Affaire du congé pour parents d’enfant décédé : une « erreur » ? Non, une faute !

pénicaud

C’était donc une « erreur ». Une maladresse, en quelque sorte. C’est impeccable, une erreur. Rien de moral, d’éthique, comme on dit aujourd’hui. C’est presque technique. Au Monopoly™, on tire bien la carte « Erreur de la banque en votre faveur ». On empoche la somme, on ne demande pas son reste et on achète un terrain au prochain coup de dé.

Sur cette affaire du congé pour les parents d’enfant décédé, le gouvernement a donc avoué « une erreur qu’il entend rapidement corriger », selon les propos de Mme Pénicaud, ministre du Travail. « Une erreur collective », a-t-elle précisé. La faute à tout le monde, c'est la faute à personne. Il paraît, pourtant, qu'à plusieurs, on est plus intelligent. Elle a sans doute entendu cela dans les séminaires d'entreprises qu'elle a pu fréquenter jadis. La vie politique, la vie tout court, est devenue un jeu de Monopoly™. Le gouvernement a fait une erreur ? Au temps pour nous. On va vous corriger ça vite fait. Vous aurez votre virement dans les plus brefs délais et l’affaire sera classée. La semaine dernière, la majorité et le ministre du Travail s’arc-boutaient sur leur refus d’allonger ce congé au nom de la sacro-sainte défense de l’entreprise, n'ayant pas vu venir le revers du patron des patrons, Geoffroy Roux de Bézieux, qui appela le gouvernement à revoir sa copie ! Et il aura fallu que l’affaire monte jusqu’à l’Élysée puisque, rapporte Le HuffPost, Emmanuel Macron aurait demandé au gouvernement de faire preuve d’« humanité ». De lucidité, voire d'intelligence, ce serait bien aussi.

Le ministre s’étant engagé à « trouver dans les tout prochains jours les solutions » pour que ce congé passe à douze jours, comme l’avait proposé le député centriste Bricout, et la solution passant vraisemblablement par la loi, la majorité risque donc d’être priée poliment de manger son chapeau. Ce qui était « de la générosité à bon prix sur le dos des entreprises », comme le déclarait sérieusement, la semaine dernière, la députée macroniste du Var Sereine Mauborgne, va devenir, par la grâce présidentielle, de l'« humanité ». « Ainsi font, font, font, les petites marionnettes… »

Au fait, puisqu’on parle de prix, combien coûterait, à la louche, une telle mesure si elle était prise en compte par la Sécurité sociale ? 5.000 enfants mineurs ou à charge mourraient chaque année. Mettons que les deux parents travaillent (ce qui n’est pas le cas), cela représenterait donc, au plus, 70.000 journées de travail supplémentaires à indemniser, soit, en gros, 490.000 heures de travail : l’équivalent des heures effectuées, en moyenne, sur une année par - tenez-vous bien - 305 personnes. Imaginons que ces personnes gagnent le salaire moyen brut annuel qui s’élève à 27.000 euros, toujours à la grosse louche ; cette affaire devrait donc coûter autour de 8 millions d’euros. À titre de comparaison, l’ouverture de la PMA pour toutes les femmes, selon un article du Figaro, en juillet 2019, devrait coûter à la collectivité 15 millions d’euros par an. Question de priorité, sans doute. Il est vrai que le déficit de la Sécurité sociale devrait atteindre plus de 5 milliards d’euros, en 2020. Vous me direz qu’il n’y a pas de petites économies. C'est vrai, mais il y a de grandes mesquineries.

Alors, une « erreur » ? Non. Pas un crime non plus. Pire, peut-être, pour reprendre un mot célèbre : une faute.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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