Angleterre : un passe qui ne passe plus !

boris johnson10 downing street

Il n’y a pas qu’en France que la question du passeport vaccinal pour accéder aux endroits fréquentés agite les esprits. À preuve le double axel, tout en souplesse, que Boris Johnson vient d’effectuer au Royaume-Uni, abandonnant le projet de passe censé limiter la pandémie à l’approche de la période hivernale. Explication officielle de Sajid Javid, ministre de la Santé : la mesure est superflue en raison du succès de la campagne de vaccination contre le Covid-19.

En réalité, c’est la confortable majorité de 82 sièges de BoJo aux Communes qui risquait de se fragiliser devant la poussée de ses « frondeurs » anti-passe. Mais là-bas, contrairement à ceux de qui déposèrent contre François Hollande une motion de censure « de gauche » contre sa loi Travail, c’est la cinquantaine de libertariens de son propre parti qui grognent. Difficile d’imaginer, chez nous, autant de députés considérant que, dans la plupart des domaines, l’État est plus le problème que la solution !

Certains de ceux-ci ont même menacé de déchirer leur carte s’ils avaient dû montrer leur statut vaccinal, lors d’une invitation au 10 Downing Street, la semaine dernière. « Les ministres sont influencés par des experts très persuasifs, et c’est pour cela que j’ai travaillé sur ce qui provoque leurs erreurs […] Les Conservateurs doivent arrêter de faire des choses qu’ils détestent comme les passeports vaccinaux ou l’augmentation des taxes », a ainsi fulminé le chef de file de ces libertariens.

Le Premier (et jeune marié) ministre de Sa Majesté s’est, en effet, tiré une deuxième balle dans le pied propre à mécontenter l’aile droite du parti, un projet de réforme de la protection sociale essentiellement axé sur la prise en charge des personnes âgées, avec hausse des cotisations.

Alors que son manifeste de campagne de 2019 indiquait de façon explicite que les Conservateurs n’augmenteraient pas « les taux de l’impôt sur le revenu, de la TVA ou de l’assurance sociale ». Banal et même habituel en France, un tel reniement passe plus mal de l’autre côté de la Manche, comme l’exprime un député Tory : « Je ne pense pas qu’il soit conservateur d’adopter une approche socialiste en matière de protection sociale et de son financement alors qu’il existe des alternatives. » Et pour l’ancien ministre des Finances de Theresa May, opposé à cette réforme tout comme l’ancien Premier ministre John Major, « une augmentation des cotisations sociales impose aux jeunes personnes qui travaillent, et dont certains n’hériteront jamais de propriétés, de soutenir des personnes âgées qui ont cumulé des richesses tout au long de leur vie ».

Bref, après avoir géré avec un incontestable talent les affaires extérieures - au premier plan desquelles le Brexit -, Boris Johnson doit aujourd’hui s’atteler à faire de même en politique intérieure, mais avec une majorité qui n’est pas composée d’un troupeau de lemmings suivant un joueur de flûte. Ça fait rêver, non ?

 

Richard Hanlet
Richard Hanlet
Médecin en retraite, expert honoraire près la Cour d'appel de Versailles

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