Droit du sol : et si le FN avait raison ?

La proposition du FN de supprimer le droit du sol a provoqué, à l’Assemblée, un débat houleux où les noms d’oiseau ne cédaient la place qu’à des arguments partiels ou partiaux. Jean-Luc Mélenchon a même soutenu que "le droit du sol a été promulgué par François Ier" : étrange référence chez un homme qui n’a, généralement, que la Révolution à la bouche. Et si l’on dépassionnait le débat ?

Si l’on revient à sa définition, le droit du sol est une règle de droit attribuant une nationalité à une personne physique en raison de sa naissance sur un territoire donné, avec ou sans conditions supplémentaires. Le fait même qu’on puisse y ajouter ou retrancher des conditions est bien la preuve qu’il s’agit, non d’une valeur universelle, qu’il serait criminel de ne pas reconnaître, mais d’une valeur relative, dépendant des circonstances. Les conditions associées au droit du sol ont pu varier selon les périodes, prenant en compte différents facteurs, notamment la volonté d’assimilation.

Ainsi, l’arrêt du Parlement de Paris, en 1515, précisait que devenait français celui qui était né dans le royaume et y demeurait, à condition qu’il reconnût la souveraineté du roi François Ier. Il affirmait le pouvoir du roi de France sur ses sujets dans les territoires annexés. Serait-il anormal – quoi qu’en pensent Jean-Luc Mélenchon et SOS Racisme (qui avait, en son temps, évoqué le même argument) - que la République fît de même et s’assurât des dispositions d’un enfant d’étranger né en France avant de lui accorder, quasi automatiquement, la nationalité française ?

En défendant un amendement pour supprimer les articles de notre législation qui consacrent le droit du sol, Marine Le Pen n’a fait que tenir compte des circonstances singulières de l’immigration que la France subit et qui risque de s’aggraver dans les prochaines décennies. Laurent Wauquiez n’a pas dit autre chose, mais ses amis, à l’Assemblée, ne pouvaient pas se rallier à cet amendement sans franchir la ligne rouge, imposée par une posture idéologique : pas d’alliance avec le Front national !

La gauche et l’extrême gauche sont restées fidèles à leurs positions, par angélisme pour quelques-uns, pour la plupart par vocation internationaliste et penchant multiculturel. Les députés de La République en marche, malgré quelques remous remontant à leurs origines politiques, ont finalement choisi, soit de se comporter en godillots, soit de se réfugier dans l’abstention ou dans l’absence – un seul a osé voter contre.

On peut penser ce que l’on veut du Front national et de ses thèses : il reste que, en comparaison des autres partis, on ne peut lui nier sa constance ni sa lucidité devant le problème de l’immigration. Ses adversaires prétendent qu’il joue sur les peurs, mais chaque jour vient montrer que son analyse est prophétique.

Interrogé, ce lundi matin, sur BFM TV, Louis Aliot, vice-président du FN, a estimé que "la loi Asile et Immigration ne réglera rien, elle va même créer un appel d’air". Il a opportunément rappelé aux amnésiques que la France n’a pas fait beaucoup d’efforts, en 1962, pour accueillir les pieds-noirs, contraints à l’exode, ni montré de compassion à l’égard des harkis, livrés au massacre : c’étaient pourtant des Français ! Il a remis en mémoire ces paroles scandaleuses de Gaston Defferre, le maire de Marseille de l’époque, demandant "qu’ils aillent se réadapter ailleurs".

Nos âmes charitables, qui prétendent avoir les bras toujours ouverts devant la détresse, sont les champions de la discrimination et du sectarisme. Estimer que la nationalité française ne doit être accordée qu’à ceux qui montrent leur volonté de s’assimiler n’est pas un cri de haine contre l’autre. C’est un appel à rejoindre la France pour partager ses valeurs et son destin.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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