Un non-événement de force G7 entérine le rôle d’estafette de la France
C’est par ce qu’il ne s’est pas passé qu’on peut le mieux décrire le dernier « week-end au bord de l’eau », à Biarritz, d’un club ultra-select de quelques hauts dirigeants de ce bas monde.
Cette sitcom de seconde zone au budget de superproduction évoque les mots dérangeants de Valère Novarina, formidable jongleur de mots, dans L’Homme hors de lui : « Un non-événement de force 4 vient soudainement ne pas avoir lieu dans un vide de première grandeur créé à leur insu par plusieurs locuteurs internationaux frappés de silence. »
À elle seule, la séance photo, moment clé de ce sommet de la vacuité, restera un morceau choisi du cinéma muet ; à deux semaines de la rentrée scolaire, elle nous aura au moins rappelé avec attendrissement le souvenir de nos classes primaires. La longueur de la séquence en dit, d’ailleurs, long sur l’absence de fond à rapporter. Ah, il fallait voir le GO Macron s’affairer fébrilement pour placer chacun au bon endroit, faire des bisous affectueux et susurrer des mots aimables aux uns, connecter ou tenter de rabibocher les autres avec un air épanoui de ravi de la crèche.
Selon une mise en scène impeccable, ce feuilleton estival comportait ses moments imposés d’intense suspense, en tout cas pour le petit peuple spectateur : en prologue, la réunion unilatérale au fort de Brégançon avec le président Poutine, absent le plus présent du G8-1, visiblement amusé par ce sommet marginal sans impact ; les réactions de l’incontrôlable Trump, dont même l’imprévisibilité devient prévisible ; la visite surprise en terre biarrote du ministre des Affaires étrangères iranien, non annoncée pour retarder au maximum le risque d’incident, occasion de quelques rencontres et déclarations sans suite ; les échanges fleuris avec un président du Brésil retors, mufle assumé aux remarques personnelles désobligeantes, qui ose refuser un chèque de vingt millions d’euros pour l’aider à combattre les incendies de la forêt amazonienne.
On aura admiré la performance des journalistes de parvenir à meubler autant d’espace médiatique avec si peu de matière informationnelle - et décisionnelle. Mais le G7 leur procure un excellent « marronnier » : reportage en période creuse, consacré à un événement peu important, récurrent et prévisible. On ne sait pas qui aura le mieux tiré les marrons de ce feu médiatique dont le score le plus élevé revient largement au bilan carbone.
Car ce non-événement a accouché d’un non-communiqué, gribouillé à la hâte par l’estafette Macron et présenté unilatéralement comme un « appel » collectif, de peur que Trump ne signe pas le communiqué officiel. Sans aborder aucun des sujets qui fâchent et qui, pourtant, pressent à l’échelle mondiale, parmi lesquels la pollution environnementale et l’appauvrissement de la biodiversité, la surpopulation humaine et les flux migratoires incontrôlés, la mauvaise gouvernance et l’ensauvagement du monde. « Têtes de néant, ne pouviez-vous pas remettre à demain vos tours de pitres et vos cabrioles électorales ? », disait le visionnaire André Suarès, en des circonstances différentes qui pourraient conduire aux mêmes catastrophes (1).
Finalement, on pourrait appliquer à cet entre-soi de technocrates ce que disait des politiques et des impôts le magnat américain de la presse Malcolm Forbes : « Les hommes politiques disent que l'on ne peut pas se permettre de réduire les impôts. Peut-être que l'on ne peut pas se permettre d'avoir des hommes politiques. »
(1) Contre le totalitarisme, André Suarès, Les Belles Lettres, 2017
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