Affaire Kohler : vais-je encore me faire ficher si je vous en parle, comme pour Benalla ?
3 minutes de lecture
Dans la défense catastrophique du Président Macron empêtré dans l'affaire Benalla, les bêtises de Bruno Roger-Petit, les mensonges des uns et des autres, les silences puis les provocations infantiles du Président n'auront finalement été que des apéros d'été pour le plat de résistance : le complotisme, avec cette histoire de comptes Twitter actionnés par des robots – russes, évidemment - pour déstabiliser Emmanuel Macron.
Ce qui n'était qu'une "fake news" et une défense encore plus stupide que les autres avait tout de même été relayée par Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, et Mounir Mahjoubi, Secrétaire d'Etat au numérique. Cela fait quand même désordre chez ces bons apôtres de la traque auxdites "fake news"... Mais voilà que l'ONG belge à l'origine de cette pseudo-étude démontrant cette pseudo-ingérence russe et ce pseudo-complot anti-macronien a voulu redorer sa réputation – elle est, paraît-il, spécialisée dans « l'e-réputation »... Et rien de mieux, pour cela, qu'une bonne opération transparence montrant comment elle en était arrivée à ces conclusions foireuses. D'où une publication de tableaux Excel indiquant des dizaines de milliers de comptes Twitter, avec nombre de tweets sur l'affaire Benalla, mais parfois, aussi, préférence sexuelle (« gay ») , politique (« Rassemblement national », « gaulliste », "France insoumise", etc.). Des fichiers ! Du fichage ! Nouveau tollé, sur Twitter, des personnes concernées. Indignations en cascades de beaucoup d'autres. La CNIL est contrainte d'intervenir. Et le doctorant à l'origine de cette « enquête » présente ses excuses. À l'heure où j'écris ces lignes, le gouvernement n'a pas encore réagi. Nouveau dégât collatéral de cette affaire Benalla...
Parlons donc de l'affaire Kohler car, comme pour l'affaire Benalla, il y a des faits, des dates, des plaintes déposées – par Anticor – et une instruction ouverte par le parquet national financier. Tout cela n'est pas une mayonnaise russe mal tweetée. La presse explique, ces jours-ci, qu'elle pourrait être autrement ravageuse pour le Président Macron que l'affaire Benalla. Le HuffPost : « Pourquoi les accusations contre Alexis Kohler pourraient avoir un impact plus grave que l'affaire Benalla. »
« Plus grave », pourquoi ? Parce qu'il s'agit du numéro 2 de l’Élysée, du « second cerveau » du Président. Parce qu'il s'agit de conflit d'intérêts. Parce qu'il s'agit d'allers-retours d'un haut fonctionnaire entre le service de l'État et une très grande entreprise privée, liée à sa famille. Parce qu'il pourrait y avoir eu mensonge, vu les déclarations de certains membres de conseil d'administration du port du Havre. Mais aussi parce que, alors qu'une première demande de départ d'Alexis Kohler pour la direction financière de MSC Croisières avait été refusée en 2014 par la commission de déontologie de la fonction publique, une seconde demande a été acceptée en 2016 et, selon Marianne, Alexis Kohler aurait pu bénéficier du soutien d'Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, qui se serait alors "porté garant de l'intégrité de l'énarque". Mutatis mutandis, c'est comme pour le port d'armes de Benalla : on le lui refuse, puis Macron arrive aux commandes et hop ! la demande passe...
Je ne sais pas si tout cela, qui est très grave si c'est avéré et qui distille déjà dans l'opinion un soupçon légitime, est plus grave que tout ce qu'a révélé l'affaire Benalla - qui n'a, d'ailleurs, pas produit tous ses effets. Mais ce qui est certain, c'est que chacune de ces deux affaires et leur accumulation jettent sur Emmanuel Macron un très fort discrédit car, à chaque fois, sa responsabilité directe est engagée. Et sa réputation - et pas que son e-réputation - en sortira fortement dégradée.
Il lui faudra trouver un autre contre-feu que cette pitoyable affaire de fichage de ses opposants sur Twitter.
Pour ne rien rater
Les plus lus du jour
LES PLUS LUS DU JOUR
Un vert manteau de mosquées
BVoltaire.fr vous offre la possibilité de réagir à ses articles (excepté les brèves) sur une période de 5 jours. Toutefois, nous vous demandons de respecter certaines règles :