[Une prof en France] Le phénomène puff dans les collège et lycées

Illustration : capture d'écran JT TF1
Illustration : capture d'écran JT TF1

Chaque semaine, des élèves de mon collège sont exclus pour avoir vendu (ou acheté) une puff dans l'enceinte de l'établissement. Peut-être êtes-vous passés à côté du phénomène puff ? C'est une cigarette électronique préremplie et préréglée, aux couleurs pimpantes et acidulées, aux saveurs fruitées et récréatives, programmée pour être jetée au bout de 300 à 600 bouffées. Le taux de nicotine varie entre 0 et 2 %, si on se fournit en France, et peut monter encore si on passe par des sites américains, les concentrations les plus vendues aux États-Unis tournant autour de 5 ou 6 %. S'en procurer est d'une facilité enfantine : elle est vendue partout et coûte peu cher, et même si cette vente est en théorie interdite aux moins de 18 ans, la prolifération des puffs entre les mains de nos élèves prouve que les buralistes, comme les spécialistes de la vape, ne sont pas regardants. De toute façon, on en trouve partout sur le Net ou sur Instagram, et il suffit de renseigner une fausse date de naissance pour passer les barrières préventives et accéder aux sites.

Les adultes n'y voient que du feu...

Lors d'une sortie scolaire, j'ai parlé avec certains de mes élèves de 4e et ils me disaient que c'étaient leurs parents qui les achetaient pour eux. Ces parents pensent peut-être les éloigner ainsi de la consommation de tabac alors que toutes les études prouvent le contraire et attestent que ces cigarettes électroniques ludiques sont prédictives en termes de consommation tabagique. Mais c'est festif, et puis c'est la mode ! Il y en a partout, partout, et surtout sur les réseaux sociaux où des influenceurs sont payés pour en faire la promotion et où les autres gogos participent bénévolement à ce mouvement de propagation massive. Certains sites vantent même les mérites de la nicotine pour perdre du poids, nicotine que l'on trouve dans la puff avec un doux arôme de fraise, bien moins repoussant qu'une bonne vieille odeur de tabac froid. Ma fille lycéenne me disait que ses camarades tirent quelques taffes à chaque intercours : c'est rapide, cela se sort du sac en deux secondes, cela n'a pas besoin de temps de chauffe et laisse dans l'air une vague odeur de bonbon, de mangue ou de menthe fraîche. Les adultes n'y voient que du feu et les adolescents se gorgent de nicotine tout au long de la journée. La dernière venue, la « 9K », contient 9.000 bouffées, soit l'équivalent de 18 paquets de cigarettes.

La France réfléchit à l'interdire. Enfin, pas vraiment. C'est le « en même temps ». On veut l'interdire, mais l'an prochain seulement… Le temps d'écouler les stocks ? Les députés viennent de découvrir que c'est très très mauvais. On pourrait se demander pourquoi ils ne s'étaient pas renseignés avant d'autoriser la commercialisation d'un tel produit, étant donné qu'on avait depuis un moment des informations en provenance des États-Unis. Mais ils ont attendu « de voir ». On a vu. Maintenant, ils disent « stop », fermement ! Ils vont protéger nos enfants ! Tout cela doit cesser ! Nos représentants ont donc voté en février, à l'unanimité des deux chambres, une loi pour interdire la vente de puffs en France. Deux mois après, quid ? Eh bien, pas grand-chose, parce qu'ils attendent la validation par la Commission européenne. On se demande pourquoi on perd encore du temps et de l'énergie à voter des lois qui n'ont aucune valeur sans la bénédiction de l'Europe, dont on peut imaginer qu'elle hésitera à fermer la porte à un marché aussi lucratif.

Il y a donc fort à parier que les couleurs chatoyantes des puffs continueront encore longtemps à égayer les récréations et les sorties d'école.

Illustration : capture d'écran JT TF1

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 07/05/2024 à 14:52.
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Virginie Fontcalel
Professeur de Lettres

Vos commentaires

17 commentaires

  1. Pourquoi une nouvelle loi, une énième interdiction qui pénalisera à nouveau ceux qui n’y sont pour rien ?
    D’autant que, si on leur interdit cette puff, les jeunes auront vite fait de trouver autre chose

  2. Toujours déplorable ! Cependant, un seul avantage par rapport au tabac; il y à de la nicotine mais pas de goudrons et autres benzènes, pas de très hautes températures non plus, de la vapeur…donc, c’est « moins pire »…

  3. « Les députés viennent de découvrir que c’est très très mauvais. Les députés viennent de découvrir que c’est très très lucratif.

  4. Cette « prolifération » est stupide, et montre la docilité à la mode de jeunes incultes.
    Ceci écrit, j’ai réussi à arrêter de fumer (après 50 ans de cigarettes, cigares et pipes) grâce à la cigarette électronique : dosée à la nicotine (qui est, certes, une vraie drogue, mais autrement moins nocive que le cannabis ou les drogues « dures »), sans parfum (beurk !)
    Je « tiens », depuis 10 ans…

  5. Ce n’est pas la nicotine qui est nocive, mais tout le reste, en plus d’être poison c’est un apprentissage à la perte de prise en charge de soi-même, apprentissage à la soumission. Si seulement un prof pouvait l’expliquer aux mômes, qui au départ ne sont pas « tordus » dans leur majorité, l’affaire n’atteindrait que la minorité statistique habituelle.

  6. autrefois quand j’entendais  » la France réfléchie » ma foi j’avais une relative confiance sur un résultat imminent, aujourd’hui quand je lis  » la France réfléchie » je sais sans l’ombre d’un doute qu’il n’y aura rien au bout, que du vent pour  » dissiper la fumée »…..

  7. Au départ la cigarette c’est une découverte interdite, en plus les premières sont degueulasses. Ensuite elle devient un lien social pour devenir un toc et une addiction. Les grands cigarettiers ont réussi a aplanir les obstacles. Bravo messieurs.

  8. Le problème est de savoir si c’est cette nouvelle mode qui affaiblit les neurones ou l’inverse . La vérité est que les dits neurones n’ont rien à espérer de cet enfumage pluriquotidien .

  9. Il me semble que nous avions un Ministère de la Santé, des ARS qui savent parfaitement être fermes, fermement avec fermeté avec le bon peuple. C’est curieux cette inaction apathique devant un sujet pareil.

  10. A partir du moment ou ils ont acceptes en masse l injection d un produit sans aucune garantie , je vois pas ou est le probleme de ces cigarettes electroniques qui parait si anodin a cote

  11. Les Français, serraient-ils un peuple de drogués ? Entre les puffs à la nicotine, l’herbe, les drogues dures, qui génèrent des milliards de profits et qui affaiblissent le mental ou les neurones, les antidépresseurs qui vous font voir la vie en rose, on comprend pourquoi certains sont facilement hypnotisés par Macron, ne voient pas le danger d’un tel vote, ne voient pas la réalité tout court. Et sont incapables de réaction, de révolte,
    un peuple de somnambules qui s’avancent « eyes wide shut » vers le précipice…

    • En grande partie oui. Certains parlent de « peuple de racistes dégénérés », ils n’ont pas tort sur le dernier terme. Espérons que, s’il y a une régénération, elle ne s’accompagne pas d’une poussée de racisme.

    • Vous oubliez de dire avec un « chef » lui-même, déjà somnambule, c’est le Puff-Daddy new look…

    • N’oublions pas l’insidieux poison, complément des drogues, distillé par Le Monde, Libé, France Inter et quelques autres…

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