Situation de Boualem Sansal : dramatiquement immobile

Nommer Boualem Sansal ambassadeur, cette stratégie pourrait-elle forcer Alger à céder ? Réponse avec Arnaud Benedetti.
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Quatre mois sont sur le point d’être écoulés depuis l’incarcération de l’écrivain franco-algérien. Alors que sa libération semble être au point mort et que ses proches sont sans nouvelles de lui depuis une quinzaine de jours, des efforts se poursuivent pour sortir Boualem Sansal des geôles algériennes dans lesquelles il se trouve depuis le 16 novembre 2024. L’ancien ministre de la Défense, Charles Millon, proposait ce mardi au micro de Sonia Mabrouk de nommer l’auteur de 2084 ambassadeur de la langue française auprès de l’UNESCO, afin de lui faire bénéficier de l’immunité diplomatique et le ramener en France.

Un signal fort attendu de la France...

Une proposition à laquelle le Comité de soutien pour la libération de Boualem Sansal réagit d’autant plus favorablement qu’il avait déjà suggéré une mesure en ce sens. Par la voix de sa présidente Noëlle Lenoir, ancienne ministre des Affaires européennes, il s’était exprimé au début du mois dans La Tribune du Dimanche. « Cela nous semble important car tout signe envoyé par le gouvernement en faveur de la protection de notre compatriote est positif », commente Arnaud Benedetti, politologue et membre du Comité de soutien, interrogé par BV.

Si la nomination de Boualem Sansal en tant qu’ambassadeur ne garantirait pas sa libération immédiate, elle permettrait à la France d’adopter une posture plus ferme. « Ce serait un signal supplémentaire », insiste Arnaud Benedetti, qui estime que l’exécutif doit faire preuve de davantage de volonté politique : « Il est important que le gouvernement montre, plus qu’il ne l’a fait jusqu’ici, qu’il protège Boualem Sansal » dont il rappelle qu’il est malade et âgé de 80 ans.

La stratégie diplomatique prudente adoptée jusqu’ici par Paris, misant sur la discrétion pour obtenir la libération de l’écrivain, semble avoir atteint ses limites. « Force est de constater que depuis quatre mois, cette approche n’a donné aucun résultat. La situation est dramatiquement immobile », déplore le politologue.

...qui pourrait de nouveau se heurter au refus d’Alger d’appliquer le droit

Mais dans cette affaire, faire valoir le droit semble une entreprise vouée à l’échec, tant les autorités algériennes multiplient les entraves. « Les Algériens refusent jusqu’à présent d’accorder à Boualem Sansal la protection consulaire à laquelle il a droit », rappelle-t-il. Et quand bien même l’immunité diplomatique lui serait conférée, rien ne garantit qu’Alger s’y plierait.

Les conditions de détention de l’écrivain suscitent une inquiétude de plus en plus vive : alors qu’il est transféré en boucle entre la prison et l’hôpital, son avocat, Me François Zimeray, est toujours en attente d’un visa pour lui rendre visite, et une campagne de presse hostile est orchestrée par le pouvoir algérien. La défense de Boualem Sansal a donc décidé de saisir le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies pour protester contre le caractère « arbitraire » de sa détention.

Mardi, lors d’une conférence de presse organisée au siège de Gallimard, son avocat a exprimé son inquiétude quant à l’état de santé et au moral de l’écrivain. Pour Arnaud Benedetti, l’attitude des autorités algériennes ne laisse que peu d’espoir quant à une issue favorable sur le strict terrain juridique. « Cette affaire ne relève malheureusement pas du droit, mais d’un rapport de force politique », constate-t-il avec amertume. Après quatre mois d’impasse, il admet : « On peut exciper tous les droits possibles et imaginables, force est de constater que les Algériens se sont assis jusque-là sur tous les droits fondamentaux de Boualem Sansal. »

Vos commentaires

4 commentaires

  1. C’est à croire que Macron se désintéresse complètement du sort de Boualem Sansal.
    Macron préfère soigner ses relations avec le président Tebboune, qui lui le mène en bateaux, et fait tourner en bourrique les français.
    De plus, Macron est très occupé avec « sa » guerre, et à fichre la trouille aux français.
    Quand aux médias, mis à part BV, le JDD, CNews, et peut-être un tout petit nombre d’autres médias, s’intéressent encore à ce drame. Ce qui en soit est un drame !

  2. Chut, les « spécialistes » du gouvernement œuvrent dans la discrétion et sur leur porte ils ont affiché « ne pas déranger ». D’ailleurs ils sont si peu dérangés qu’ils ont fini par s’endormir, mais sans doute barrot (encore lui) nous dira qu’il faut se méfier du lion qui dort !
    Mettront il autant de ferveur pour rapatrier le corps de Boualem lorsque celui-ci ne sera plus de ce monde ?
    Nous pouvons nous interroger sur les intentions du chef de la nation grand habitué à laisser pourrir les affaires…

  3. A plusieurs reprises BV édité des articles où son âge est précisé, 89 ans. Sauf que cette information est fausse. Boualem Sansal n’a que 75 ans. A cette période de la vie, 5 ans, ça compte, tout comme en début de vie. Cette précision est importante, surtout quand on est touché par une maladie grave.
    Maintenant, je suis pleinement en osmose avec lui, et espère que l’Algérie le libérera bientôt. Sans doute est-il pour l’Algérie un otage, un prétexte au chantage.

  4. « Il est important que le gouvernement montre, plus qu’il ne l’a fait jusqu’ici, qu’il protège Boualem Sansal » dont il rappelle qu’il est malade et âgé de 80 ans » : mais le problème est bien le gouvernement qui n’ose affronter le président algérien , qui cède à toutes ses demandes , qui a peur . La lâcheté de macron devant ce président est une honte .

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