A Valence, l’action de l’Eglise catholique occultée par les médias français

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Deux cent dix neufs morts et plus de 89 personnes encore portées disparues : dans la région de Valence, dix jours après les inondations meurtrières du 29 novembre, le bilan est encore provisoire. Un désastre qui a provoqué la colère des habitants contre le manque d'anticipation et l'incurie du gouvernement de Pedro Sanchez (les secours ont mis six jours pour arriver) mais qui a révélé une réelle compassion du couple royal et l'immense élan de solidarité d'un peuple. Un peuple capable de suppléer aux défaillances de l'État avec la participation si peu remarquée en France de l'Église catholique espagnole pourtant en première ligne.

L’équivalent d'une année de précipitations

Ce mardi 29 octobre dernier, c'est « l’équivalent des précipitations d'’une année normale qui a été accumulé » en seulement 3 heures et 20 minutes, selon l'agence météorologique espagnole l'Aemet. Outre le bilan humain, plus de 50 000 hectares de cultures agricoles (essentiellement des champs d'agrumes en pleine période de récolte) sont dévastés et toute une économie ruinée. Conséquence du réchauffement climatique, erreur des autorités qui ont détruit des barrages pour complaire à l'agenda européen, bétonnage excessif, toutes les hypothèses sont encore sur la table. Ce n'est pas la première fois dans l'histoire que la région est touchée : en 1957 déjà, Valence pleurait ses 80 morts, disparus dans l'inondation du siècle.

« L'Église en première ligne »

La presse française a largement relayé l'action des bénévoles auprès des sinistrés, occultant -volontairement ou non- le rôle endossé par les catholiques espagnols de toutes conditions qui se sont eux-aussi retroussé les manches. Réagissant très vite à l'appel de leur archevêque, Mgr Enrique Benavent, alors que bon nombre d'églises étaient touchées, les paroisses ont ouvert leurs portes, prêté leurs locaux, organisé la distribution de « couvertures, nourriture et chargeurs mobiles »  et mis en place des collectes de fond via l'association espagnole Caritas. Sur le site Vatican News, César García, curé de Notre Dame del Rosario de Sedaví, témoigne : « dans ma ferme, nous avons accueilli une dizaine de personnes qui ne sont pas parvenues à rentrer chez elles et l'eau leur arrivait déjà jusqu'à la taille ». La publication « L'Église en première ligne. Là où devraient être tous les catholiques » est apparue sur les réseaux sociaux.

Dans le paysage médiatique français, il faut vraiment éplucher la presse exclusivement catholique pour en entendre parler. On y trouve des témoignages édifiants, comme celui de cette femme sauvée miraculeusement des flots avec cinq autres personnes par le curé de San Ramon Nonato à Paiporta qui a ouvert les portes de son église malgré la montée des eaux (Famille Chrétienne). Nombreux sont les jeunes catholiques, séminaristes et religieux qui ont pataugé dans la boue dès les premières heures : « Nous ne sommes pas de grandes équipes de secours mais chacun arrive avec son petit balai, son petit chiffon, nous sommes là », témoigne sœur Servanne de la communauté des petites sœurs de l'Agneau à Valence, auprès de la radio RCF.

Un bataillon d'un millier d'étudiants de l'Université catholique de Valence, une trentaine de jeunes derrière leur curé de Getafe et d'autres groupes de plusieurs paroisses des environs, armés de pelles et de sceaux, se sont attaqués au nettoyage. Provida, une association pro vie de Valence a ouvert ses portes, comme toutes les paroisses des environs. Et les autorités ecclésiastiques, qui ont déjà fait célébrer une messe pour les victimes, imaginent prolonger l'effort, appelant à « maintenir une présence dans le temps car l'aide va prendre des mois, et même des années ».

Au milieu de la catastrophe, des petits miracles : l'église San Antonio à Catarroja, qui, quelques jours plus tôt, accueillait des reliques de Padre Pio, a été miraculeusement épargnée. Et ce Christ, retrouvé à Paiporta dans la boue : il est désormais le symbole des inondations.

Récupération politique et heure des comptes

L'idéologie n'étant pas l'apanage des médias français, certains médias espagnols incorrigibles ont tenté de faire croire à l'ingérence de « groupes criminels ou sympathisants d'extrême droite » dans les équipes de bénévoles, comme cette journaliste rapidement douchée : « ce sont les premiers à s'être retroussés les manches et à venir pelleter, je n'ai rien à ajouter. Il faut laisser la politique de côté, il s'agit d'une catastrophe naturelle, j'ai tout perdu, pleure cette jeune mère d'un bébé de 40 jours né par césarienne. J'ai perdu ma maison, alors laissez tomber votre p... de politique parce que personne ne vient à notre aide ». Même en Espagne, cette sauce là ne prend plus.

Pourtant, de politique, il faudra bien parler. Car le pays commence tout juste à faire ses comptes. Dans une déclaration du 6 novembre, le président du parti VOX, Santiago Abascal annonce porter plainte contre les ministres qu'il accuse d'homicide par imprudence, négligence et omission du devoir de secours. Il reproche au gouvernement de s'être «  lavé les mains, dans une fuite du pouvoir absolument criminelle, en refusant l'aide militaire, en rejetant l'aide internationale et en criminalisant l'aide des volontaires » dans des villes où des zones où - encore ce mercredi 6 novembre -  « seule l’aide de bénévoles de toute l’Espagne est arrivée ».

Sabine de Villeroché
Sabine de Villeroché
Journaliste à BV, ancienne avocate au barreau de Paris

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