Alexis Kohler : le grognard de Macron se fait la malle

Alexis Kohler abandonne le radeau élyséen et rejoint la banque. Recasages à la pelle, dans la Macronie.
Capture écran BFMTV
Capture écran BFMTV

À 52 ans, il est temps de passer à autre chose. Celui à qui l’on tresse une couronne de lauriers, ce « grand serviteur de l’État », comme le décrivent Bruno Le Maire et Gabriel Attal, prend la poudre d’escampette. N’est pas Richelieu qui veut. Alexis Kohler, secrétaire général de l'Élysée depuis huit ans, certainement attiré par une profession plus lucrative après avoir pris son quota d’adrénaline au cœur du pouvoir, s’envole pour la banque. Il doit devenir, en juin, directeur général adjoint de la Société générale. Comique, pour un homme qui laisse un pays lesté d'une dette publique de 3.228,4 milliards d'euros, soit 1/000 milliards de plus qu’à son arrivée, en 2017.

Un acteur incontournable de la Macronie

Alexis Kohler était un proche du chef de l’État ; très proche, au point d’être, avec Brigitte Macron, le conseiller le plus précieux du président de la République. Il est de tous les coups. Ami d’Édouard Philippe depuis Sciences Po Paris, c’est lui qui œuvre à sa nomination à Matignon. Impliqué dans l’affaire Benalla - cet ancien chargé de mission à l'Élysée, filmé en train de frapper des manifestants -, il lui est reproché d’avoir caché une partie de la vérité. Son audition musclée au Sénat, à l’époque, lui avait laissé un mauvais souvenir. Il faut dire que les conseillers de l’ombre se brûlent, au soleil. À tel point que le mois dernier, il refusait de se rendre à la convocation de la commission d’enquête parlementaire sur le dérapage des comptes publics dirigée par le député LFI Éric Coquerel. En toute impunité. Au même titre que, d’après nos confrères du Figaro, il aurait refusé un poste à la tête d’une grande entreprise publique pour éviter d’avoir à rendre des comptes. Deux affaires suffisent. Mis en examen pour prise illégale d’intérêts pour avoir participé, comme haut fonctionnaire, à des décisions relatives à l’armateur MSC, il est également visé par une enquête du parquet national financier pour des soupçons de « trafic d'influence » autour de la fusion Veolia-Suez.

L’homme a sa part de responsabilité dans tous les fiascos qui ont ponctué l’ère Macron, de la crise des gilets jaunes à la gestion du Covid-19 en passant par la dissolution de juin 2024. En somme, nous lui devons l’inertie et l’aggravation de la situation du pays sur tous les plans : migratoire, économique et sociétal.

Les copains d'abord

Celui qui fut aussi directeur de cabinet d’Emmanuel Macron, à Bercy, suit la route de ses petits camarades qui étaient à l’initiative de l’ascension fulgurante de leur poulain jusqu’à la présidence de la République. Pantouflage, reconversion, recyclage : appelez ça comme vous voulez. Il y a ceux qui, comme Richard Ferrand au Conseil constitutionnel ou Clément Beaune au Haut-commissariat au Plan, ont trouvé une place au chaud dans les planques de la République. Ceux qui sont recasés à l’Europe, comme Nathalie Loiseau, eurodéputée, ou Stéphane Séjourné, commissaire européen. Puis ceux qui virent de bord, cap sur le privé. Sibeth Ndiaye, ancienne porte-parole du gouvernement, travaille désormais chez Adecco comme secrétaire générale. L’ancien ministre du Logement Julien Denormandie travaille chez Sweep, une entreprise écolo, tout en étant conseiller dans la finance chez RAISE.

Christophe Castaner, l’ancien ministre de l’Intérieur, est en poste chez le géant chinois de la nippe à la mode Shein. L’ancienne secrétaire d’État Brune Poirson a, quant à elle, trouvé refuge chez Accor. La carte de visite macroniste, symbole de réseaux touffus dans les sphères du pouvoir, ouvre des portes.

Si, comme les observateurs le disent, le duo Macron-Kohler a gouverné la France, alors la responsabilité de l’un et l’autre est engagée. Ce recyclage d’un des plus hauts fonctionnaires de l’État dans le monde de la banque laisse un goût amer aux Français. Le sentiment de voir un enfant bouder, désormais, le jouet qu’il a cassé.

 

Picture of Yves-Marie Sévillia
Yves-Marie Sévillia
Journaliste chez Boulevard Voltaire

Vos commentaires

102 commentaires

  1. Fuyez la banque dans la quelle il va travailler. Poison pour la France, pourquoi changerait il de nature?

  2. Je suis cliente de la société générale. Personne n’est parfait. Je vais réfléchir, rester où quitter cette banque ? Avec un tel personnage la méfiance est de mise.

  3. Il part piteusement, mais sans aucune honte, à l’instar de tous les proches de macron recasés dans des fonctions les mettant à l’abri de poursuites. Ces ex-ministres et gouvernants, battus aux élections, ou en délicatesse avec la justice, se retrouvent pourvus grandement de postes prestigieux. Ce macron aura été la plus grande honte de notre pays. La France a honte de lui, le monde entier nous regarde avec commisération, et il a raison. A quand un sursaut ? Ne comptons pas sur Bayrou, si habile à dissimuler et à jouer le ravi de la crêche qu’il endort même ses pires ennemis.

  4. Le « personnage » est politiquement très « exposé » et endosse la « très grande popularité » de son patron. Pas sûr que ce soit un bon recrutement pour la Société Générale. Tout ça est très « spéculatif » et pourrait rappeler …… de bien mauvais souvenirs. Les risques que prend la banque sont « significatifs ». Et pas seulement en terme d’image.

    • Je ne sais si la SG court des risques mais tout ce que je sais c’est que sa direction générale et l’Elysée ont toujours depuis 7 ans été en plus que très bons termes, souvenez-vous de la ministre Amélie Oudéa-Castera épouse à la ville de Frédéric Oudéa, directeur général de la Société Générale de 2008 à 2023, aujourd’hui à la tête de Sanofi, tiens-donc !

      • Exact, Amélie Oudéa-Castera est aussi de la même promo de l’ENA que Macron et c’est une cousine Duhamel … etc. Mais je pense qu’avec Alexis K. on va très au delà de la connivence et de l’entre-soi. Avec une multiplication de de conflits d’intérêts potentiels et des liens avec des affaires « napolitaines ». AK (47?) c’est l’âme damnée de Macron, l’homme de tous les coups depuis Bercy 2014 et la campagne sulfureuse de 2017. Cette campagne au cours de la quelle Macron a récolté des fonds de riches oligarques algériens (avec Benalla à ses cotés) des dons de ceux qui par ailleurs furent récompensés par GE dans l’affaire ALSTOM (dossier supervisé par AK) l’appui de Mc Kinsey et les pages de couverture en veux tu en voilà de tous les magazines français. AK reste mis en examen pour « prise illégale d’intérêts » et placé sous le statut de témoin assisté pour « trafic d’influence » dans l’affaire STX, reste visé par une enquête du Parquet national financier pour des soupçons de « trafic d’influence » autour de la fusion Veolia-Suez, et le procureur est saisi à la suite d’un nouveau refus de la part d’Alexis Kohler de se faire auditionner par une commission d’enquête sur les déficits publics de l’Assemblée nationale. Tout ça fait beaucoup. Les clients, le personnel, les partenaires, les actionnaires de la SG apprécieront.

  5. Un joli coco. Bien dans la ligne. Qui va, n’en doutons pas, faire des étincelles dans « sa » banque… Je garde précieusement cet article à l’intention des « innocents ». Ceux qui sont toujours tondus mais bêlent d’aise car on leur a laissé les oreilles. Comme il est loin le temps de la Révolution où les privilégiés ont voté l’abolition des privilèges. Je veux bien que cela n’a été qu’un moment mais cela a eu lieu…

  6. Les français ont réélu en toute connaissance de cause ce bonimenteur de haut vol et confirmé la turpitude qu’à été le Front Républicain. Grand bien, mais surtout grand mal leur fasse. Il pourront aller ramper auprès de ces seïdes du macronisme pour quémander pitances.

  7. Il part assez tôt car il ne faut pas trop attendre car il risque de ne plus rester de place pour se mettre « au chaud » !!

  8. Le départ d’Alexis Kohler, après celui de bien d’autres « proches » d’Emmanuel Macron, ressemble un peu à celui des rats qui quittent le navire animés d’une intuition salvatrice… Que penser en effet de ces départs ? L’avenir nous le dira !

  9. Macron va dissoudre le parquet national financier ..sinon il y aura une sacré brochette de gens inquiètes..kholer,bayrou,Macron,Philippe etc etc..ou alors ils seront relaxes par les juges gauchistes  » c’est la famille »!

    • N’en doutez pas. « Selon que vous serez puissants ou misérables » (en l’occurrence dangereux pour le pouvoir en place)…

  10. Il faut tout de même souligner qu’il part pour de nouveaux horizons sans avoir répondu à la commission d’enquête parlementaire. Son nouvel employeur devrait réfléchir un peu avant d’ouvrir la porte de la bergerie. Le loup n’est pas dangereux seul, c’est en meute qu’il le devient. En clair, si toute la macronie s’éparpille dans les entreprises, il y aura de la faillite dans l’air.

  11. Étrange! Macron peut tout se permettre! La classe politique dans son entièreté le laisse faire sans s’en indigner, y compris le RN et LFI. Comment le conseil constitutionnel peut-il cautionner tous ces dérapages macronistes ?

    • Ils ont tous un fil à la patte..mlp espère être  » sauvee » par ferrand qu’elle n’a pas censure….et dont c’est l’intérêt pour qu’elle soit battue par un médiocre macroniste ( pleonasme)..quant à lfi c’est la famille!

  12. Après le « succès » aux élections c’est la débandade chez les macronistes, ils sentent qu’on va boire le champagne

  13. Deux réflexions
    – son nouveau poste est-il compatible avec ses nouvelles fonctions ?
    – ça sent les élections présidentielles anticipée (avenir de MLP ?, nombreuses « délégations de signatures » au J.O, …)

  14. Le Sherpa quitte la cordée laissant derrière lui 1000 milliards d’Euros de dette pour les contribuables, bien sur il n’est pas seul responsable de ce fiasco financier mais il n’en est pas moins l’un des piliers de l’équipe qui a réussi cet exploit.

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L’extrême gauche est une gangrène qui tient les universités françaises
Gabrielle Cluzel sur CNews
Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois