Mohamad Izzad Khatab, l’« ami » des puissants
Tous les hommes politiques ont eu leurs intermédiaires sulfureux. Sans remonter à Stavisky, on peut donner les noms d'Alexandre Djouhri, de Ziad Takieddine ou, plus récemment, de Raymond Bourgi, qui eut la peau de Fillon pour une sombre histoire de costumes. Voici le dernier avatar de cette longue série d'affairistes plus ou moins louches : Mohamad Izzad Khatab. Homme d'affaires syrien, apparemment richissime, ayant acquis sa fortune on ne sait comment, cet ami des puissants coche, lui aussi, toutes les cases qui sont comme les trois coups d'une pièce à scandale : hâbleur, démonstratif, un peu mythomane aussi, probablement, il inspire, depuis dix ans, une confiance prodigieuse à tous les puissants. Politiciens de tous les pays, stars de tous les acabits ont fréquenté, un jour ou l'autre, l'énigmatique monsieur Khatab, à qui Mediapart consacrait cette semaine un dossier.
Izzad Khatab a été mis en examen, au mois de juin dernier, par le parquet de Paris pour une jolie brochette de chefs d'inculpation : abus de confiance, escroquerie, abus de biens sociaux, blanchiment et usage de faux. Fermez le ban. Il semble que les « deals » faramineux proposés, ces dernières années, par M. Khatab à ses amis politiques et financiers n'étaient pas aussi « clean » que prévu. Le socialiste Julien Dray, désormais au-dessus de tout soupçon, avait même promu à la radio, en 2016, un ambitieux plan humanitaire pour la Syrie en citant nommément Izzad Khatab. L'imam Hassen Chalghoumi, coqueluche des médias qui plaident pour un islam modéré, a lui aussi été en affaires avec le Syrien et refuse, aujourd'hui, de s'exprimer sur le sujet. Personne ne sait combien Khatab a monté d'affaires bidon (ni d'affaires réelles). Personne ne sait si les gens qui lui ont fait confiance ont revu leur argent. Un épais mystère l'entoure.
Khatab a ensuite fait l'objet d'une note du service de protection des personnalités, chargé notamment de la surveillance de l'imam Chalghoumi. Qualifié de « sulfureux bienfaiteur de Benalla » par Libé, en janvier 2019, il a rencontré l'ancien garde du corps avec qui il a participé, après que celui-ci eut été renvoyé de l'Élysée, à un week-end chez l'homme d'affaires français Vincent Miclet.
Quel rapport avec Emmanuel Macron, me direz-vous ? Julien Dray a été proche de Macron quand celui-ci était ministre de l'Économie. Chalghoumi est l'alibi de ceux (dont Macron) qui veulent, avec un entêtement remarquable, croire en un islam tolérant. On ne présente plus Alexandre Benalla (au fait, a-t-on des nouvelles de son coffre-fort ?). Macron n'est jamais très loin.
La seule conclusion que j'en tire, c'est que le nouveau monde n'a jamais autant ressemblé à l'ancien…
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