[ANIMAUX] Polémique : l’éternel retour du loup dans nos campagnes

© Retron — Travail personnel, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=2722516
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« Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup », avait coutume de dire Martine Aubry. Le loup en sait quelque chose. Longtemps absent de nos campagnes, il y revient en force. Pas pour dévorer le Petit Chaperon rouge, mais pour se repaître de nos moutons, de nos chèvres, et pas seulement celle de monsieur Seguin, tel que l’écrivait jadis l’irremplaçable Alphonse Daudet. Du coup, le loup est aujourd’hui dans un entre-deux juridique des plus flous.

Du point de vue de la Commission européenne, arbitre de ces lois primant sur les législations nationales, le loup n’aurait plus tout à fait la cote. En effet, tel qu’ici rappelé en septembre 2023, il y eut « l’étonnant revirement d’Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne : "En septembre 2022, un loup s’est introduit dans un enclos de la propriété de sa famille, dans le nord de l’Allemagne, et a tué son vieux poney, Dolly" ». À quoi ça tient, la vie, que ce soit celle des poneys comme des loups ?

Signalements dans le Poitou et le Haut-Doubs

À peine plus sérieusement, il y a la chronique des faits divers, effectivement moins favorable aux loups qu’aux poneys. « Dans la Vienne comme dans les Deux-Sèvres, entre 2021 et 2024, la présence du prédateur en dispersion a provoqué l’activation des cellules départementales de veille du loup et, conformément au Plan national loup, l’instauration des niveaux de zonage des préfectures "permettant une gradation dans l’accompagnement des éleveurs pour la protection des troupeaux" », nous dit La Nouvelle République de ce 18 septembre. Le même jour, L’Est républicain nous apprend que « la carcasse d’une génisse de neuf mois, victime d’une attaque de loup, a été découverte lundi matin par un cueilleur de champignons dans le massif du mont de l’Herba ».

Si l’on résume, le « vivre ensemble » lupino-humain ne se porterait pas au mieux, entre sectateurs de la cause animale et ceux pour lesquels le même loup n’en finit plus de dévorer leurs troupeaux. Pour les uns, c’est une vue de l’esprit, et un fléau pour les autres, ceux qui n’ont que leurs ovins pour seul gagne-pain. Bref, comment résoudre l’insoluble équation ? Il y a an, Mélanie Brunet, présidente du Cercle 12, association membre du collectif Pâturage et Biodiversité, en revenait à ces quelques vérités premières : au-delà des légendes, il y a les chiffres. En France, les loups seraient plutôt 1.100 que 906, chiffre naguère officiel mais, depuis, revu à la hausse. Et leurs victimes ? 12.500 pour la seule année 2022, « principalement des brebis, des chèvres, des veaux, des poulains et même des animaux domestiques, tels les chiens ». Logique : la surprotection des loups accentue leur proximité avec les activités humaines, elle « participe à la perte de leur comportement "sauvage", favorisant ainsi leur rapprochement des troupeaux, explique un collectif d'éleveurs. Les mesures de protection ne représentant pas un risque létal, les loups apprennent à déjouer ces mesures, les rendant ainsi moins efficaces, voire inutiles pour certaines. »

Résultat ? Des battues administratives coûtant un « pognon de dingue », tel que noté par Willy Schraen, président de la Fédération nationale des chasseurs et qui, un temps, a songé briguer l’investiture des Républicains, lors des primaires de 2022 : « Notre travail est gratuit. Plutôt que de payer des brigades spécialisées pour aller tirer les loups de nuit avec du matériel de guerre, quelques chasseurs, un dimanche matin, auront le même résultat pour un coût beaucoup moins élevé. »

Quand tout le monde hurle au loup

Depuis, la Coordination rurale, syndicat paysan créé en 1991, a suscité la polémique, en août dernier, n’hésitant pas à proposer une prime de 1.000 euros pour chaque loup abattu. De quoi faire hurler au loup des associations telles que 30 millions d’amis : « Plutôt que de promettre une prime à qui éliminera le loup, des solutions existent pour réduire le nombre de victimes par attaque. Chiens de protection, parc de regroupement, effarouchement… ces dispositifs ont déjà prouvé leur efficacité. »

Soit un assez bel exemple de dialogue de sourds digne du professeur Tournesol et du capitaine Haddock. Reste une position médiane, celle du bon sens : les loups ont le droit de vivre et les paysans celui de les empêcher de nuire et de leur mettre un coup de fusil, le cas échéant. Il paraît que cela se passait ainsi, dans la France du siècle dernier ; voire même dans celle de siècles plus anciens encore.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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