La France des foulards rouges

manifs foulards rouges

Ce dimanche 27 janvier, les foulards rouges défilaient entre Nation et la place de la Bastille afin de montrer leur opposition aux gilets jaunes, pour un retour à l’ordre républicain, mais sans étiquette politique. Officiellement.

Arrivant assez tôt, l’on commence à prendre la température du rassemblement. Les gens sont sympathiques, avenants, d’une moyenne d’âge plutôt gériatrique. On voit beaucoup de fourrure, des colliers ou des chaussures coûtant un salaire mensuel de gilet jaune, mais tout ce beau monde est agréable.

Cependant, les masques tombent vite : une militante gilet jaune, venue demander à un couple de manifestants leurs raisons d’être là se voit vite rabrouée. Un passant lance au couple "tous ces gilets jaunes ne méritent qu’un bon tir de Flash-Ball®".

Rires étouffés. L’ambiance est posée.

Le cortège est impressionnant. L’Élysée craignait un four, il a eu un triomphe. Tout ce que la France porte de macroniste s’est dressé pour défendre le général en perdition. Est-ce grâce à l’opportune promotion des « cars Macron », qui proposaient des allers pour Paris à un euro ?

On suit le cortège sans heurts. Beaucoup de visons, de chaussures que l’on n’a pas l’habitude de voir dans une manifestation. On sent que ces dix mille soutiens au Président ne craignent pas de devoir échapper à une charge de CRS.

L’ambiance se tend vite en arrivant vers la place de la Bastille.

Des journalistes indépendants sont pris à partie : une sexagénaire pousse violemment une caméraman en lui hurlant de partir car elle est là "pour foutre le bordel". Le journaliste de RT France se fait chahuter. Dix minutes avant, les mêmes personnes scandaient des slogans pour la liberté de la presse.

L’ironie ferait rire si elle n’était pas aussi tragique et symptomatique de la Macronie : une maladie qui accuse les cellules saines de ne pas être au diapason de la métastase.

Le comble de l’horreur est atteint sur la place de la Bastille. Une quinzaine de gilets jaunes est présente sur les marches de l’Opéra. Ils sont copieusement hués.

Très vite, des cris résonnent : "Gilets jaunes, au boulot !" Le mépris de classe suinte.

Un jeune, propre sur lui, grand, blondinet, doudoune de marque, se fait interviewer. Il lâche, d’un air détaché : "Oh, moi, je n’aime pas les pauvres." (On préfère penser que c'est un troll).

Pas de casse pour ce dimanche foulards rouges. Pas de violence (ou presque). Mais une violente hypocrisie dans un mouvement qui se prétendait « apolitique » et « certainement pas pro-Macron », et qui a fini par défiler en scandant des hommages au couple présidentiel, alternant avec d’obscènes « Nous sommes la majorité silencieuse ». La place se vide vite sous les ordres des gendarmes, applaudis par la foule (certains se font prendre en photo avec eux) et la vie reprend son cours dès 16 h 30 sur la place de la Bastille. Marie-Chantal n’aura pas fracassé d’Abribus®.

La France en loden s’est réveillée. Craignez-la si vous courez moins vite que leur déambulateur.

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