Affaires Rugy : parce que la France est devenue protestante
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Troisième défilé militaire pour la Macronie, en guise de commémoration de la prise de la Bastille : la célébration du début de la fin pour la monarchie. Pour autant, les privilèges se sont-ils jamais usés à l’ère de la gentrification massive ? La presse dite « people » emboîte le pas à Mediapart et au Parisien qui ont, récemment, révélé l’amour pour le luxe du couple Rugy, celui que forme l’actuel ministre de la Transition écologique avec la journaliste people Séverine Servat. Au nom de la transparence pour tous, il faudrait tout savoir sur eux : une énième histoire de l’entre-soi, entre le journalisme et la politique, là où la frontière entre le public et le privé s’annihile en toute discrétion, voire en toute complicité des intéressés (la journaliste de Gala était la compagne de Jérôme Guedj, ex-député socialiste de l’Essonne, avant d’épouser le néo-macronien, en décembre 2017).
L’ancien député Vert de Loire-Atlantique était, pourtant, passé maître dans l’art de se conformer au politiquement correct, tout en distillant des leçons de morale. Mieux encore, François de Rugy a toujours su jouer des coudes pour se placer au bon endroit au bon moment. Alors, de quoi le pouvoir médiatico-judiciaire accuse-t-il l’ancien président de l’Assemblée nationale (de juin 2017 à septembre 2018) ? Des attaques savamment feuilletonnées : dîners coûteux à l’hôtel de Lassay (auxquels des journalistes de renom auraient participé), bénéfice d’un logement à loyer social préférentiel (en 2016, sous le dispositif « Scellier intermédiaire », d’après Mediapart), rénovation de son appartement lorsqu’il était au perchoir, et non-paiement de l’impôt sur le revenu 2015, etc.
C’est devenu traditionnel : le seul moyen de faire tomber un adversaire politique est de dénoncer, à un organe de presse, ses pratiques bourgeoises, voire aristocratiques. Parce que le peuple français n’en est pas encore à crier « Oh, my God ! » en cas de scandale sexuel. Par contre, il suffit de taper au portefeuille, là où le bât blesse pour une population qui cultive un rapport paradoxal avec l’argent. De fait, la réussite des uns fait la jalousie des autres, comme la chute des uns fait l’ascension des autres : telle la série américaine des années 80, Dallas, le marigot médiatico-politique français est un « univers impitoyable ». De façon rituelle, celui qui est pris en flagrant délit d’ivresse avec le faste doit faire amende honorable devant les caméras, avec des trémolos dans la voix, et démissionner de ses « nobles » fonctions.
Jean-Paul Sartre avait parfaitement perçu la protestantisation lancinante de la société française depuis la chute de la monarchie : « La Révolution […] a produit une sorte de protestantisme laïque », avait-il déclaré, dans un entretien publié dans Un théâtre de situations. Un lointain descendant des Lumières qui rejoint, sur ce point, un anti-Lumière comme Joseph de Maistre (« L’aversion de Louis XIV pour le calvinisme était encore un instinct royal », dans Réflexions sur le protestantisme dans ses rapports avec la souveraineté). En définitive, à l’aune de l’adoration des Lumières pour le libéralisme anglo-saxon (Voltaire, Montesquieu, entre autres), la France moderne devait être, dans ses us et coutumes, anglo-américaine : un pays de petits marquis qui ne vivent que de jouissance, à défaut d’avoir de la puissance.
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