[ANIMAUX] Ils donnent des leçons ! Le passé très très trouble de l’antispécisme

© Wikipedia
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Nous signalions, il y a quinze jours, la position du Parti animaliste (PA) avant les législatives : aucune consigne de vote, à chacun de se faire une opinion à partir des notations du site politique-animaux.fr. Une position non dénuée d’hypocrisie puisque, selon les notations attribuées aux personnalités et aux partis, le vote Nouveau Front populaire (NFP) allait de soi pour les électeurs animalistes.

Mais, tout de même, avec cette absence de consigne explicite, le PA ne favorisait-il pas « l’extrême droite » ? Sous pression, il a dû préciser qu’il « porte intrinsèquement des valeurs fondamentales de démocratie et des exigences républicaines, combattant toutes les formes de domination et de discrimination, notamment le racisme, l’antisémitisme et le sexisme ». Dans la langue commune, cela veut dire que le PA combat le RN. Mais racisme, antisémitisme et sexisme, ces mots pourraient s’appliquer, sans malice, à quelques candidats NFP tout autant.

Un programme du RN sans animaux ?

Nombreuses sont les associations qui ont appelé à voter NFP avant le premier tour, comme les Antispécistes contre l'extrême droite, qui refusent de se laisser « berner par les séances photos de madame Le Pen entourée de ses chats ». Nombreuses, ensuite, celles qui réclament maintenant le barrage. Lors d’une soirée organisée par le site d'information écologiste en ligne Reporterre, Tiphaine Lagarde, cofondatrice du collectif 269 Libération animale, a clairement déclaré : « Nous ne voulons pas que le RN parle de la question animale, nous voulons qu’il disparaisse. »

Que le RN disparaisse est douteux, mais qu’il ne parle pas de la question animale, c’est fait. Le programme législatif de Jordan Bardella n’aborde pas la question, alors que la protection animale était l’un des quinze thèmes du programme de la présidentielle 2022 de Marine Le Pen. Interrogé sur cette absence de la question animale dans son programme, le RN n'a pas donné suite à nos questions. Cela donnerait-il raison à la tribune des antispécistes? « Nous savons aussi [...] que l’extrême droite est depuis toujours une ennemie naturelle et acharnée des groupes infériorisés, animaux compris, et que dans un pays fasciste, notre puissance d’agir pour eux a toutes les chances d’être réduite à néant. »

Condition animale: la convergence des luttes ?

Puisque l’extrême gauche revient sans cesse à la comparaison du RN avec le fascisme et le nazisme, ne nous privons pas de leur appliquer la même méthode. À ce titre, l’excellente étude « Le travail sur la frontière entre les humains et les animaux dans l'Allemagne nazie » (Politix, 2003), signée par deux sociologues américains, est instructive. Dans le domaine du bien-être animal, la législation nazie mit fin à l’abattage rituel - ce que demande L214. Elle interdit partiellement la vivisection - autre lutte de L214. Une loi de 1936 se pencha sur le sort des homards dans les restaurants - un cheval de bataille de L214.

La maltraitance animale devint passible de prison - comme en France. Les nazis œuvrèrent pour la protection des espèces en voie de disparition et la réintroduction d’espèces, la création de réserves naturelles : là encore, des préoccupations bien « écolo-animalistes ». Beaucoup de dignitaires nazis furent anti-chasse et végétariens. S’ils vivaient aujourd’hui, ne seraient-ils pas vegan ? « Le fait que les animaux soient protégés pour eux-mêmes plutôt que pour leurs relations avec l’humanité était juridiquement inédit », notent les auteurs de l’article. C'est aussi une revendication antispéciste.

Bien des propositions de protection des animaux sont recevables en dehors des clivages politiques, mais elles peuvent être motivées par des idéologies très différentes, voire antagonistes. La politique animaliste nazie a été guidée par le rejet de la vision chrétienne de la nature qui place l’homme à son sommet et qui l'en rend responsable. Pour les nazis, l’homme est un animal comme un autre. Il n’a aucune raison de se sentir supérieur à quelque bête que ce soit. On reconnaît là la doctrine même de l’antispécisme. La filiation est pour le moins troublante. Aussi, avant de donner des leçons à une « extrême droite » fantasmée, les antispécistes feraient-ils bien de balayer devant leur porte.

Samuel Martin
Samuel Martin
Journaliste

Vos commentaires

21 commentaires

  1. En réponse à certains commentaires où j’ai lu que les associations de défense animale ne se battraient pas contre l’abattage halal, j’apporte mon grain de sel. Détrompez-vous, L214 a fait des reportages, clandestins, dans des abattoirs, pour montrer l’horreur de l’égorgement, la longue agonie des animaux. Mais, comme tout dépend de l’Etat, qui ne veut pas « froisser » les musulmans ni les juifs, c’est le combat du pot de terre contre le pot de fer !

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