Philippe Bilger : « L’aigreur d’Éric Dupond-Moretti est celle d’un ministre qui n’est pas aussi admiré qu’il l’était hier »

Éric Dupond-Moretti ne se rendra pas sur CNews : le garde des Sceaux craint la dénaturation de ses propos « sans aucune forme de contradiction » sur la chaîne d'information qu'il qualifie de « scène de Zemmour et de Marine Le Pen » où cette « clique » lui cracherait dessus. Une violente charge contre Philippe Bilger et le journaliste Ivan Rioufol, nommément cités.
Boulevard Voltaire a recueilli la réaction de Philippe Bilger, magistrat honoraire, aux propos du garde des Sceaux.
J’ai en effet appris ce que le garde des Sceaux avait dit à mon sujet et au sujet d’Ivan Rioufol. Si j’ai bien saisi, CNews serait la chaîne d’Éric Zemmour et de Marine Le Pen. Sur cette chaîne, on parlerait de faits divers et Rioufol et moi cracherions sur le garde des Sceaux. Il parle de la clique.
Qu’est-ce que cela révèle de la personnalité d'Éric Dupond-Moretti ?
L’attaque du garde des Sceaux est tout de même assez vulgaire. Le terme « clique » est stalinien, « crachat » n’est pas extrêmement élégant. On peut me reprocher beaucoup de choses, mais je n’ai jamais craché sur les gens par oral et par écrit, et encore moins sur des gens que j’ai admirés lorsqu’ils étaient avocats, et beaucoup moins depuis qu’ils sont devenus ministres.
Vous avez un contentieux avec le garde des Sceaux, puisque votre fille devait en être la collaboratrice et il l'a éjectée. Y a-t-il une revanche à prendre de votre côté ?
J’ai un grief personnel important qui m’oppose à lui concernant ma fille Charlotte, mais je suis assez serein pour le détacher de mon analyse objective de l’action du garde des Sceaux. Au début, j’ai eu des espérances sur sa capacité d’endosser l'habit de ministre, mais j’ai vite déchanté en constatant qu’il faisait une politique d’avocat. J’en veux beaucoup au couple Macron qui l’a fait choisir. Le président de la République en avait besoin pour les joutes politiciennes à l’approche de l’échéance présidentielle. On a vu à quel point il a été désastreux avec les autres ministres en service commandé contre Xavier Bertrand.
Que révèle cela de la trajectoire du garde des Sceaux ?
Au fond de lui, Éric Dupond-Moretti vit peut-être très mal le passage du judiciaire au politique. Quoi qu’on pense de lui comme avocat, et je l’ai souvent défendu contre la magistrature, il était le roi incontestable dans l’univers judiciaire. Il n’était pas souvent contesté, il se permettait beaucoup de choses et cet univers était royal pour lui.
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