La Sainte Couronne de retour à Notre-Dame : deux mille ans d’Histoire et de foi

Capture d'écran
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Ce vendredi 13 décembre 2024 à 16h30, la cathédrale Notre-Dame de Paris retrouve avec honneur et émotion l'une de ses fonctions les plus emblématiques, malheureusement interrompue depuis le tragique incendie de 2019 : la protection de la Sainte Couronne d'épines. Cette relique majeure du christianisme, symbole de la Passion du Christ, revient sous la voûte protectrice de ce monument historique. Elle est non seulement un objet de vénération pour les croyants, mais aussi un témoignage précieux de notre héritage judéo-chrétien, vieux de deux millénaires.

De Jérusalem à Constantinople

Les premières mentions de la Couronne d’épines apparaissent, bien sûr, dans le Nouveau Testament. Placée sur la tête du Christ par les Romains, elle devait symboliser et ridiculiser sa royauté malgré les paroles de Jésus affirmant que son royaume « n'[était] pas de ce monde ». Après la Passion, la tradition rapporte que la couronne fut récupérée et protégée par les premières communautés chrétiennes de Terre sainte jusqu’au IVe siècle. Reprise par l’Empire romain d’Orient, ce dernier décide de déplacer la précieuse relique à Constantinople aux menaces pesant sur Jérusalem en raison de l’expansion de l’islam. Ainsi mise à l’abri pendant des siècles, elle y est vénérée par les fidèles et reste un symbole majeur de la chrétienté.

L’acquisition par Saint Louis : un acte de foi et de prestige

Malheureusement, au XIIIe siècle, la menace musulmane rattrape la Sainte Couronne et l’Empire byzantin. Ce dernier, face à des difficultés économiques, est contraint de vendre certains de ses trésors les plus précieux afin de pouvoir continuer à résister aux Sarrazins. Ainsi, Baudouin II de Courtenay, empereur latin de Constantinople, décide, en 1238, de vendre au plus offrant la Couronne d’épines. En France, le pieux Louis IX, futur Saint Louis, saisit cette occasion unique afin de manifester la dévotion de son royaume à Dieu, mais aussi pour protéger ce symbole de la Passion. En conséquence, pour la somme colossale de 135.000 livres tournois, la Couronne est acquise et transportée en France. Arrivant à Villeneuve-l'Archevêque (Yonne) le 10 août 1239, elle est accueillie par le roi lui-même. Saint Louis, pieds nus et vêtu en pénitent, la porte avec ses frères en procession solennelle jusqu’à Paris. La pieuse relique est alors déposée dans Notre-Dame de Paris qui n’est pas encore achevée. Cependant, cette situation n’est que temporaire car Louis IX veut que ce trésor puisse reposer dans un lieu spécialement dédié à sa protection et à sa vénération. Ainsi, il fait édifier en 1248 un gigantesque et majestueux reliquaire : la Sainte Chapelle.

Un trésor chrétien à travers les siècles

Ainsi, la chapelle palatine de l’île de la Cité devient le sanctuaire de la Sainte Couronne, mais aussi celui d’autres reliques de la Passion, comme un fragment de la Vraie Croix et un clou de la Passion. Ces trésors demeurent alors au cœur de la Sainte Chapelle jusqu’à la Révolution française. Cette dernière, sans scrupules, confisque les reliques à l’Église et les déplace à la Bibliothèque nationale de Paris. Ce n’est qu’en 1801, après la signature du concordat entre Napoléon Bonaparte et le pape Pie VII, que la Couronne d’épines est enfin restituée à l’Église. Ne pouvant plus être déposée dans la Sainte-Chapelle, devenue propriété de l’État, l’archevêque de Paris, Mgr Jean-Baptiste de Belloy, décide, en 1806, de l’installer à Notre-Dame. La garde de la relique est alors confiée aux chevaliers du Saint-Sépulcre de Jérusalem qui, depuis, n’ont jamais failli à leur mission. Dès lors, la Sainte Couronne ne quitta plus la cathédrale jusqu’à l’incendie de Notre-Dame en 2019. Sauvée de la destruction par les pompiers, elle fut transférée à l’église Saint-Germain-l’Auxerrois, autrefois paroisse des rois de France, où elle est restée jusqu’à aujourd’hui.

Ainsi, à l’occasion de son retour triomphal à Notre-Dame de Paris, une grande procession - en présence des chevaliers du Saint-Sépulcre -, des vêpres et une messe marquent cet événement historique, ce 13 décembre. En effet, la Sainte Couronne n’est pas seulement un objet de vénération religieuse : elle est, comme le rappelle le père Guillaume Normand, vice-recteur de la cathédrale, « une preuve tangible de l’historicité de la Passion du Christ ». Elle est un fragment de l’Histoire humaine et incarne également le lien indéfectible entre la France et le christianisme, symbolisant à jamais l’importance inaliénable de ce patrimoine culturel au sein de notre identité nationale.


CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet – Histoire de Paris

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Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

7 commentaires

    • Non, un vieux Monsieur à barbe blanche assis dans un fauteuil, ce n’est pas Dieu.
      Mais, Dieu, « celui dont on ne peut prononcer le nom » suivant le dogme israélite existe, et son existence est prouvée scientifiquement. Ce sont les scientistes du 19ème et du 20ème qui se sont pris pour Dieu lui-même et ont nié son existence.
      Du déni c’est tout.
      Aujourd’hui, la physique quantique aussi bien que la physique traditionnelle ne peuvent qu’entériner l’existence de l’âme et d’un « Dieu ». C’est prouvé.
      Mais, il est toujours possible de nier l’existence de ce que l’on voit.

  1. J’ai retardé un rendez-vous afin d’assister sur Kto à retransmission en direct.
    C’était un moment émouvant, suspendu entre l’Histoire de la France et de la Religion Chrétienne Catholique racine de la France !
    Ravi également de voir que Monseigneur Ulrich avait (enfin) opté pour des Habits Sacerdotaux plus traditionnels.
    Quand au « réceptacle » créé pour accueillir le Sainte Couronne, je reste sur mon expectation, trop « d’idées » modernes inappropriées pour le lieu.

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