Annonces de Gabriel Attal : qu’en pensent les enseignants ?
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On s’y attendait. Nous ne sommes pas déçus. Les résultats du rapport PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) sont tombés et, sans surprise, la France se révèle mauvaise élève. Très mauvaise élève, même, puisqu’elle remporte, piteusement, la 23e place. Cette étude menée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) vise à évaluer, tous les trois ans, les performances des jeunes de 15 ans à travers le monde. À chaque publication, la chute libre du niveau scolaire français se confirme et, à chaque confirmation, le ministre de l’Éducation nationale se fend d’annonces drastiques visant à rehausser le niveau des écoliers.
Procédure habituelle, donc, cette année encore. Le 5 décembre matin, les résultats de l’enquête tombaient. « Dans l’ensemble, les résultats de 2022 sont parmi les plus bas jamais mesurés par l’enquête PISA dans les trois matières en France », constate, laconique, le rapport. Quelques minutes seulement après la publication de cette étude, le ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, déballait la série des mesures qui sauveraient infailliblement le système scolaire français. Parmi celles-ci, le ministre a ainsi fait part de sa volonté de donner le dernier mot aux enseignants lorsque la question du redoublement se poserait pour leurs élèves : les professeurs pourront désormais conseiller, voire prescrire, un stage de réussite conditionnant le passage au niveau supérieur. Des groupes de niveaux seront mis en place dans les classes, le brevet deviendra obligatoire pour passer au lycée, une nouvelle épreuve de mathématiques sera ajoutée au baccalauréat de fin de première et un logiciel d'intelligence artificielle sera même proposé aux élèves entrant en seconde pour les mathématiques et le français.
Un panel de mesures sans doute élaboré avec la meilleure volonté du monde, mais qui peine à convaincre sur le terrain. Syndicats enseignants et professeurs ont ainsi réagi aux annonces du ministre, et peu semblent adhérer à ses propos. « C’est un catalogue raisonnablement démagogique de mesures destinées à faire plaisir à un segment que Attal ne touchait pas jusque là », réagit Jean-Paul Brighelli auprès de BV. « Ces mesures sont le fait de personnes qui ne connaissent rien à l'Éducation nationale et qui manquent un tout petit peu d'assise pour balancer tout cela. Or, si l'école est en miettes, nous aurons une France en lambeaux. Tout cela est lié. » L'enseignant abonde : « Le redoublement, par exemple, n'a jamais servi à rien. 45 ans d'expérience me le confirment. Et que dire de cette idée d'un brevet "couperet" ? Que fera-t-on des élèves, s'ils ne passent pas au lycée ? » En plus de ces mesures peu convaincantes, Jean-Paul Brighelli regrette que la laïcité soit « le point aveugle des propositions de Gabriel Attal ». « La laïcité ne passe pas par des cours de laïcité. Elle passe par des savoirs. Seuls des savoirs peuvent s’opposer au fanatisme. En effet, si l'on n'emplit pas de savoir les têtes demandeuses des enfants, n’importe quel prêcheur pourra leur faire passer des convictions néfastes. » Jean-Paul Brighelli n'est pas le seul à déplorer des mesures inefficaces. Auprès de Ouest-France, la secrétaire générale adjointe du SNES-SFU, Sophie Venetitay, considère que le ministre est « complètement hors sujet ». Il « ne nous parle jamais des effectifs dans les classes, ni des professeurs en plus dont on a besoin […] Les enseignants attendent deux choses : être mieux payé et avoir de meilleures conditions de travail. Est-ce que Gabriel Attal y répond aujourd’hui ? Non », martèle-t-elle.
Au fil des différents ministres de l'Éducation nationale, la lente agonie du système scolaire se poursuit donc. Nos élites déconnectées tentent de plaire tantôt à droite, tantôt à gauche, mais le véritable intérêt des élèves ne semble toujours pas pris en compte et les réalités du terrain bien loin d'être comprises. Le classement PISA 2025 ne présage rien de bon.
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51 commentaires
Le socialiste Attal va-t-il réussir là où son prédécesseur Allègre a échoué : dégraisser le mammouth (trop de monde (inutile) dans les académies, les rectorats et au ministère