Macron va-t-il déboulonner la tour Eiffel pour la rendre à l’Algérie ?

Emmanuel Macron ayant un faible pour la repentance, les Algériens auraient tort de ne pas toujours en réclamer davantage. Il a récemment déclaré qu'à ses yeux, « [dans le statut de travail mémoriel], la guerre d'Algérie a à peu près le même statut que la Shoah pour Jacques Chirac ». Rapprochement qui a suscité, à juste titre, les réactions indignées de personnalités politiques comme Marine Le Pen, Bruno Retailleau ou François-Xavier Bellamy. Comment va-t-il réagir à la proposition d'un journaliste algérien, Mohamed Allal, qui, dans une émission diffusée sur Lina TV, jeudi 28 janvier dernier, demande à la France de « rendre la tour Eiffel à l'Algérie », l'accusant d'avoir puisé dans les mines de fer algériennes pour la construire ?

Ces déclarations feraient presque douter des facultés mentales de leurs auteurs respectifs. Le président de la République se livre à des rapprochements pour le moins hasardeux. Quant au journaliste algérien, pourquoi se gêner devant cette avalanche de renoncements ? Des commentateurs ont suggéré de rendre plutôt « les Algériens qui vivent sur le dos du contribuable », mais c'est, sans doute, Jean Messiha qui a trouvé le meilleur mot en préconisant « qu'on leur rende Macron ».

On se demande jusqu'où ira l'irresponsabilité d'un chef de l'État qui n'en finit pas de dénigrer son pays, d'émettre sur l'Algérie des contre-vérités, au point qu'on se demande s'il est totalement ignorant de l'Histoire ou s'il a oublié qu'il était Français. Certes, les programmes scolaires ne sont plus ce qu'ils étaient mais, compte tenu de ses études, il ne devrait pas méconnaître à ce point la colonisation française.

Il devrait savoir, par exemple, que l'État algérien n'existait pas avant la conquête française et que c'était une dépendance de l'Empire ottoman : la France en a fait un véritable pays. Il devrait savoir aussi que, sans la France, le Sahara n'aurait jamais exploité ses gisements d'hydrocarbures, que le FLN a illégitimement accaparés. De Gaulle lui-même, qui a bradé l'Algérie dans les conditions que l'on sait, déclarait, en 1961 : « Le pétrole, c'est la France et uniquement la France, le Sahara algérien est une fiction juridique et nationaliste sans fondement historique. »

Si Macron l'ignore, il doit bien exister quelque conseiller pour combler ses lacunes. Mais, plutôt que de l'ignorance, il est probable qu'il refait l'Histoire conformément à ses préjugés. En choisissant Benjamin Stora pour rédiger un rapport sur les questions mémorielles relatives à la colonisation et la guerre d'Algérie, plutôt que de confier cette mission à une équipe d'historiens impartiaux, il était sûr des conclusions. Et ce n'est pas fini !

On vient d'apprendre, par un communiqué de l'Élysée, que « le Président a entendu les demandes de la communauté universitaire pour que soit facilité l’accès aux archives classifiées de plus de cinquante ans », s’agissant notamment des documents relatifs à la guerre d’Algérie. Si encore cela pouvait servir à établir la vérité sur cette période tragique ! Mais on s'en servira, sans doute, à charge pour dénigrer encore la France sans exiger que les autorités algériennes ouvrent leurs propres archives.

Certes, on ne doit pas s'attendre à ce que Macron déboulonne la tour Eiffel pour la remonter à Alger. Mais il continuera de suivre les recommandations de Benjamin Stora qui vient à la rescousse des Algériens, déclarant dans un entretien accordé au quotidien francophone El Watan : « Les gestes symboliques ne peuvent avoir de portée que s'ils sont appuyés de mobilisations citoyennes sur chacune des questions : les archives, les essais nucléaires, les disparus [algériens]. »

Jusqu'où ira la soumission ?

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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