À Marseille, le volontarisme de Retailleau écrase un Migaud transparent
Ce vendredi 8 novembre, Bruno Retailleau et Didier Migaud étaient en déplacement à Marseille pour détailler leur plan contre la criminalité organisée. Durant cette séquence, le ministre de l’Intérieur et le ministre de la Justice, d’horizons politiques différents, devaient parler d’une même voix. Pour s’assurer de cela, la veille, Michel Barnier, le Premier ministre, avait convoqué les deux hommes à Matignon.
Officiellement, les consignes ont été respectées. Lors de la conférence de presse qu’ils ont donnée dans les locaux de la préfecture de la deuxième ville de France, les deux ministres ont souligné les liens qu’il y avait entre leurs deux institutions et ont fait savoir qu’ils étaient prêts à travailler main dans la main. Sur le papier, c’est un sans-faute. Dans les faits, un peu moins.
Des éléments de langage
Didier Migaud est le premier à avoir pris la parole. Les yeux rivés sur ses notes, il a lu sa déclaration sur un ton monocorde. Il a manié à merveille les éléments de langage. Isabelle Couderc, la responsable du pôle criminalité organisée du parquet de Marseille, avait déclaré, au printemps dernier, en commission d’enquête sur le narcotrafic devant le Sénat : « Nous sommes en train de perdre la guerre contre les trafiquants à Marseille. » Le ministre de la Justice lui a répondu, devant la presse : « Nous sommes ici pour conjurer le sort. » Didier Migaud a également dit vouloir « montrer que la volonté politique est puissante » ou, encore, que « nous devions faire front commun », que « notre législation doit évoluer » et qu’il faut « un électrochoc ». Il a fait de la politique politicienne durant une quinzaine de minutes, avant de laisser la parole à Bruno Retailleau.
Le contraste a été des plus saisissants. Le ministre de l’Intérieur s’est montré bien plus concerné que son acolyte du jour. Il a parlé sans note, d’une voix haute et intelligible, et a semblé, vraiment, vouloir prendre le problème du narcotrafic à bras-le-corps. Ses annonces ont d’ailleurs été bien plus concrètes que celles faites par le garde des Sceaux. Il a détaillé son plan en quatre grands points : une nouvelle organisation de la chaîne judiciaire, de nouveaux moyens d’enquête, frapper au portefeuille et assainir des zones de non-droit. Dans chaque catégorie, il a donné des exemples des nouvelles mesures envisagées. Le renforcement des services de l’OFAST [Office anti-stupéfiants , NDLR], le fait de « donner au préfet le pouvoir de fermer les commerces de blanchiment » et le gel des avoirs sont quelques-unes de ses propositions. Le ministre de l’Intérieur a également annoncé deux mesures chocs. Selon lui, « il faut que le délinquant qui trafique puisse être expulsé de son logement, y compris dans les logements sociaux », et il faut lui « couper les aides sociales ».
Des éléments de réponse
Pendant que Bruno Retailleau égrenait ses propositions, Didier Migaud, lui, plongeait la tête dans son pupitre, pensif. Il ne regardait ni son voisin de scène ni les personnes présentes dans la salle. Il a eu beau se dire « totalement en phase » avec le ministre de l’Intérieur, il ne semblait pas l’être.
Après une courte séance de questions-réponses tout aussi discordante, aux alentours de 12h30, les deux ministres ont quitté la préfecture. Didier Migaud a pris la direction de la prison des Baumettes pour déjeuner aux Beaux Mets, un restaurant tenu par des prisonniers, haut lieu de la réinsertion. Bruno Retailleau, lui, avait rendez-vous dans les quartiers nord pour rencontrer les troupes de police. Tout un symbole... Le ministre de l’Intérieur et le ministre de la Justice ont tout fait pour masquer leurs différences. Ils ont essayé de parler d’une même voix, mais il n’y a pas eu résonance, plutôt dissonance. Le tandem a fait la preuve, ce vendredi à Marseille, qu'il ne fonctionne pas aussi bien que Michel Barnier et les Français auraient pu l’espérer...
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37 commentaires
Il ne serait peut-être pas mal, Bruno Retailleau, comme président? J’ai beau me creuser la tête, je ne vois personne qui sorte du lot…
La force d’une chaîne est égale à la force de son maillon le plus faible.. le maillon faible est la réponse pénale. Hélas.
Migaud n’est pas transparent il n’existe pas.
Pourquoi la france nous donne des hommes politiques comme ça ? Dans la vie courante on aurait même pas envie de lui parler.
