« Bons gestes » pour « vague de froid » : la nounoucratie est en marche

femme bonnet hiver

En 2018, une excellente (et très drôle) chronique d’Éric Zemmour sur RTL avait traité l’« épisode neigeux » de l’époque à la manière d’une plaie d’Égypte inattendue (Éric Zemmour : « De la neige à Paris, au mois de février ! » - YouTube). Déjà, il y a presque six ans, la France ébahie découvrait cette curieuse pluie blanche, venue du ciel, qui figeait les paysages dans un éternel matin d’enfance. De la neige. Du froid. En plein hiver. Et puis quoi, encore !

Grand froid : l'État est là !

Les années ont passé, mais on en est toujours là. Chaque année, à la manière d’un poisson rouge qui, au bout d’un tour, s’exclame à nouveau « Sympa, ce bocal ! », les services de l’État redécouvrent en janvier que le froid, le vent et même la neige sont caractéristiques de cette saison que, dans les milieux complotistes (mais ne le répétez pas trop fort au travail), on appelle l’hiver. Ce mardi, l’État, tentaculaire, comme une grosse pieuvre gâteuse, avait déclenché le « plan grand froid ». Nos frères québécois ont dû bien se marrer. Grand froid, donc, que ces trois centimètres de neige en Île-de-France et ces -10 °C « ressentis ». Alors, forcément, les conseils originaux fleurissent : on ne va pas laisser les Français mourir de froid.

Le Parisien, dans son édition du 9 janvier, publie ainsi le dessin d’un bon citoyen qui respecte les « bons gestes » contre le froid. On apprendra donc, avec une surprise mêlée de terreur face à ce surgissement de silhouettes arctiques, qu’il faut, pour survivre, couvrir ses extrémités (« mains, pieds, tête », précise obligeamment Le Parisien aux éventuels porteurs d’étui pénien) et privilégier des couches de vêtements amples. La silhouette fournie en exemple est celle d’un skieur en goguette qui vient de troquer son équipement contre une paire de chaussures de marche. On n’a peut-être pas besoin de ça pour traverser la « vague de froid » sans dommage. Il suffit peut-être d’une écharpe, d’une casquette et d’un double expresso, non ? Le rire le dispute à la consternation.

La multiplication d'injonctions bienveillantes

Il faut rendre cette justice au quotidien macroniste : il n’est pas le seul à « nounouter » les Français, pour reprendre un néologisme très juste employé hier, sur Europe 1, par Élisabeth Lévy. L’État ne cesse de le faire lui-même, depuis bien avant Macron, à travers une série d’injonctions « bienveillantes » : 5 fruits et légumes par jour, « l’intervalle entre le marchepied et le quai » (lire le magnifique recueil éponyme de Bruno Lafourcade : L'Intervalle entre le marchepied et le quai - La Nouvelle Librairie), « à consommer avec modération », « pour votre santé bougez plus » - et jusqu’à cette énième vidéo de notre Narcisse présidentiel, mardi matin. Vêtu d’une tenue de boxe, les gants sur l’épaule, le Président nous incitait à faire une demi-heure de sport tous les jours. Orwell n’aurait pas osé y penser.

Faut-il en déduire que notre peuple a définitivement basculé dans un infantilisme gâteux ? Que nous avons besoin de ça, que nous réclamons d’être pris pour des demeurés ? Que nous sommes devenus séniles et que, de temps en temps, il faut que quelqu’un vienne essuyer le filet de bave qui coule de nos lèvres absentes pendant que nos yeux morts sont vissés sur un quelconque écran ? Peut-être. Le spectacle de certains de nos contemporains pourrait commodément nous inciter à le croire. Ce besoin de norme, également réparti dans toute la société, n’est pas générationnel : en parallèle, BV s’est par exemple fait l’écho du succès, auprès des plus jeunes, des vidéos TikTok d’injonctions musulmanes toutes plus stupides les unes que les autres. C’est peut-être pire que cela : c’est devenu civilisationnel.

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Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

23 commentaires

  1. Il est sûr que quand un peuple met plus facilement le feu à un ville pour un 2 – 0 que pour un 49.3, on peut se poser des questions sur son devenir …

  2. Il fait (trop) chaud en été, il fait (trop) froid en hiver, ne serait-ce pas un peu (trop) conforme aux effets du dérèglement climatique? Je dois être un peu (trop) c.., mais j’hésite encore à me séparer de mon diesel, responsable pourtant attitré d’une partie de nos malheurs! J’en demande humblement pardon aux intelligents.

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