Août 2017 : le Mali vient de se heurter à sa contradiction intérieure
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Lorsque l'armée française eut gagné la guerre du Mali en 2013 (empêchant les islamistes de prendre Bamako et d'en faire une Mossoul noire), François Hollande et Laurent Fabius s'empressèrent de perdre la paix. Le 16 juillet 2013, nous avions rencontré, Nicolas Dupont-Aignan et moi-même, le ministre des Affaires étrangères du moment, à son invitation.
Après un long monologue, le ministre me demanda si je voulais lui parler de quelque chose en particulier et je lui avais dit alors : "Il ne faut pas encourager le Mali à procéder rapidement à une élection présidentielle sans qu'il n'y ait eu au préalable :
- d'abord une conférence de réconciliation nationale (c'est la tradition africaine) entre le Nord et le Sud,
- ensuite, probablement, une modification de la Constitution pour tenir compte des aspirations à la régionalisation des peuples qui composent le Mali, un pays immense, largement artificiel (voir le tracé de ses frontières tirées à la règle) et dont le Nord, plus grand que la France (auto-dénommé Azawad), abandonné par Bamako, regroupe des peuples, différents de ceux du Sud, qui vivent côte à côte depuis des siècles : notamment Maures, Peuls, Songhaïs, Touaregs, ..."
L'élection présidentielle eut lieu (sur la base de la Constitution contestée) le 28 juillet 2013, alors que la guerre n'était pas finie au Nord, que des dizaines de milliers de personnes s'étaient réfugiées dans les États voisins et, bien sûr, que toutes les questions politiques étaient laissées en suspens...
Ce suspens, ce furent les aberrants accords d'Alger de 2015 (il y avait déjà eu ceux, inutiles, de 2005 et de 1992), menés sous la tutelle de l'Algérie et... des États-Unis. Où était la France ? On promit des sinécures à certains chefs de guerre ou de clans ; certains approuvèrent, d'autre pas, et la confusion s'installa notamment sur l'essentiel : la reconstruction de l’État malien en créant des régions et en instituant des élections locales. On finissait par le début.
Une affaire si mal entamée ne pouvait pas évidemment s'arrêter là. Mêmes causes, mêmes effets. En prévision de l'élection présidentielle de 2018, l'actuel président Keïta imagina, début 2017, un référendum pour modifier la Constitution. Les récentes manifestations de rue furent le prétexte d'une campagne présidentielle avant l'heure et le référendum, prévu en juillet, fut repoussé.
Un des leaders de l'opposition, ex et futur candidat président, met de l'huile sur le feu (Jeune Afrique, 7 août 2017) :
Sur le fond, cette révision avait pour but d’intégrer certains engagements pris lors de l’accord d’Alger [signé avec les groupes rebelles du Nord en 2015], notamment sur les questions de décentralisation. Mais les députés ont estimé à l’unanimité que ces dispositions contribuaient à diviser le pays et menaçaient la cohésion nationale. Ils ont donc formulé des amendements pour qu’ils soient retirés. Pour le reste, ce texte vise essentiellement à un renforcement exorbitant des pouvoirs du chef de l’État. Ce projet ne traite plus des problèmes liés à l’accord d’Alger, puisque les députés se sont opposés à la régionalisation (sic). La révision n’est donc plus opportune (sic). Le pouvoir ne s’y accroche que pour renforcer son emprise.
Nous voilà revenus en arrière du point de départ. La France a abandonné à d'autres le dossier politique du Mali : la paix n'est pas rétablie au Nord, le centre du pays est désormais le théâtre d'affrontements interethniques, et les députés refusent d'appliquer des accords de paix et d'en tirer des conséquences constitutionnelles. Au Sud, on monopolise le pouvoir et l'économie et on jouit de maintenir le Nord dans son triste état. Au Nord, il y a désormais une génération perdue : mise hors la loi politiquement, elle ne survit que dans les trafics, les rackets ou le djihad. Rétablir la paix, la dignité, la démocratie, l'État et l'économie sera de plus en plus difficile. Car la question targuie se pose de surcroît sur une vaste étendue (Algérie, Mali, Niger, Libye). Et cette aire croise aussi celle du djihad qui infecte l'Afrique jusqu'au Nigeria et au Cameroun, via le Burkina menacé...
Un fiasco de Hollande-Fabius, Macron ? Ils ont entretenu et fortifié le terrible danger qui nous menace. Il est temps de devenir bien plus intelligent que ça. Car il est déjà bien tard.
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