À Emmanuel Macron, petit prince, on dit « Monsieur le Président  » !

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Assurément, François Mitterrand était un grand prince. Un grand prince qui avait été obligé de se convertir au socialisme pour conquérir son royaume. Au cours d’une visite provinciale, le premier président socialiste de la Ve République dut faire face à des slogans hostiles, notamment celui-ci : "Mitterrand, fous le camp !" On lui prêta alors – mais on ne prête qu’aux riches – cette réponse : "Ça rime, mais c’est une rime pauvre." Les Présidents se suivent, ne se ressemblent pas, mais les bains de foule restent à chaque fois une prise de risque. Jacques Chirac, n’y échappa pas. C’est ainsi qu’il se fit traiter de "connard" par un opposant. Moins féru de poésie que son prédécesseur, mais l’esprit tout aussi vif, la réponse tomba : "Enchanté, moi, c’est Chirac !" Bon prince, Jacques Chirac !

Ce lundi 18 juin, Emmanuel Macron, à son tour, prenait son bain de foule. Au premier rang, derrière les barrières de sécurité, des collégiens. L’un d’eux, chevelu comme devait l’être son grand-père en 68, attaque les premières paroles de "L'Internationale" et interpelle, provocateur, le Président : "Ça va, Manu ?" Là, on se dit qu’il y a peut-être des coups de pied aux fesses – pardon, des actes de "violence éducative ordinaire", pour reprendre les termes du texte de loi proposé en février dernier par 29 députés - qui se sont perdus à un moment donné durant la courte et palpitante vie de ce révolutionnaire en herbe (on ne nous dit pas si c’est de la bonne). François Bayrou, lorsqu’un gamin des cités voulait lui tirer son portefeuille, lui, n’avait pas sa main dans la poche. Mais un Président ne peut pas faire ça. Sa main est faite pour guérir les écrouelles, pas pour baffer les jeunes sacripants et autres chenapans. Et puis, à l’école où est allé Manu – on pouvait l’appeler comme ça, à l’époque -, sa maîtresse ne pratiquait sans doute pas ce genre de sévices corporels d’un autre âge. "Tu m’appelles Monsieur le Président", a répondu Emmanuel Macron au petit insolent. Reconnaissons tout de même qu’on a sacrément progressé depuis l’inégalé, et sans doute inégalable, "Casse toi, pauv’ con !" de Nicolas Sarkozy.

Notons que si le Président avait dit « Jeune homme, vous m’appelez Monsieur le Président », la leçon eût peut-être plus porté chez des jeunes à qui l’on a appris dès la maternelle à dire « tu » à la maîtresse et à l’appeler par son prénom. À ce propos, on connaît cette anecdote sur Mitterrand - encore lui, décidément - à qui une militante échevelée, dans la chaleur d’un après-meeting, lui avait lancé : "On se tutoie ?" Réponse du Florentin : "Si vous voulez." Mais n’est pas Mitterrand qui veut. Ni Chirac, non plus. Et il a fallu qu’Emmanuel Macron en fasse des caisses devant les caméras en partant dans une longue leçon de morale au galopin. Tout y passa : "La Marseillaise", le "Chant des partisans", cérémonie officielle, faire l'imbécile, passer un diplôme avant de faire la révolution, il y a encore du boulot...

Il est vrai qu’Emmanuel Macron aime bien donner des leçons de morale devant les caméras : du général d’armée au jeune trou du c…, tout le monde y passe. Et c’est tellement facile, quand le réprimandé ne peut en placer une. Il y a les grands princes. Il y a les bons princes. Et, enfin, il y a les petits princes. Souvent d’anciens petits marquis.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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