Interdiction de fumer dans les jardins publics ? Encore une loi de pousse-mégots !
Comme chacun sait, tout va bien à Paris. On n’y a jamais aussi bien roulé et s’y garer relève, désormais, du jeu d’enfants. Pareillement, la capitale est plus propre que jamais. Pas un papier gras et encore moins de rats gambadant sur nos trottoirs ; ça, c’était l’apanage de l’Ancien Régime, du temps du règne chiraquien. De même, pas le moindre incident à déplorer vers la place de la Chapelle : déambulant en mini-jupes, les femmes y sont reines, tandis que dealers et immigrés clandestins s’inclinent bas pour leur faire une haie d’honneur. Devant tant de bonheur, on ne peut donc que s’incliner nous aussi.
Anne Hidalgo, même si elle sait que la perfection n’est pas de ce bas monde, entend pourtant y tendre, d’où cette nouvelle interdiction de fumer dans quatre parcs parisiens, alors qu’elle l’est déjà sur cinq cents aires de jeux d’autres parcs. Cette fumeuse initiative revient à Laurence Goldgrab, qui préside aux hautes destinées du groupe Radical de gauche, très connu de ses proches voisins et tenu en haute estime par l’épicier arabe du coin.
Il s’agit donc de « lutter contre la banalisation de la cigarette chez les plus jeunes » et contre « la pollution qu’entraînent les jets de mégots par terre ». On voit bien que cette dame n’a jamais eu à se coltiner la corvée de square. Des heures à faire semblant de s’esbaudir devant des morveux se vautrant sur les toboggans, se disputant leurs pelles et leurs seaux tout en jouant à Zorro sur des chevaux de bois… Et on n’aurait plus le droit de s’en griller une, afin de faire un peu plus vite passer ce temps qui prend le sien, les heures comptant généralement double en cette antichambre de l’enfer ?
Après, les « mégots » ? Il ne s’agit pas de « mégots », chère Laurence, mais de filtres, lesquels mettent effectivement un temps au moins aussi long à retourner chez Mère Nature. Il y a près de trente ans, j’avais déjà trouvé la parade, citoyenne et écoresponsable : je fumais des cibiches sans filtre, de bons gros cigares ou bien cette bonne vieille pipe, si chère à l’inspecteur Maigret et à Dominique Strauss-Kahn. Quant à ceux qui jettent leurs « mégots » (à filtre ou pas), ce ne sont finalement que des gens mal élevés et il n’y a malheureusement pas de lois contre ça.
Plus intéressante demeure, en revanche, cette déclaration de la mairie de Paris, relayée par Le Figaro de ce jeudi : "Ces mesures sont globalement bien respectées, car les parents n’hésitent pas à interpeller les contrevenants." Bravo, les gars en chocolat et les filles à la vanille ! Comme si les années les moins resplendissantes de notre histoire n’avaient pas suffi, voilà qu’on encourage à nouveau la délation. « Mon patron fume »… « Ma belle-sœur vote Le Pen »… « Mon collègue de bureau lit Boulevard Voltaire en cachette durant les heures de travail »…
Naguère, le héros était sanctifié. Vint ensuite le tour de la victime. C’est désormais à la balance qu’on dressera des statues. Et dire que ce sont les mêmes qui font la promotion du cannabis à « usage récréatif » et à son libre commerce. Il paraît qu’il faut lutter contre le cancer du fumeur. Mais celui de l’emmerdeur fait manifestement plus de ravages encore. Et plus dans les cervelles que les poumons.
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