« Cela fait des années que je le dis : il y a un espace politique qui n’est pas occupé ! »

Exclusion, ou pas, des Constructifs... Nicolas Dhuicq réagit à ces atermoiements, signes, selon lui, du désarroi idéologique qui règne au sein de LR.

Les Républicains étaient réunis en bureau politique, mardi 11 juillet, pour examiner une procédure d'exclusion qui a finalement été reportée à l'automne. Que pensez-vous de cette réflexion des Républicains sur l'exclusion possible de ceux qui ont rejoint Emmanuel Macron ou qui se sont déclarés compatibles avec lui ?

Premièrement, nous retombons sur la question de fond de la ligne politique de ce parti. Ce parti est composite.
Celles et ceux qui considèrent que seule l'économisme prime sur le politique en ont tiré les conséquences et ont rejoint cette espèce de centre extrêmement étendu. J'aurais toutefois tendance à le qualifier de magma, qu'on appelle En Marche ! de manière directe ou indirecte.
Deuxièmement, en matière de calcul politicien, je pense que certains ont du mal à comprendre qu'il va falloir choisir une ligne politique claire. Il est impossible de maintenir l'unité entre des personnes qui ne tiennent pas le même discours, qui n'ont pas la même vision sur l'Europe, sur l'économie, sur la marchandisation, y compris du corps humain, et ont un rapport au monde différent. Je pense que c'est reculer pour mieux sauter.
Ces atermoiements décrédibilisent malheureusement le politique et le parti Les Républicains.

Thierry Solère est un des fondateurs du groupe des Constructifs. Il est devenu le questeur de l'opposition, mais il a également montré tous les signes de compatibilité avec Emmanuel Macron. Il a exprimé son indignation après ce bureau politique. Il considère qu'il n'y aurait aucune légitimité à l'exclure du parti. Que lui répondez-vous ?

Je n'écoute pas ce que dit monsieur Solère.
Je pense que nous sommes en pleine tragi-comédie, en plein ridicule. Il est évident que la coutume voulait que deux questeurs appartiennent à la majorité et un à l'opposition.
Monsieur Solère n'appartient pas, pour moi, à l'opposition.
Du reste, je suis assez déçu du vote de l'ensemble des députés du groupe Les Républicains. Seulement 23 ont voté contre la confiance au gouvernement.
Cela signifie bien le désarroi idéologique qui règne chez ces élus.

Pensez-vous qu'il faudra attendre le prochain congrès des Républicains pour y voir plus clair sur une ligne qu'on peine à dessiner ?

Cela fait des années que je dis qu'il y a un espace politique qui n'est pas occupé.
C'est un espace politique qui allait avec des discours variés, comme ceux de monsieur Séguin ou de monsieur de Villiers.
Il donne une certaine primauté à la souveraineté de la nation.
Il veut refonder la construction européenne qui ne fonctionne pas en l'état actuel.
Il considère qu'il n'y a pas que le marché comme explication du monde.
Tant que cette ligne politique ne sera pas tenue, il sera impossible à ce que j'appelle la droite de reprendre le pouvoir. C'est la seule question qui vaille. Cela m'intéresse plus que l'avenir de la formation politique Les Républicains.

Une dernière question sur la porosité, pas forcément des cadres ou des partis mais, en tout cas, des idées entre certains membres des Républicains et des électeurs du Front national. Louis Aliot a dit, il y a quelques jours, qu'il faudrait que la droite et le Front national puissent s'entendre pour les prochaines municipales. Est-ce que c'est quelque chose qui vous semble intéressant ?

Je l'ai déjà dit.
Je pense qu'il n'y aura pas de retour des droites au pouvoir en France s'il n'y a pas d'entente entre plusieurs familles politiques.
La grande difficulté, pour le Front national, est que ses cadres pensent toujours qu'ils peuvent arriver seuls au pouvoir. C'est, à mon sens, totalement impossible.
En même temps, ils sont dans une logique de phagocyter les autres. Cela ne fonctionnera pas.
Je pense que la seule manière de revenir au pouvoir, c'est bien d'avoir deux formations politiques qui s'entendent.
La clef est de recréer un RPR tendance Charles Pasqua. Cela manque terriblement aujourd'hui.
Tant qu'il n'y aura pas cette entente et, d'abord, ce travail idéologique, nous aurons des gens comme les Constructifs, les En Marche ! et autres avatars de la soumission absolue au marché qui domineront l'espace politique en France.
Malheureusement, ceux-là ne font pas de la politique.
On le voit dans les votes de l'Assemblée nationale et dans la manière de travailler des commissions. C'est très caricatural.
Il n'y a plus aucun débat. Les élus d'En Marche ! ont été endoctrinés pour ne pas débattre et formatés pour ne faire qu'un mandat de cinq ans.
Cela me semble complètement incompatible avec la constitution d'une classe politique capable d'accumuler de l'expérience et de servir le pays.

Nicolas Dhuicq
Nicolas Dhuicq
Médecin psychiatre

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