Congrès de Versailles : le Président et la Providence
Il ne se pouvait que notre chanoine d’honneur revînt de Rome sans une idée neuve dans sa besace. Un tête-à-tête avec le pape François, ça vous inspire forcément son homme. De retour du Vatican, Macron a inauguré un nouveau règne : celui de "l’État-providence du XXIe siècle". Pas d’effet d’annonce. Un esprit seulement : changer de logiciel. Simple comme bonjour. Devant « le Congrès » (mot et notion très français), nous avons eu droit, le 9 juillet, à un déluge en langue de buis d’une heure et demie. Le message était clair. « Donnez-moi du temps ! » a dit, aux élus de la nation, l’homme aux semelles de vent des cours européennes.
Il fallait que le Président Macron retrouvât un second souffle, rappelât son cap à sa majorité, lançât les élections européennes. Il fallait que Narcisse, blessé, retrouvât son image dans le reflet des grandes eaux versaillaises. Chose faite avec la claque des courtisans. Versailles, c’est magique.
Ce serait trop de parler de confession. Mais c’est une première que cet aveu d’humanité macronienne : "Je suis devant vous, humble mais résolu." Et encore : "Je sais que je ne peux pas tout et que je ne réussis pas tout." On a remarqué l’usage du pronom « nous » et non plus, exclusif, de « je » dans la bouche présidentielle. Humilité, quand tu nous tiens ! Sur les conseils de son précepteur Jean-Michel Blanquer, notre monarque avait relu Le Loup devenu berger. La Fontaine est à la mode.
Il paraît que ce discours était un grand cru. Donner rendez-vous aux élus, pour un nouveau « Congrès », l’an prochain, ça en a jeté. Parce que ça chamboule la stratégie de Mélenchon et piège tous les élus. Vous voulez me répondre ? Pas de souci. Je révise la Constitution : c’est du régalien. Votre droit de réponse, mieux, votre devoir de réponse, je vous l’octroierai chaque année grâce à l’amendement Macron.
L’année qui vient sera sociale ou ne sera pas, a prévenu le chef de l’État. Le bilan encourageant de l’année passée est prometteur pour l’année qui vient de la Providence dans tous ses états. Le Code du travail est voté. Le problème de la SNCF résolu. L’école a retrouvé sa place avec les notes du bac relevées : la tradition est sauve. La feuille de paie de certains a été renflouée : heureux sont-ils. Après une année au pas de charge, le Président a remis à septembre les réformes concernant les retraites et la réduction des dépenses publiques. Par son entremise providentielle, il redonne sa chance à chacun en relançant l’économie. Alors là, je dis : « Merci, mon Dieu ». La main est tendue aux syndicats : bonjour, l’année qui vient. Pour « le plan pauvreté », on précisera plus tard. Les inégalités sociales deviennent "inégalités de destin". La foi, c’est croire sans voir.
Rien, en revanche, de précis sur le chômage ni la lutte contre l’islamisme. C’est déjà bien d’avoir lâché le mot, dit-on. Finalement, à quoi sert cette réunion des deux Chambres à Versailles ? À renforcer le pouvoir personnel du Président. Souhaitons que la Providence, si bien nommée, veille sur la France et nous réserve une surprise du chef. En attendant, regrettons le rendez-vous manqué du 14 juillet, jour de notre fête nationale, occasion française d’une rencontre entre le chef de l’État et le peuple qui avait permis à certains Présidents de rebondir, voire de se remettre en selle.
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