César : contre les grands succès populaires, le triomphe des navets woke

Il s’agit, une énième fois, de la démonstration concrète de cette déconnexion totale entre le peuple et les élites.
© 2024 CHAPTER 2 – PATHE FILMS – M6 - Jérôme Prébois
© 2024 CHAPTER 2 – PATHE FILMS – M6 - Jérôme Prébois

La cinquantième cérémonie des César a eu lieu le 28 février dernier. Elle doit, comme on le sait, récompenser les meilleurs films, les meilleurs acteurs et actrices, les meilleurs décors et costumes et tutti quanti. Parmi les grands succès du box-office cette année, on pouvait noter, évidemment, Le Comte de Monte-Cristo, magnifique réussite, très librement adapté du roman d’Alexandre Dumas. Le film de Mathieu Delaporte et Alexandre de La Patellière est la preuve que l’on peut parier sur le goût du public pour les films longs (trois heures !), la littérature classique et les histoires intemporelles. D’ailleurs, l’Académie des César avait nommé le film dans quatorze catégories - un record, cette année. Et puis, il y avait aussi Un p’tit truc en plus, premier film d’Artus, hommage à la fois drôle et émouvant aux personnes handicapées mentales. On pouvait aussi penser que L’Amour ouf, film touchant de Gilles Lellouche sur l’évolution d’une relation amoureuse entre l’adolescence et l’âge adulte, plairait aux jurés.

Car il faut ici préciser le mode d’attribution des César : ce sont les 4.951 membres de l’académie des César à jour de cotisation (chiffre arrêté en décembre 2024) qui votent pour le film ou la personne de leur choix. Ces membres sont tous des professionnels de l’industrie cinématographique. À aucun moment le public n’est sollicité. Cela veut très concrètement dire que le public, quand il regarde la cérémonie des César, assiste passivement à la célébration des films, acteurs, réalisateurs, musiciens, etc., qui ont plu aux « professionnels de la profession ». On ne peut pas dire que ce soit une grande fête du cinéma. C’est plutôt le moment que choisit la profession pour se congratuler.

Dans de telles conditions, on ne peut pas s’étonner du résultat de l’édition 2025. Le Comte de Monte-Cristo ne rafle que deux statuettes : décors et costumes. Il était cité, on l’a dit, dans quatorze catégories. L’Amour ouf devra se contenter d’une récompense : meilleur second rôle pour Alain Chabat, alors qu’il était cité dans treize catégories. Les grands gagnants sont ailleurs. L’Histoire de Souleymane, un film qui raconte l’histoire d’un jeune Guinéen, livreur à vélo dans Paris, qui prépare son audition par l’OFPRA, obtient quatre César, dont celui de la révélation masculine pour Abou Sangaré, acteur non professionnel qui tient le rôle principal et dont l’histoire personnelle a inspiré l’écriture du film. Et puis, évidemment, le grand gagnant, c’est Emilia Pérez, l’histoire d’un narcotrafiquant qui disparaît de la circulation pour changer de sexe : sept César. Pas de surprise : toutes les cases sont cochées dans ces deux films. Le côté hors-sol des réalisateurs et de leur projet ne compte pas. Par exemple, peu importe que Jacques Audiard, dans un entretien autour du film, considère l’espagnol comme « une langue de pays émergents, de gens pauvres et de migrants » : ce snobisme très « exposition universelle » ne dérange personne entre les frontières rassurantes du périphérique.

Au fond, il s’agit, une énième fois, de la démonstration concrète de cette déconnexion totale entre le peuple et les élites. On pense à la chanson Foule sentimentale d’Alain Souchon. On pense au succès énorme du Puy du Fou. Contrairement à ce que croient les gens des métropoles, contrairement à ce que l’on pourrait se dire après des décennies de Disneyland, de télévision et de nuggets surgelées, oui, le peuple a du goût. Il en a même bien davantage que les 4.951 élus (par qui ?) chargés de donner les statuettes et les bons points. Le divorce est décidément consommé entre le bon sens et la mode. C’est vraiment la fin de l’Empire romain !

Picture of Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

74 commentaires

  1. Vivement que la politique anti woke de Trump rejaillisse sur l’Europe et que tous ces clowns adeptes de l’entre-soi retournent au néant d’où il n’auraient jamais dû sortir… Quand aura-t-on enfin une démocratie qui nous libère de la pensée unique (de gauche évidemment)?

  2. Le meilleur moment (pour ce que j’en ai vu) est dû à Franck Dubosc et à son dérisoire micro-césar qui a dû dégondler bien des grosses têtes césarisées. Mais le problème est ailleurs : pourquoi Europe 1 depuis une semaine nous invitait à regarder cette « grande fête du cinéma » ? Et pourquoi Canal + (bien peu remercié pour tout ce que cette chaîne bolloréenne fait pour le cinéma) continue à nous infliger cette soirée ? Au moins, qu’elle soit en crypté. En Belgique, même la très woke RTBF n’ose plus programmer les Magritte d’or, animés cette année par la navrante Charline van France-Inter, sinon sur un improbable canal où elle a réuni… moins de 20000 téléspectateurs ! Une idée à suivre…

  3. c’est la déchéance totale de cette caste « artistique ». depuis que l’on nous a viré des cinéma il y a quatre ans je n’y ai pas remis les pieds. On verra quand leurs navets ne seront plus financés par l’argent des français peut-être qu’on verra réapparaître des films dignes de ce nom.

  4. Je vous propose de mettre la 8 ou la 12 sur votre télémensonge, donc allumée en permanence avec un écran noir de la liberté wokiste de penser via le KGB médiatique des pieds nickelés du pouvoir actuel. Si cela pouvait fausser l’audimat menteur lui aussi!

  5. Ce ne sont, ni les Oscars, ni les Césars, mais les Gaspards, les Briscards, les Tocards, les Avatars, les Tricards.
    Bref, selon le mot de Fernandel,  » le grand gala organisé au profit des organisateurs de galas « .

Laisser un commentaire

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Pourquoi prétendre être fort avec la Russie quand on est faible avec l’Algérie ?
Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois