Abbaye N.-D. du Port-du-Salut : déclin d’un joyau spirituel de la Mayenne
Qui ne connaît pas l'expression « C'est écrit dessus comme le Port-Salut » ? Une expression qui vient tout simplement d'une publicité des années 60 pour le fromage Port-Salut, produit à l'abbaye du même nom, située à Entrammes, en Mayenne. Cette abbaye est bien plus qu'un lieu de prière : elle est un pan essentiel de l'histoire religieuse, agricole et culturelle de cette région de France. Fondée en 1815 par des moines cisterciens trappistes, elle a acquis une renommée mondiale grâce à son fromage emblématique. Cependant, aujourd'hui, elle se trouve à un tournant décisif. En effet, le 21 décembre 2024, l'annonce officielle de sa fermeture en 2025 a marqué la fin d'un chapitre vieux de plusieurs siècles.
Un site stratégique et sacré depuis l'Antiquité
Bien avant l'arrivée des trappistes, le site de l'abbaye était déjà un lieu sacré et stratégique. Les vestiges d'un dolmen à proximité témoignent ainsi de son importance spirituelle dès la Préhistoire. À l'époque gauloise, le gué qui traversait la Mayenne faisait de cet emplacement un axe de communication primordial. Les vestiges gallo-romains et mérovingiens (remparts, thermes et autres structures) révèlent également le rôle frontalier de ce lieu entre la Bretagne et le royaume des Francs.
Au IXᵉ siècle, la vie monastique commence à s'y implanter avec la fondation de deux monastères, l'un pour les hommes et l'autre pour les femmes. Au XIIIᵉ siècle, le seigneur Thibault de Mathefelon fait don aux moines d’une église dédiée à la Vierge Marie et à saint Nicolas, toujours utilisée aujourd'hui. En 1233, le domaine est confié à des chanoines réguliers, qui y bâtissent un prieuré toujours existant aujourd’hui encore. Cependant, après plusieurs siècles d’existence, la Révolution française bouleverse cet équilibre : en 1790, les chanoines sont expulsés et le site est vendu comme bien national. Abandonnée, l'abbaye tombe alors en ruine jusqu'en en 1815. En effet, avec l'autorisation de Louis XVIII, des moines, trappistes exilés à l'étranger, font de l'abbaye de Port-du-Salut le premier monastère cistercien à renaître en France après la période révolutionnaire et l'Empire.
Un lieu de prière et d'innovation
La communauté trappiste qui s'installe à Port-du-Salut redonne vie au site, le transformant en un centre de spiritualité et de travail manuel (Ora et labora !). L'une de leurs contributions les plus célèbres est la création du fromage Port-Salut dans les années 1830. Ce fromage à pâte pressée non cuite, avec sa croûte orange caractéristique, connaît un succès rapide et devient un gage de qualité pour tout plateau de fromage qui se respecte. En 1874, le nom « Port-Salut » est déposé comme marque, garantissant son authenticité. Cependant, la production industrielle est cédée en 1959, bien que les moines continuent une fabrication artisanale jusqu'en 1988. Un fromage devenu célèbre dans le monde entier.
La crise des vocations et la fin d’une époque
Malheureusement, comme beaucoup d’autres communautés religieuses en Europe, l'abbaye de Port-du-Salut a vu ses effectifs diminuer au fil des décennies en raison de la terrible crise des vocations qui frappent l’Église. Alors qu'elle comptait autrefois une communauté florissante (ils étaient 120 moines au début du XXe siècle !), l’abbaye ne compte plus, en 2024, que six moines et deux familiers, un groupe dont la taille ne permet plus d'assurer la viabilité spirituelle et matérielle de l'abbaye. Ainsi, lors d'une réunion, le 21 décembre 2024, Dom Gérard Meneust, abbé de Port-du-Salut, a annoncé que la fermeture du monastère serait effective en 2025. Une décision difficile mais inévitable et forçant les derniers moines à rejoindre d’autres monastères en France.
Quel avenir pour l'abbaye ?
Le devenir de l'abbaye reste cependant incertain. Une commission diocésaine doit se réunir en janvier 2025 pour décider du sort de ce lieu historique. Plusieurs pistes peuvent être envisagées afin de préserver l'héritage du lieu tout en s'adaptant aux besoins modernes : transformer l'abbaye en centre spirituel ouvert au public, en lieu de retraite ou en espace culturel.
Cependant, malgré sa fermeture, l'abbaye de Port-du-Salut demeurera toujours un symbole de foi et d'innovation. Son histoire, marquée par des renaissances successives, résonne encore à travers son fromage, qui perpétue son nom et sa réputation. L'abbaye, avec son patrimoine spirituel et culturel, laisse ainsi à jamais une empreinte durable dans notre mémoire collective.
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2 commentaires
la chrétienté abandonne au fil des ans tous ces lieux symboliques, ils préfèrent les grandes parades avec la presse aux lieux de recueillements, encore une fois on laisse en décrépitude notre civilisation à des camarades du Pape qui ne sont que de lointains représentants de notre civilisation.
» Cependant, malgré sa fermeture, l’abbaye de Port-du-Salut demeurera toujours un symbole de foi et d’innovation. Son histoire, marquée par des renaissances successives, résonne encore à travers son fromage, qui perpétue son nom et sa réputation. »
Si l’abbaye ne se perpétue dans la mémoire collective que par son fromage cela est bien triste ! Cette pirouette, en conclusion, dispense de s’interroger sur les causes de la disparition des vocations que cette Eglise moderniste, devenue protestante, a provoquée avec une constance digne d’admiration…