29 mai 1814 : Napoléon est-il à l’origine du décès prématuré de Joséphine ?

L'impératrice Joséphine reçoit à la Malmaison la visite du Tsar Alexandre Ier
L'impératrice Joséphine reçoit à la Malmaison la visite du Tsar Alexandre Ier

Le 29 mai 1814 est un jour de deuil pour tous les résidents de la Malmaison. Ni rire, ni musique, en cette magnifique demeure qui a pourtant vu passer tant de fêtes et de réceptions. C'est l'affliction générale, le sentiment d'être orphelins... et pour certains, la fin fut précipitée par l’Empereur lui-même.

 

Une fin de carrière en retrait

 

Avec l’abdication de Napoléon, le 6 avril 1814, l’Empire s’effondre et la monarchie fait son grand retour. Pour Joséphine, c’est une catastrophe. En effet, malgré sa mort sociale engendrée par son divorce en 1809, elle est restée très au fait de la vie politique en France. Elle continue d'écrire de nombreuses lettres à Napoléon, mais aussi à son fils Eugène, et ces deux derniers lui répondent en lui narrant leurs campagnes militaires. À travers ces échanges épistolaires, Joséphine reste unie à eux. Ainsi, lors de la désastreuse retraite de Russie en 1812, elle s’inquiète, et selon sa première femme de chambre, Mademoiselle Avrillon, « elle évoquait sans cesse Napoléon et accusait le ciel de les avoir séparés, d’avoir ôté à Napoléon la sauvegarde de sa présence ».

 

Joséphine, une traîtresse ?

 

Avec la première Restauration, l’ancienne impératrice est consternée et choquée par la chute de l’Empire. Effondrée moralement, elle tente cependant de donner le change, mais doit aussi trouver de nouveaux appuis et alliés dans ce nouveau monde, pour elle mais surtout pour sa famille. Elle enchaîne, à la demande de sa fille Hortense, de nombreuses réceptions à la Malmaison où elle n’hésite pas à recevoir les ennemis mortels de Napoléon, dont notamment le tsar Alexandre Ier lui-même.

Celui-ci, enorgueilli par sa victoire sur l’Ogre corse, imagine peut-être ravir désormais l’ancienne épouse de l’Empereur après avoir conquis son empire. Le souverain russe n’hésite pas à faire du charme à son hôtesse et va même, selon l'historien Jean Tulard, qui a participé à l'ouvrage collectif Les Derniers Jours des reines, jusqu’à vouloir « lui offrir un palais en Russie, mais qu’aucun n’égalerait la Malmaison, qu’il fera tout ce qui est en son pouvoir pour l’aider […] Cette intimité entre les Beauharnais et Alexandre finit par inquiéter même les royalistes à Paris. » Ces agissements font aussi dire à beaucoup que Joséphine a trahi l’Empereur en s’acoquinant de la sorte avec tous ses adversaires.

Pour autant, comme toute bonne mère, Joséphine a agi instinctivement afin de protéger ses enfants et petits-enfants. Sa propre fille Hortense, fort influente sur sa mère affaiblie, est l’une des grandes instigatrices de l’affaire. Elle profite de ses nouvelles relations et de la réputation maternelle pour se faire titrer duchesse de Saint-Leu par Louis XVIII. Lors des Cent Jours, l’Empereur accablera de reproches celle qui est à la fois sa belle-fille et sa belle-sœur.

Derniers instants à la Malmaison

 

En attendant ce retour inattendu de l’Empereur en mars 1815, les jours passent et la santé de l’ancienne impératrice décline rapidement. Malgré cela, elle se sacrifie et tient à maintenir les invitations, les visites et les balades avec les nouvelles personnalités influentes du moment. Cependant, le 14 mai 1814, après une balade en calèche avec le tsar, elle prend subitement froid. Cloîtrée pour se reposer à la Malmaison, elle est prise de violentes quintes de toux que les médecins prennent pour un inoffensif rhume à guérir avec des vésicatoires et l’absorption d’eau de Sedlitz. Malheureusement, la médecine sous-estime le mal car Joséphine est en réalité, atteinte d’une angine gangréneuse qui l’affaiblit de jour en jour.

Le 26 mai, elle finit par s’aliter pour la dernière fois. Selon Caulaincourt, elle « vit approcher la mort avec résignation et sans regrets […] elle avait oublié l’abandon de l’Empereur, elle ne se rappelait que les marques de son attachement et elle ne pouvait plus tenir à la vie, quand elle le savait si malheureux sans pouvoir aller consoler ». Le 29 mai 1814, elle rend son dernier soupir en présence de son fils Eugène. Dans ses derniers instants, elle aurait prononcé quelques mots dont le sens reste encore mystérieux aujourd’hui : « Bonaparte… île d’Elbe, le roi de Rome. » Elle n’avait que 51 ans et c’est au même âge que Napoléon, lui aussi, quittera la scène du monde en 1821.

L’Empereur, avant de quitter la France pour la toute dernière fois en juin 1815, passe quelques jours à la Malmaison avec presque du regret, tant il dit : « Je ne puis m’accoutumer à habiter ce lieu sans elle. » Durant ce séjour, il passe de longs moments dans la chambre de son ancienne épouse, ou peut-être se sentait-il coupable d’avoir sacrifié son amour pour la politique et de l’avoir ainsi condamnée à une lente agonie ? À en croire les propose tenus par Mademoiselle Avrillon : « Les malheurs de Napoléon sont pour beaucoup, sont peut-être pour tout dans les causes qui ont amené la mort prématurée de Joséphine. »

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

3 commentaires

  1. Bon article mais le titre fait un peu complotiste: depuis l’île d’Elbe il lui aurait refilé la pneumonie qui la tua. On le savait doué, mais à ce point là…

  2. La petite histoire fait souvent l’Histoire. Que de grands personnages dans un moment charnière de notre France.

  3. L’amour ou la politique, personne n’a le droit de juger et même Bigeard écrivait dans ses mémoires d’Indochine avoir vécu : « L’amour et la guerre en même temps ».

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