France Info évoque un risque d’ingérence russe pour la présidentielle de 2027

« Présidentielle 2027 : le risque de perturbations du scrutin par des ingérences russes ». C’est cette inquiétante prédiction qu’a choisie Renaud Dély comme titre de son étrange éditorial du 11 mars, sur France Info. Ayant sans doute capté des précisions dont le Président ne nous avait pas fait part lors de ses dernières prestations, il nous apprend donc qu’au-delà de « la menace russe sur le plan militaire, il en est une autre qui inquiète tout particulièrement l’exécutif : la menace numérique avec le risque d’ingérence de Moscou dans les prochains scrutins ».
TikTok, otage de Poutine ?
Mais l’objet des inquiétudes élyséennes ne serait pas les élections municipales, pourtant premières en date, étant programmées pour mars 2026. Non, il s’agit bien de la présidentielle de l’année suivante, et notre éditorialiste de préciser que le « détournement des réseaux sociaux à des fins électorales figure parmi les premières préoccupations de l’Élysée ». Décidément, heureusement que le Président murmure à l’oreille de France Info ! Mais là s’arrêtent les révélations prédictives de notre « monsieur Irma ». Il suffisait, en effet, de bien écouter les propos d’Emmanuel Macron qui, recevant la présidente moldave Maia Sandu, avait déclaré qu’elle était confrontée « aux tentatives russes de plus en plus désinhibées de déstabilisation ». Et Renaud Dély de décrypter alors le message présidentiel : « En octobre, elle a emporté de justesse un référendum validant l’objectif de l’adhésion de son pays à l’Union européenne, malgré le détournement d’environ 300.000 voix par l’intervention de fonds russes estimés à près de 100 millions d’euros. » Détournement et fonds qui sont peut-être bien réels et bien russes, mais cela, les services moldaves n’en ont pas encore établi la preuve formelle à ce jour, comme le montre la lecture du compte rendu qu’en a fait Public Sénat, qui a dû se contenter de relayer les affirmations et intimes convictions de la présidente, des enquêteurs et commentateurs.
La Roumanie, ce « cas d'école »
Bon, mais il y a aussi la Roumanie, et là, nous annonce l’éditorialiste du service public, « la présidentielle roumaine fait figure de cas d’école ». Dans le viseur, le candidat de droite et anti-UE Călin Georgescu qui, comme l’expliquait BV, a d’abord été accusé de manipulations sur TikTok, avant de voir l’élection annulée alors qu’il était arrivé en tête au premier tour, puis d’être inculpé pour de tout autres motifs, et que sa candidature au nouveau scrutin de mai prochain soit invalidée. Et le tout sans qu’à ce jour, là encore, aucune preuve concrète ne soit publiquement apportée de sa culpabilité. Car si Renaud Dély nous explique qu’il a été « porté par l’intervention massive d’influenceurs financés par le Kremlin pour manipuler l’application TikTok », il n’est d’abord pas bien sérieux de prétendre qu’une campagne d’influence, même massive, puisse à elle seule permettre de passer de 8 % dans les sondages d’avant scrutin à 23 % dans les urnes. Mais surtout, cette accusation a été étrangement abandonnée lors de l’arrestation et de la mise en examen de Călin Georgescu, fin février, ce que notre éditorialiste se garde bien de mentionner, préférant évoquer les « ingérences étrangères qui se seraient déjà produites lors des élections européennes en 2024 ». À l’appui, un rapport finlandais dans lequel « Moscou est soupçonné d’avoir manipulé les algorithmes de TikTok pour offrir plus de visibilité aux formations d’extrême droite ». Là encore, du soupçon, mais de preuve, aucune.
Et un taquet pour Bardella...
Ce qui n’empêche pas Renaud Dély de s’aventurer toujours plus loin, et toujours sans preuve, afin de cogner au passage sur le Rassemblement national : « Lors de cette campagne [des européennes] l’audience des vidéos des candidats diffusées sur TikTok variait selon les horaires, ce qui est logique. Sauf celles de Jordan Bardella, toujours au sommet, quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit. Les bots russes, ces logiciels automatiques qui truquent l’audience, ne dorment jamais. » Accusation gratuite, qui a sans doute rempli d’aise son auteur et ses plus fidèles auditeurs, mais qui permet surtout de « boucler la boucle ». Car, preuve ou pas preuve, autant de « sentiments de preuve » constituent bien une preuve, n'est-ce pas ? Et la « France peut difficilement se protéger de ces ingérences avant 2027 ». CQFD! D’autant plus que la « mise en œuvre du Digital Services Act, la réglementation européenne qui bannit la propagation de contenus illicites en ligne, est encore assez chaotique ». Et il faut non seulement faire avec la lenteur maladive d’Ursula von der Leyen, mais en plus avec les pleurs des méchants puisque « chaque interdiction de compte est aussitôt dénoncée comme une atteinte à la liberté d’expression par ceux qui font œuvre de déstabilisation ». Et, pis encore, ces gêneurs qui ne supportent pas la bienveillante censure du camp du bien sont défendus par « les États-Unis de Donald Trump [qui] font campagne, eux ouvertement, pour les partis d’extrême droite européens, l’AfD tout récemment, lors des législatives en Allemagne, et dans deux ans, peut-être le RN à la présidentielle en France ».
Élimination du RN, mode d'emploi
Une fois sa lecture achevée, cet éditorial interroge. Car enfin, pourquoi s’ingénier à dire ce qu’Emmanuel Macron n’a pas dit mais aurait pu (et dû ?) dire ? Pourquoi se fatiguer à raconter autant de choses sans en prouver une seule ? À moins que le propos ne soit finalement prémonitoire. À moins que Renaud Dély ne nous donne tout simplement le mode d’emploi d’un enfumage réussi pour 2027. Les juges vont-ils condamner Marine Le Pen et l’empêcher de se présenter à la prochaine présidentielle ? Et si c'était le cas, mais que le témoin était pris au vol par Jordan Bardella, n’y a-t-il pas, du côté de TikTok, de X ou d’autres réseaux sociaux, matière à référé, à annulation, à élimination ? Thèse complotiste, évidemment… Sauf que, comme l’a si bien dit Renaud Dély, « la présidentielle roumaine fait figure de cas d’école ».

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66 commentaires
Et de l’ingérence Française dans les élections roumaines, on en parle ?
Que TikTok puisse influer significativement sur une élection, comme en Roumanie, me paraît difficile à croire. D’abord, quelle proportion de citoyens regarde TikTok ? Ensuite, à supposer qu’ils soient nombreux, il faut vraiment prendre les électeurs pour des imbéciles pour imaginer qu’ils se laissent manipuler aussi facilement, surtout quand ils sont soumis constamment au matraquage médiatique du camp du bien.
Petite question à France Info qui a fait de l’ingérence pour que Macron soit élu 2 fois ? Il en va de même pour les municipales, qui diable a fait de l’ingérence, de la manipulation des unions afin de museler les citoyens ?
Avec çà que la CIA n’est pas dans les tripatouillages des élections de 2017 et 2022 !!!… Surtout avec ce système de vote par procuration où les organismes habilités sont tous dirigés par des « bien-pensants » macroniens
Les média du système doivent sans doute préparer les esprits au scénario Roumain en France en 2027. Ils pourrons écrire « on l’avait déjà pressenti en 2025, les influences russes ont bien eu lieu, c’est tout à fait normal d’annuler l’élection pour sauver la démocratie ». Ben voyons!
Si on n’avait pas les russes comme bouc émissaire il faudrait les inventer. Ils sont mis à toutes les sauces. A la place de Poutine je demanderais des droits d’auteurs.
Vous avez raison ;-)
Les mêmes qui déplorent les ingérences russes s’accommodaient très bien des ingérences communistes à l’époque de l’URSS.
Nous revivons exactement la même séquence que pendant le Covid, c’est tout simplement désespérant!
Donc, on sait déjà ce qui va se passer si le peuple vote « mal ». Comme en Roumanie.