IVG : Laurence Rossignol veut supprimer la clause de conscience des médecins

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C'est aujourd'hui la Journée mondiale du droit à l'avortement. On se souvient du débat suscité par la loi du 17 janvier 1975 relative à l'interruption volontaire de grossesse. Pour inciter les députés à la voter ou par conviction personnelle, Simone Veil déclara que « l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans issue » et que cette loi, « si elle n’interdit plus, elle ne crée aucun droit à l’avortement ». Depuis, les partisans de l'IVG cherchent à démontrer le contraire et à en faire un acte médical ordinaire.

Subsiste, cependant, la « clause de conscience », qui permet à un médecin ou un personnel hospitalier de refuser de pratiquer une interruption de grossesse. Insupportable pour de prétendues féministes, qui considèrent que l'avortement est un droit fondamental. Une pétition contre cette clause a déjà réuni 50.000 signatures. Laurence Rossignol, l'ex-ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, va déposer, avec quelques sénateurs socialistes, une proposition de loi tendant à supprimer cette liberté de conscience qui, selon les signataires, n'aurait pour finalité que de « culpabiliser et dissuader les femmes ».

Il est vrai que, depuis 1975, l'avortement est devenu un droit. Mais le vote du Parlement interdit-il de s'interroger sur le fondement éthique de cet acte ? Une majorité peut adopter une loi, elle ne garantit pas que cette loi soit juste. Certes, on ne peut porter un jugement sur les femmes qui recourent à l'avortement, dont les motifs sont très différents, surtout qu'on leur présente cet acte comme un droit durement acquis. Il reste que ce sont des vies qu'on tue dans le ventre de leurs mères. En France, on peut pratiquer une IVG jusqu’à la fin de la 12e semaine de grossesse, aux Pays-Bas, le délai est de 22 semaines, 24 en Angleterre. On peut même pratiquer un avortement thérapeutique jusqu'au terme de la grossesse. Quand on sait qu'on peut sauver des prématurés de moins de six mois...

On explique que l'embryon n'est pas une personne, ou qu'il ne le devient que s'il y a un projet parental. Mais que valent ces arguments face à une vie qu'on supprime ? Au moins pourrait-on se poser la question. Et l'État ne devrait-il pas développer les alternatives, proposer des aides, faciliter l'accompagnement ou l'adoption, chercher à réduire le nombre d'avortements ? Au lieu de cela, il a pénalisé, en février 2017, ce qu'il appelle le délit d'entrave à l'IVG, "les adversaires du contrôle des naissances [qui] avancent masqués", comme disait alors Laurence Rossignol. L'IVG est donc un moyen de « contrôle des naissances » ?

Tout est fait pour banaliser cet acte. À l'occasion de cette Journée mondiale, le Planning familial a appelé à un rassemblement place de la Bastille, à Paris, pour défendre les droits des femmes, menacés en Europe. Dans Le Monde, une femme de 84 ans déclare qu'« avant la loi Veil, faire l’amour était devenu [sa] hantise ». Le chef de service d'une maternité publique estime que les médecins fonctionnaires ont le devoir de pratiquer l'IVG.

Le problème de l'interruption volontaire de grossesse est suffisamment grave pour ne pas être traité à la légère et par des anathèmes. Ses opposants doivent pouvoir s'exprimer et non pas être désignés comme des réactionnaires, rebelles à une avancée des « droits », qui n'est pas nécessairement synonyme de progrès. Laurence Rossignol et tous ceux qui ont la certitude d'avoir raison devraient relire les propos de Pascal sur la relativité des notions de juste et d'injuste, qui changent selon les lieux et les temps.

Alors qu'une loi sur l'extension de la PMA aux couples de femmes homosexuelles et aux femmes seules va être bientôt débattue, députés et sénateurs devraient se dire que le progrès ne consiste pas toujours à aller de l'avant, mais à savoir reconnaître ses erreurs.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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