Et si on parlait de la récupération idéologique des résultats de la Coupe du monde ?
La finale de la Coupe du monde a fait l'objet d'une récupération idéologique qui a indigné plus d'un supporter français, purement attaché au sport et simplement fier de la victoire de son pays. C'est un match qui nous ramène trente ans en arrière, quand une médaille olympique décidait de la supériorité du communisme ou du monde libre : aujourd'hui, cependant, les deux camps ont changé.
Au lieu de représenter deux pays, les deux équipes ont été, en effet, pour des millions de spectateurs dans le monde, les symboles de deux systèmes. D'un côté, une vision traditionnelle : celle d'un pays d'Europe blanc, ethniquement homogène, aux frontières concrètes et au patriotisme assumé. De l'autre, la vision progressiste actuelle : la réunion sous l'égide d'un pays européen d'individus originaires de plusieurs continents, majoritairement non blancs, liés par les circonstances présentes et non celles du passé, résultat désiré d'un effacement conscient des frontières.
Il était frappant, déjà, que les choix de nombreux supporters français et étrangers se soient portés avant le match sur une vision ou sur l'autre plutôt que sur une qualité de jeu ou sur des joueurs fétiches. Dans cette version idéologisée de ce qui n'est qu'un simple jeu de ballon, mais jeu commun au monde entier, on a fait endosser à des Horaces et des Curiaces modernes le rôle de champions d'une cause transcendant les nationalités, et non de champions de leurs pays.
C'est ainsi qu'à peine éteint le coup de sifflet final, la Toile s'est embrasée d'exultations triomphales... et d'injonctions à la France d'en tirer des leçons et d'ouvrir largement ses frontières au tiers-monde. Injonctions non pas seulement hexagonales mais mondiales, reposant sur ce principe pour le moins original que la politique étrangère d'un pays dépendrait entièrement des résultats d'un jeu sportif. Injonctions très sérieuses jusque dans la bouche de deux hommes d'État.
Avec deux camps idéologiques nouveaux, voilà donc revenue la vision du sport qui avait cours sous la guerre froide. Que les amateurs d'effort et de beau geste se résignent : cela ne fait probablement que commencer.
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