Algérie : Jean Castex n’est pas un béni-oui-oui ? Qu’il le montre !
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On nous le dit, à gauche, on nous le répète à l’envi. Notre nouveau Premier ministre est un « homme bien ». Pas une belle personne, comme on dit maintenant, car Jean Castex est un politique à l’ancienne - en costume sombre, doté d’une calvitie de bon aloi et d’un accent du terroir fleurant bon la France de Charles Pasqua et Lino Ventura. Marié (durablement) et père de famille nombreuse - il a 4 filles. Ce n’est pas lui que l’on verra sur les tribunes du 14 Juillet avec un tee-shirt « Tous les garçons et les filles », ni courir le guilledou en boîte de nuit alors que la France en gilet jaune bat le pavé. Il a, du reste, réservé sa première sortie officielle à la police de Seine-Saint-Denis pour lui exprimer ce qui ressemble à un soutien. Un Premier ministre exprimant sa solidarité aux forces de l’ordre, ce n’est certes pas non plus l’exploit du siècle, mais de nos jours, on en chanterait presqu’un Te Deum…
Jean Castex serait à Édouard Philippe ce que Castor est à Pollux. En plus rustique. Le genre agricole, comme dirait Audiard. En plus falot, aussi. Un défaut dans lequel Emmanuel Macron aurait vu un immense atout. Si l’on en croit un article récent du Monde, cependant, le monsieur est capable aussi de faire son tonton flingueur. Quand il gérait le déconfinement, n’a-t-il pas dit, excédé, de Philippe de Villiers, « Je ne prendrai jamais ce c… au téléphone » ? Il est vrai que taper de ce côté-là de l’échiquier politique ne demande pas un courage mirifique. Comme preuve d'indépendance d'esprit, il faudra repasser.
Mais une occasion en or s’offre à lui de montrer qu’il n’est pas venu pour beurrer les sandwichs : le président algérien Abdelmadjid Tebboune a dit, samedi, attendre des « excuses de la France pour la colonisation de l’Algérie ». Emmanuel Macron est ficelé, réduit au silence. Quand on a dit, pendant sa campagne, pour ratisser du côté de la diversité, que la colonisation était un crime contre l’humanité, forcément, il ne reste rien d’autre à faire que se taire ou s’exécuter. Mais son Premier ministre, lui, pourrait montrer sa fermeté : « Je suis fidèle à la France », a-t-il joliment dit pour justifier ses retournement de veste. Si la France est son trésor, c’est le moment de le prouver ; touchez pas au Grisbi !
Oh, bien sûr, inutile de faire une déclaration officielle urbi et orbi. Il ne s’agit pas, non plus, de rendre le soufflet du dey d’Alger. La fin d’un petit entretien matutinal radiophonique avec une Ruth Elkrief ou un Jean-Jacques Bourdin y suffira, une fois que le remaniement aura été largement commenté et que l’on voudra réveiller l’auditeur assoupi le nez dans son café, écoutant égrener la liste sans fin des obscurs maroquins.
L’Algérie attend des excuses ? La France aussi, pardi.
Pour les razzias barbaresques en Méditerranée ayant réduit en esclavage des centaines de milliers d’Européens. Ce sont même elles qui ont conduit Charles X à lancer l’expédition d’Alger. Pour les pieds-noirs assassinés ou chassés. Pour la tombe de leurs aïeuls profanée. Pour les biens dont ils ont été spoliés et qui ont été tous dilapidés : lorsque la France est partie, Alger ressemblait à Nice. C’est aujourd’hui Bagdad, à peu de choses près.
Pour la mauvaise foi d'un État failli qui, depuis 60 ans, use de la colonisation comme d’un épouvantail fatigué, d'une vieille ficelle archi-usée pour excuser son impéritie, et pour cette impéritie qui conduit ses ressortissants à traverser en masse la Méditerranée, notamment pour se faire soigner - comme le montre la vague de malades du coronavirus qui vient de débarquer…
Maintenant, ça suffit l'Algérie. La plaisanterie a assez duré. Le cave se rebiffe : les Français seraient si fiers, enfin, après des années de lâcheté ! Mais il est à craindre que ce ne soit là que cinéma.
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