

Quant aux jeunes, en dehors des jeunes aisés de ces mêmes familles aisées, ils se sont davantage portés sur Mme Le Pen et M. Mélenchon. Et l'appel de M. Fillon à voter pour Macron (pouvions-nous attendre autre chose de lui, à ce stade de décomposition de son camp ?) n'est que la traduction de cette consanguinité entre deux électorats de retraités aisés. Tout ce beau monde qui va se retrouver dans les urnes se reconnaîtra sans peine sur les plages et les villas du Touquet. Et sur les photos de Gala. Nous avions parlé de la France BLAC (bourgeoise, libérale, âgée, conservatrice) qui soutenait Fillon : elle va gentiment épouser la France BLAM (bourgeoise, libérale, âgée, moderne) que Brigitte représentait à merveille. Le temps d'un second tour ? D'un gouvernement BLAC-BLAM de quelques semaines dirigé par M. Bayrou ? D'un quinquennat ?

En tout cas, il n'y a pas besoin d'être grand clerc marxiste pour dire que ce vote Macron était nettement un vote de classe. Et M. Mélenchon, dans son refus d'appeler à voter Macron, a bien senti le hic.

Toute la question est de savoir si la France entière peut se reconnaître dans le bonheur sur papier glacé des retraités CSP+ du Touquet.

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