[ANIMAUX] Namibie : les parcs nationaux sont-ils des réserves… à viande ?

Capture d’écran © Centrale du film animalier « Namibie magique »
Capture d’écran © Centrale du film animalier « Namibie magique »

Le ministère de l’Environnement, de la Foresterie et du Tourisme namibien vient d’annoncer qu’il fournirait « 723 animaux » pour lutter contre la famine. Non des poules, ni des moutons, ni des vaches, mais « 30 hippopotames, 60 buffles, 50 impalas, 100 gnous, 300 zèbres, 83 éléphants et 100 élans du Cap ». Un menu qui fait bondir les associations de défense des animaux.

La sécheresse qui sévit dans le pays le plus sec de l’Afrique australe fait craindre que la moitié de sa maigre population ne souffre de la faim d’ici à quelques mois. D’où la décision gouvernementale de prendre la viande où elle se trouve, à savoir dans les grands parcs nationaux. L’abattage a commencé. 157 animaux de différentes espèces ont déjà été tués, « livrant 56.875 kilogrammes de viande ».

PETA fait la leçon au gouvernement namibien

La célèbre association PETA s’indigne de cette boucherie. Jason Baker, vice-président de PETA Asie, a écrit au Premier ministre namibien pour protester. Selon lui, l’abattage risque de déséquilibrer les écosystèmes et ce ne sont pas quelques tonnes de viande qui régleront le problème de la famine. De plus, il invite la Namibie à faire pression sur les pays carnivores (il cite l'Australie et les États-Unis) pour qu’ils deviennent vegan. D’où diminution des gaz à effet de serre liés à l’élevage, donc ralentissement du réchauffement climatique, d'où retour de la pluie en Namibie… Et voilà pourquoi votre fille est muette !

Son argument sur les zoonoses est plus sérieux : « Le Covid-19, le SRAS, le VIH, Ebola et d’autres ont montré au monde les dangers des massacres et de la consommation des animaux sauvages. » Mais, là encore, c’est une réflexion de vegan qui a sous la main toutes les alternatives protéinées. Interrogé par BV sur cette question des zoonoses, le ministère de l'Environnement de Namibie ne nous a pas répondu. Mais pour le ministère, ce prélèvement d'animaux sauvages est justifié, comme il l'expliquait dans son communiqué : il est même « nécessaire et conforme à notre mandat constitutionnel selon lequel nos ressources naturelles sont utilisées au profit des citoyens namibiens ».

Le ministère voit dans ces prélèvements, non une contradiction avec l’existence de parcs nationaux protégés, mais une justification de leur existence. En préservant les espèces et en les gérant, on peut se permettre d’y prélever des individus en cas de force majeure. Une position défendue par Rose Mwebaza, directrice du Bureau Afrique du Programme des Nations unies : « L’exploitation durable et bien gérée de populations d’animaux sauvages en bonne santé peut constituer une source précieuse de nourriture pour les collectivités. » Mais contestée par PETA France, que BV a contactée. Pour Anissa Putois, responsable de la communication, le terme « prélèvement » n’est pas acceptable car il « vise simplement à adoucir la réalité du massacre subi par des êtres vivants ».

Du steak d'éléphant dans la sportule

« Les autorités namibiennes ont la responsabilité de protéger les animaux sauvages de leur pays, pas de les tuer tout en s'en servant comme outil politique », nous dit encore Anissa Putois. En effet, parti au pouvoir depuis 1990, la SWAPO (membre de l’Internationale socialiste) est suspectée de distribuer toute cette viande pour amadouer les électeurs en vue des présidentielles et législatives de novembre prochain.

Pendant le siège de Paris, en 1870-1871, les Parisiens mangèrent les animaux du Jardin des Plantes et du Jardin zoologique. Trois éléphants, des ours, des zèbres, des chameaux… passèrent à la casserole. Des dégâts très limités, en comparaison du massacre - qu’on le prenne au sens strict ou cynégétique - prévu en Namibie, lequel reviendra à tuer 0,34 % des éléphants du pays (qu’on estime à 24.000). De cette affaire évidemment déplaisante, on retient surtout le clivage entre une attitude occidentale moralisatrice, aussi portée à l'ingérence que dégagée des contingences, et la réponse africaine à un problème concret : la famine.