Un deViliers gardé des sceaux ça oui
Il est apparu clairement que le ministre de la Justice n’est pas à la hauteur de la tâche. B. Retailleau prend toute la lumière, lui qui parle sans notes, avec conviction, avec force, qui a un programme. Pour le connaître un peu et avoir pu échanger avec lui lors de meetings, je peux assurer qu’il est une personne sincère, qui aime les gens, qui écoute et enregistre. Que deviendra le tandem justice-intérieur, nul ne peut le prédire. Mais il est certain que m. Migaud devra faire un effort pour suivre le ministre Retailleau dans son action.
Il est clair que D. Michaud n’est pas très à l’aise pour la présentation de leur plan contre la criminalité organisée et on pouvait s’y attendre, des raisons politiques comme vous l’évoquez mais sans doute aussi leur parcours personnel et aujourd’hui leur poste à la tête de ministères bien différent. Pour B. Retailleau qui travaille ces dossiers depuis fort longtemps c’est une évidence d’autant qu’il est suivi par l’opinion et la plupart des syndicats. Pour le ministre de la justice c’est une autre affaire il marche sur des œufs il n’a pas derrière lui toute la magistrature tant s’en faut ainsi que le parti politique auquel il a appartenu. Il m’apparaît donc que son discours tenait compte des éléments que je viens d’exposer, enfin j’aime à le croire.
Les humbles que nous sommes perçoivent parfaitement la réserve de D. Migaud. Verrons-nous un journaliste l’interroger sur les motivations qui l’incitent à adopter un tel comportement ? S’il n’est pas en phase avec la voie tracée par M. Barnier, que fait-il dans ce gouvernement ? S’opposer tant que faire se peut ? S’il tenait les rênes, quelle serait son action pour juguler cette dérive vers une profonde insécurité ? Est-il une taupe en service commandé ? Sa position mérite éclaircissements. Faut-il encore l’interroger.
Nos dirigeants ne sont pas avares de beaux discours , en France on est bien habitué à cela , la crainte que ça m’inspire est que ce soit sans lendemain , j’espère me tromper .
C’est bien de faire de beaux discours écrits par des énarques qui sont pleins de théories, mais à quand la pratique
Pourquoi se déplacer à Marseille, le pouvoir (ce qu’il en reste ) est à Paris. Que de la com, pas d’action
« Le tandem a fait la preuve, ce vendredi à Marseille , qu’il ne fonctionne pas aussi bien que Michel Barnier et les Français auraient pu l’espérer … » – Pire , ils sont d’accord sur « UN » point (1) , il est ABSURDE , ils persistent et confirment le seul point dont nous sommes « CERTAINS » qu’il ne fonctionnera , ni aujourd’hui , ni demain , ni jamais : La « Prohibition/Répression » . Je n’en suis pas désolé , mais navré !
L’intention est bonne ,mais avec les « floppées » de lois existantes pour vous mettre des « bâtons dans les roues » bon courage Mr le Ministre !! Ou bien passez outre de toutes ces lois et beaucoup de monde sera de votre coté !!
Monsieur le Ministre Retailleau , un discours , c’est parfait mais il vous faut agir rapidement et fortement sans état d’âme et surtout n’oubliez pas que nos enfants compte sur vous pour être de nouveau en sécurité !
Il va vous falloir stimuler le Ministre de la justice , il dit s’impliquer dans son désir de vous suivre mais il sera freiner par les syndicats de magistrats qui tiennent à leur auréole de défenseur des criminels !
Ils osent encore nous dire ce qu’ils ne feront pas.
L’inverse eut été plus efficace, si la « justice » démolit ce que fait la police, ce qui est le cas depuis longtemps, il ne servira pas à grand chose de déférer les délinquants devant des juges, particulièrement ceux du syndicat de la magistrature et même de ceux qui ne le sont pas, mais qui sont tétanisés par ces « gauchos », qui font leur loi au sein de cette institution.
Tant que les juges ne seront pas responsables de leurs actes devant une haute juridiction rien ne changera.
Donc, rien ne changera… Hélas !
à Jacques Darricarrere. Tout à fait d’accord avec vous, il y a très longtemps que je suis pour l’élection des juges, pour qu’ils soient responsables de leurs décisions, révocables et condamnables, puisque parait-il qu’ils jugent au nom du peuple……..
M. MIGAUD m’a donné l’impression d’avancer avec un pistolet dans le dos certainement tenu depuis la veille par . BARNIER ! A force d’être pensif on devient transparent puis invisible et la nature a horreur du vide M. MIGAUD devrait y penser.