[ANIMAUX] Ne dites plus « espèces invasives », ça renforce « le rejet migratoire »

Mieux vaut parler de migrations, lesquelles sont, comme chacun sait, aussi inévitables que bénéfiques !
Par Gzen92 — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=53279725
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Connaissez-vous les EEE ? Les espèces exotiques envahissantes sont ces plantes ou ces animaux dits aussi « invasifs » qui, venus d’ailleurs, perturbent un écosystème donné. « Les impacts écologiques des espèces exotiques envahissantes sont parfois difficiles à quantifier, mais sont souvent irréversibles », explique le site officiel naturefrance.fr. Cependant, selon une tribune de Philosophie Magazine, parler d’« espèces invasives »… c’est limite raciste.

En assimilant des migrations écologiques à des maux, on « alimente insidieusement la crainte d’une "submersion migratoire" », y écrivent Jacques Tassin (chercheur en écologie végétale) et Gilles Clément (ingénieur agronome). C’est un « rejet de l’altérité », « une forme "d’immigration zéro" ». Cela renvoie « aux listes noires des indésirables » et nourrit « un grand rejet migratoire ». Tout le lexique immigrationniste et antiraciste est mobilisé. Il n’y suffit même pas, un néologisme est nécessaire : il y aurait un lien « entre xénophobie et bioxénophobie ».

La thèse invaso-sceptique face à la réalité

Jacques Tassin est - qu’on nous permette, à nous aussi, un néologisme - un invaso-sceptique. Il ne croit pas aux invasions. Migrations, oui. Invasions, non. En 2014, il publiait La Grande Invasion. Qui a peur des espèces invasives ? (Odile Jacob). L’invaso-scepticisme existe aussi, en Histoire. En 2016, une exposition de la Cité des sciences et de l'industrie expliquait qu’« il n'y a pas eu d’invasions barbares ni de conquêtes violentes et rapides au Moyen Âge mais de grands mouvements migratoires lents et progressifs ». Le mot « invasion » renvoie à des réalités désagréables, surtout quand il concerne les terres européennes. Celui de « migration » sonne tellement mieux.

« Dans l’immense majorité des cas, les effets de ces populations considérées comme intruses demeurent globalement positifs », écrivent encore les auteurs de la tribune. Les nuisances des espèces envahissantes sont pourtant une réalité décrite par les scientifiques, admise par l’État, dénoncée par les associations environnementales. Pour France Nature Environnement (FNE), les espèces envahissantes peuvent « parfois menacer la faune et la flore sauvages autochtones ». Pour le CNRS, elles sont « une catastrophe écologique et économique ». Le crabe chinois, l’écrevisse américaine, la tortue de Floride, l’ouette d’Égypte, l’écureuil de Corée - si mignons et sympathiques soient-ils - sont autant de dangers pour les écosystèmes européens, selon l’Union européenne. FNE, CNRS, UE doivent-ils être considérés comme « bioxénophobes » - donc xénophobes ?

Fables et sciences

Les comparaisons de la société humaine avec le monde animal sont vieilles comme le monde. Elles font merveille, dans les fables. En sciences sociales, le décalque est risqué. « Et si les animaux gouvernaient mieux que nous ? », s’interrogeaient nos confrères de Slate, dans un article sur la « Démocratie à poils et à plumes ». Le lion, qui chasse seul, n’attrape que trois proies sur dix. Alors que les lycaons, qui « votent » en éternuant pour ou contre la stratégie à adopter, attrapent sept proies sur dix. Slate s’extasie : de la sorte, les lycaons « accèdent facilement au top 3 des meilleurs prédateurs ». En voulant faire l’éloge de la démocratie, Slate a fait celui de la prédation : curieuse démonstration.

Jacques Tassin et Gilles Clément sont conscients de la difficulté. « Si les parallèles entre populations humaines et non humaines […] demeurent hasardeux, écrivent-ils, du moins peut-on les interroger lorsqu’ils bénéficient d’une sémantique aussi commune. » Or, on passe aisément des espèces envahissantes au Grand Remplacement, nos deux invaso-sceptiques le savent, eux qui se gardent bien de prononcer le mot. Il suffit de lire le site ecolo.gouv.fr : « L’espèce [invasive] colonise ce territoire et s’étend, au détriment d’espèces locales qu’elle va supplanter voire totalement éradiquer. » Seule manière d’échapper à ce parallélisme possible ? Nier l’existence d’espèces envahissantes. CQFD. La démonstration est idéologique. Pour la science, on repassera.

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Samuel Martin
Journaliste

Vos commentaires

26 commentaires

  1. Les Historiens sérieux, espèce qui a totalement disparue depuis que les communistes de l’Ecole des Annales ont supprimé l’Histoire Bataille et la chronologie pour la remplacer par une Histoire « thématique » du genre La Culture du Poireau dans le Bas Poitou durant le Haut Moyen-Age, j’exagère à peine ;-) pourraient confirmer que les « espèces invasives » sont la règle à travers les âges. Il y eu, par exemple, les Huns et les autres, les Goths, les Wisigoths, les Ostrogoths, les Escargoths et les Saligoths. Et je ne parle même pas des Doryphores qui ravagèrent la culture de la pomme de terre en France entre 1940 et 1945.
    Que ces agronomes restent dans leur domaine et arrêtent de raconter des billevesées.

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