[EXPO] La fastueuse Chine des Tang au musée Guimet

Capture d'écran Musée Guimet
Capture d'écran Musée Guimet

Il reste un petit peu moins d’un mois avant la fin de l’exposition temporaire, au musée Guimet, sur La Chine des Tang. Débuté le 20 novembre dernier, cet événement incontournable pour les sinophiles, et les passionnés d’histoire en règle générale, prendra fin le 3 mars 2025 ; il n’est donc pas trop tard pour planifier sa sortie. La visite n’excédant pas une heure et demie, il serait dommage de ne pas réussir à lui caser un créneau dans son agenda. Organisée en partenariat avec Art Exhibitions China, cette exposition très attendue réunit plus de deux cent sept ensembles d’œuvres provenant d’une trentaine de musées chinois.

La dynastie Tang, maîtresse de l’Asie

Le visiteur a ainsi la chance de se plonger dans l’une des périodes (VIIe-Xe siècle) les plus fastes et prestigieuses de l’empire du Milieu. L’une des plus complexes, également. Car sous les Tang, dynastie fondée en 618 par Li Yuan (l’empereur Gaozu), la Chine connaît une extension territoriale importante vers l’Asie de l’Ouest, le nord du Viêt Nam et la Corée. Il en résulte, pour le pays, et notamment sous le règne de Xuanzong (713-755), un rayonnement commercial sans précédent, avec son immense capitale Chang’an (actuelle Xi’an), s’étendant sur neuf kilomètres par huit, que fréquentent aussi bien des populations venues du Japon, de Corée, du Viêt Nam, du Champa que de Perse sassanide ou d’Asie centrale. Porté vers l’extérieur, l’empereur Gaozong intervient même dans les conflits coréens et permet la victoire décisive du royaume de Silla sur les territoires de Baekje et de Goguryeo, marquant l’unification politique de la péninsule.

Essor des lettrés et culture du raffinement

Par ailleurs, sous les Tang, le système éducatif se renforce, tout comme le culte de Confucius, tandis que le travail historiographique suscite un intérêt nouveau parmi les élites. À la cour, la consommation du thé se généralise et se ritualise, comme en atteste Le Classique du thé, de Lu Yu. Un souci du raffinement que confirme l’engouement inédit pour les arts du pinceau et la littérature. Sur ce dernier point, notons que la poésie Tang – on pense aux poèmes de Li Bai et de Du Fu – servira pour des siècles de modèle indépassable. Peu à peu, l’élite des lettrés gagne en influence, préfigurant la période des Song. Les recrutements sur concours, qui poursuivent une tendance lancée sous les Sui, se systématisent et traduisent un déclin progressif de l’aristocratie traditionnelle, bien que la cooptation familiale au sein de l’administration reste monnaie courante.

Aux sources du déclin

Aussi, à mesure que le pouvoir se bureaucratise, l’embauche de fonctionnaires se fait-elle pléthorique et contribue-t-elle à dilapider les ressources de l’État. Ce développement irraisonné de la fonction publique favorise, de surcroît, les phénomènes de captation de fonds et de corruption des élites. Face à cela, les monastères bouddhistes, encore largement exemptés de taxes, possèdent un patrimoine foncier colossal qui inquiète le gouvernement. Dès 845, l’empereur Wuzong tente d’assurer son contrôle sur cette religion d’importation en voie de sinisation et d’en réduire le pouvoir économique. Alors, tous les prétextes sont bons pour faire fermer des monastères et renvoyer leurs occupants à la vie laïque. Cependant, comme souvent dans l’histoire de la Chine, les véritables dangers viennent de l’armée : l’expansion militaire conduit à une lourde défaite face aux Arabes à Talas, près de Samarcande, en 751. Dès lors, les généraux commencent à contester le pouvoir en place et, munis de leurs propres troupes, prennent leur indépendance, entraînant au fil des ans une inéluctable fragmentation administrative de l’empire. Laquelle débouche, in fine, sur la chute de la dynastie Tang et l’avènement de la période dite des « Cinq Dynasties et des Dix Royaumes », qui précède l’arrivée des Song en 960. Relativement courte, mais passionnante, l’exposition sur les Tang donne à voir les dernières trouvailles archéologiques de la période, qu’il s’agisse d’outils du quotidien, d’artisanat, de bijoux, de manuscrits ou d’œuvres picturales. Le visiteur est également invité à faire un tour à l’étage, où se trouvent les expositions permanentes, afin de poursuivre son immersion dans la Chine impériale.

 

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Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

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  1. « Aussi, à mesure que le pouvoir se bureaucratise, l’embauche de fonctionnaires se fait-elle pléthorique et contribue-t-elle à dilapider les ressources de l’État. Ce développement irraisonné de la fonction publique favorise, de surcroît, les phénomènes de captation de fonds et de corruption des élites.  » L’Histoire est un éternel recommencement.

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