Samuel Martin
Samuel Martin
Journaliste

Vos commentaires

23 commentaires

  1. Et pourquoi , faut vivre non.Les vrais coupables sont ceux qui n’ont pas su ou pas voulu maîtriser une démographie galopante .Tout le reste n’est qu’affabulation accusatoire envers l’homme blanc .

  2. Si cette famine provient de la sécheresse, il est probable que les animaux sauvages rencontrent eux aussi des difficultés pour se nourrir, et que certains en meurent. Je déteste ça, mais alors peut-être qu’en sacrifier utilement quelques uns peut paraître moins cruel.

  3. Ces animaux sont déjà les victimes des braconniers ! Les éléphants sont une espèce désormais menacée, comme tant d’autres, en raison de l’irresponsabilité humaine illimitée.

    • PETA est une association internationale de défense des animaux. Des bénévoles et des professionnels (vétérinaires) apportent leur aide aux animaux victimes des guerres, des maltraitances, bref de tout ce dont peuvent souffrir les animaux de la part des humains, que ce soit volontaire ou non.

  4. Des centaines de milliers d’animaux sont abattus chaque jour pour satisfaire à notre alimentation ; je ne vois donc rien de scandaleux dans le fait d’abattre quelques éléphants et hippopotames dès lors que le renouvellement de l’espèce est assuré. PETA et ces organisations me semblent beaucoup plus préoccupées du sort des animaux que de celui des humains.

  5. « Quand le dernier arbre aura été abattu ; quand la dernière rivière aura été empoisonnée ; quand le dernier poisson aura été péché.. Alors l’Homme saura que l’argent ne se mange pas. » Sitting Bul.

  6. Mais pas de problèmes pour l’UE qui préfère financer la guerre en Ukraine ou un Monsieur Elon Musk qui lui aussi préfère délapider quelques milliards pour visiter l’espace ou Mars avec une pollution de l’extrême alors que le famine en 2024 ne devrait plus exister. Une honte pour l’humanité.

    • Mais la famine n’existe plus depuis longtemps, même en Chine, sauf dans deux cas : les pays en guerre et les pays mal gérés. Ce n’est pas une question de ressources, mais de bonne gouvernance.

  7. Achetez le livre « HOMO CHAOTICUS » de Didier Raoult, sorti hier, il explique l’origine de certaines maladies causées par une alimentation inappropriée comme la maladie de la vache folle et les troubles psychiatriques dûs au cannibalisme etc…Très intéressant.

  8. C’est curieux, personne ne monte au créneau devant le massacre des chevreuils, cerfs sangliers au prétexte qu’ils abîment les récoltes.
    Il suffit pourtant de mettre des barbelés autour des champs, comme on le voit dans les environs de Rambouillet, et des gaines protège-troncs d’arbres , comme nous le faisons dans notre verger.

  9. Au lieu de critiquer, pourquoi les affiliés de PETA ne se cotisent pas pour envoyer des denrées alimentaires, de la viande bovine, ovine et autres à un peuple qui crève de faim ? Facile de palabrer calé sur un fauteuil confortable.

  10. ça peut paraitre scandaleux lorsque dans un pays on jette des tonnes de viande non consommée, mais arrêtons de regarder ça avec des yeux d’occidentaux. Quand on crève de faim comment s’en sortir, justement c’est peut-être aux occidentaux d’intervenir en venant en aide à ce pays pour éviter qu’un patrimoine naturelle disparaisse. On attend la décision des écolos

  11. Quand l’être humain pléthorique aura éradiqué tous les animaux de la terre il crèvera dans son monde de plastique et d’ordinateurs…

  12. Je n’arrive pas à croire cette nouvelle…
    En 2024, oser assassiner ces animaux en voie de disparition qui devaient être protégés par les hommes,c’est indigne.
    On arrive généralement de nos jours à venir en aide aux populations touchées par la famine,je ne comprends pas …
    Les hommes ont hélas encore des progrès à faire pour la protection des animaux sauvages …

    • Et les namibiens ne sont pas capable d’élever des volailles, et des cheptels (moutons, bovins,…) pour leur subsistance ?

    • Les autorités namibienne ont certainement évalué le nombre à abattre pour préserver leur espèce et leur revenu touristique. Personnellement je suis outrée par le manque de compassion pour les gosses qui meurent de faim. Aujourd’hui ils en meurent en Afrique, dans les pays sous sanctions américaines, dans les pays en guerre (20 conflits en cours) et en Asie et vous croyez qu’on leur vient en aide ?

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois