[L’OEIL AMERICAIN] Trump parviendra-t-il à réaliser la révolution populiste ?
Ce lundi 20 janvier 2024 marque le jour de la seconde investiture de Donald Trump et, pour ses partisans les plus déterminés à « assécher le marécage » (« Drain the swamp ») d’un écosystème à Washington qu’ils jugent corrompu, c’est maintenant que tout commence. Trump parviendra-t-il à remettre en question le statu quo ou bien sera-t-il une seconde fois neutralisé ? Steve Bannon, ancien conseiller de Trump et figure sulfureuse du mouvement MAGA, a prévenu : ce qui se prépare en 2025, c’est une guerre. Ce qui est certain, c’est que, comme lors du premier mandat, nombreux sont ceux bien décidés à tout faire pour que Trump ne parvienne pas à « secouer le système ». Le « système » n'a rien vu venir.
C'était une question apparemment anodine perdue au milieu de dizaines d'autres. Des dizaines de questions d'un sondage lui-même perdu au milieu de centaines d'autres. A cette époque, les chiffres des enquêtes d'opinion inondaient quotidiennement les salles de rédaction et les ordinateurs des analystes politiques. Tous s'efforçaient de prédire l'avenir électoral en se livrant à de savants calculs. Ils décortiquaient, comparaient, extrapolaient. Il y avait tant à faire que personne ne prêtait guère attention à cette petite question apparemment anodine perdue au milieu de dizaines d'autres.
Et pourtant, les résultats des réponses qui lui avaient été apportés annonçaient déjà, sans qu’on s’en rende compte, l'improbable : la victoire d'un candidat condamné pour crime, accusé d’avoir fomenté un coup d’État, soupçonné d’être la marionnette de Poutine et présenté comme sexiste, raciste, narcissique. Ces résultats, en réalité, ne se contentaient pas d’indiquer une possible victoire de Donald Trump. Ce qu’ils pointaient du doigt, par-delà l’élection présidentielle américaine, c’était l’amplification de la vague populiste qui traverse les pays occidentaux et fait trembler les belles âmes et les esprits bien-pensants.
Le dynamiteur du désordre établi
La question posée par le sondage Harvard-Harris en février 2024 était la suivante : « Pensez-vous que Donald Trump est quelqu’un qui va secouer le pays pour le mieux ou pensez-vous qu’il est un danger pour la démocratie et qu’il divisera le pays s’il est élu ? ». A cette question, 56 % des Américains répondait qu’il « secouerait le pays » pour le mieux. Un avis partagé par 87 % des républicains mais aussi (ce qui était vraiment surprenant) par 30 % des démocrates et 51 % des indépendants.
Bien qu’il ait effectué un premier mandat et donc déjà exercé le pouvoir, bien qu’il soit présenté comme le chef d’une secte et un dictateur en puissance, Trump était majoritairement perçu comme quelqu’un à même de défier le statu quo et de bousculer le système. Par-delà les thèmes qui s’imposaient dans cette élection – immigration, inflation, criminalité –, cette question renvoyait à un enjeu beaucoup plus vaste : une forte volonté de changement liée à une fracture entre les élites politiques et le « petit » peuple des déclassés.
Pour s’en convaincre, il suffisait de regarder les résultats d’une étude du Pew Research Center, publiée en septembre 2023, qui montrait l’état d’esprit des Américains à l’égard de leur système politique. 89 % des Américains disaient ressentir de la colère souvent ou de temps en temps lorsqu’ils pensaient à la politique contre seulement 11 % qui répondaient rarement ou jamais. 72 % des Américains considéraient globalement que le système politique fonctionnait mal. Quant à la confiance dans le gouvernement fédéral à Washington, elle passait d’environ 77 % au milieu des années 60 à 16 % en 2023. Des résultats confirmés par un récent sondage, dans lequel 72 % des Américains déclarent que le gouvernement travaille principalement dans son intérêt et celui des élites.
Relire la victoire de novembre dernier à l’aune de ces résultats modifie la perspective et renverse le grand récit que de nombreux médias ont tenté d’imposer pendant la campagne : pour une majorité d’Américains, la plus grande menace pour la démocratie n’était pas Trump mais le système politique lui-même et ses représentants à Washington.
L’obstacle est le chemin
Trump contre le « Système » : tout est là. Pour les élites politiques et médiatiques, le populisme MAGA représente la menace d’une dictature. Pour les partisans de Trump, c’est l’establishment qui, rivé à ses privilèges et à son idéologie, s’est coupé du peuple et a confisqué la démocratie. Or, il semblerait bien, au vu des résultats de la présidentielle, qu’une majorité d’Américains a fini par s’en convaincre.
Même le très progressiste New York Times se résignait, en décembre dernier, à aborder le problème dans un article qui s’intéressait à ces électeurs pour qui les préférences politiques ne sont pas définies par des options partisanes mais bien plus par leur attitude à l’égard de la classe dirigeante. Et notamment de nombreux hommes jeunes qui ont voté Trump en novembre dernier : « Ils se sentent frustrés par le statu quo, ils en ont assez du système, ils ne font pas confiance aux politiciens et ils veulent un changement révolutionnaire. »
C’est cette clé de lecture qui permet de comprendre que là où les élites voyaient un obstacle, d’autres voyaient un chemin conduisant à l’adhésion. C’est justement parce que Trump donnait l’impression de porter en lui le « chaos » qu’il attirait à lui une frange de la société que l’establishment démocrate comme républicain méprise et refuse de prendre en compte. Ce que voulaient ces électeurs, c’était un dynamiteur du désordre établi.
Et plus Trump était attaqué et dénigré par les élites, plus l’Amérique des déclassés voyait en lui son champion. « Je vais voter pour le gars avec le plus d’actes d’accusation », déclarait au Wall Street Journal, en 2023, une retraitée qui vivait dans la banlieue de Des Moines, dans l’Iowa.
Dans un article paru dans le même quotidien en 2018, la journaliste Peggy Noonan avait parfaitement analysé le phénomène. Si les partisans de Trump l’avaient choisi et soutenu en 2016, c’est parce qu’il n’était pas « normal ». « Ils avaient essayé la normalité ! Ça n’avait pas marché ! Bien sûr, c’est une brute, mais sa brutalité était la seule chose qui pouvait surprendre Washington, l’effrayer, la faire se réformer », écrivait-elle.
C’est la guerre !
Le paradoxe de l’élection de 2024, c’est que les électeurs de Trump de 2016 auraient pu dire : « On a aussi essayé le gars « anormal », et ça n’a pas plus marché ». Cependant, ce que beaucoup de partisans MAGA ont retenu du premier mandat, c’est que Trump a été empêché de régler son compte à l’« Etat profond ». Faute de préparation, faute d’équipes en capacité de veiller à la mise en œuvre de sa politique et faute de pouvoir s’appuyer sur un parti républicain dont l’establishment était bien décidé à le canaliser.
On se souvient de ce célèbre éditorial publié par le New York Times en 2018 qui témoigne, a posteriori, de la guérilla qui sévissait à l’époque au sein du gouvernement : « Je travaille pour le président, mais des collègues partageant les mêmes idées et moi-même avons juré de contrecarrer certaines parties de son programme et ses pires penchants », se vantait un haut fonctionnaire de l’administration Trump. Ce sera nettement moins facile cette fois-ci.
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4 commentaires
Un peu mégalo quand même Trump ? annexer le canal de Panama , rebaptiser le golf du Mexique ,enfin ce n est que du vent .
Pendant ce temps Macron est parti gesticuler chez abbas,histoire de rester de redorer son blason auprès de…melanchon?
J’ai bu le champagne « Cuvée Spéciale » aujourd’hui.
Il faut fêter la fin de l’Empire du Mensonge. La fin de la Mafia Internationale Biden dont Macron était un valet. Il lui reste peu de temps pour retourner sa veste, voire son pantalon ! C’est un conseil non mérité, mais à suivre d’urgence !
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Macron n’est pas invité?
C’est vrai qu’il faut faire partie des gens importants… »Conseillologue » n’est pas suffisant pour un tel évènement.