Argentine : Javier Milei à l’assaut des déficits et du wokisme

Capture d'écran Casa rosada
Capture d'écran Casa rosada

La torpeur de l’été austral n’est traditionnellement pas propice aux activités politiques, à Buenos Aires. Cela, pour le plus grand plaisir de la classe aisée de la société qui, réfugiée dans la station balnéaire de Punta del Este, en Uruguay, se sent momentanément à l’abri des mauvaises nouvelles presque systématiquement liées aux désastreuses décisions de l’équipe politique de service.

Il en va tout autrement, en ce début 2025, et le président Milei n’a, une fois de plus, pas hésité à rompre avec la tradition pour plonger dans la froidure boréale, s’offrir un studieux mais passionnant voyage et rendre visite, avec sa suite, à ceux qu’il considère presque comme ses copains. J’ai nommé Donald Trump, Elon Musk, Giorgia Meloni, Viktor Orbán et la présidente du FMI Kristalina Georgieva, sans oublier, bien sûr, la faune de Davos, encore que la majorité de celle-ci ne daigne figurer, pour l’instant du moins, au rang de supporter attentionnée.

Que retenir, au-delà de ces joyeuses festivités ? Que l’on ne s’y trompe pas, il ne s’agit pas du classique coup de com' auquel nous, Français, pourrions être habitués (suivez mon regard), mais de l’officialisation éclatante d’une rupture définitive. Ou plutôt d’une double rupture.

Équilibrer les comptes de l’État

La première rupture est le rejet obstiné de tout ce qui peut ressembler, de près ou de loin, à la doxa de l’État-providence. Le libéralisme de M. Milei n’admet qu’un seul dogme : l’équilibre des comptes de l’État. La fameuse tronçonneuse doit se charger d’éliminer tout ce qui conspire contre cette ambition. Dégraissement systématique du mammouth, élimination d’innombrables structures inutiles, destruction d’organisations plus ou moins fantômes mais coûteuses, pulvérisation des normes administratives aberrantes, dût-il pour cela rompre avec le monument archaïque et passablement vermoulu du Mercosur et décréter une éventuelle, encore que peu probable, fermeture de la Banque centrale. Savourons la différence entre un an de tronçonneuse et sept ans d’archet du Mozart de la finance.

Pour provoquer cette révolution copernicienne, un personnage particulièrement décidé, M. Federico Sturzenegger, 58 ans, économiste distingué, détenteur d’un doctorat du Massachusets Institute of Economy, ancien président de la Banque centrale, transfuge du parti de centre droit de l’ancien président Macri. M. Sturzenegger n’est pas réputé pour faire dans la dentelle. Son mandat ressemble fort à celui que Donald Trump vient de confier à Elon Musk. On affirme même que ce dernier lui aurait demandé quelques conseils. Affirmation cependant à confirmer.

Au niveau des recettes, la tendance, modeste encore, est à la baisse d’impôts dans une Argentine écrasée de taxes et prélèvements. Théoriquement, la croissance évaluée à 5 % pour l’année en cours et un flux important d’investissements, notamment dans le secteur énergétique, devraient aider. Tout cela explique qu’avec 56 % d’appui populaire, stable depuis un an, et malgré le tour de vis phénoménal appliqué à l’économie, M. Milei soit optimiste pour affronter, en octobre, les élections de mi-mandat qui devraient lui permettre de se repositionner fortement au Congrès.

Faire la guerre au wokisme

La deuxième rupture est d’ordre sociétal, avec une déclaration de guerre au wokisme, à ses pompes et à ses œuvres. Sans le moindre complexe, renvoyant dos à dos les chantres larmoyants du féminisme, de la théorie du genre, de l’écologisme furieux, il se déclare au service de la vie, de la liberté et de la propriété, sans penser en démordre. Je recommande, d’ailleurs, au lecteur de relire, à ce sujet, son discours à Davos que BV a publié in extenso. Il a reçu moins d’applaudissements que Donald Trump lorsque ce dernier a réaffirmé l’existence de deux genres dans notre espèce : le féminin et le masculin. Bien dommage, pour notre vieille Europe.

L’été austral s’avance mais le bon peuple argentin contemple, sans déplaisir, son président qui lui donne l’occasion de se défaire de son rôle de cancre impénitent traînant sa morosité dans la cour des petits de ce monde pour s’incorporer résolument et presque insolemment comme le bon élève dans la cour des grands.

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Michel de Saizieu
Essec, vit en Argentine depuis 1973, CEO d’entreprises agricoles, ancien Conseiller du commerce extérieur de la France à Buenos Aires.

Vos commentaires

22 commentaires

  1. A écouter ces leaders, TRUMP, MILEI, MELANI, ORBAN, à observer leur activisme, on se dit « A nouveau, la France va prendre deux à trois trains de retard. ». Hydrogène, panneaux solaires, IA, éoliennes, gaz de schiste, armement, autant de disciplines qui nous avons laissées sur le trottoir. Aucune vision à long terme de nos dirigeants. De plus, on préfère que la pollution soit produite par les autres pays afin que nous puissions nous gargariser de nos exploits écologiques . Quel état d’esprit ! Quel esprit de responsabilité ! On peut comprendre TRUMP lequel rejette le fameux plan écolo de Paris, un écran de fumée destiné aux naïfs.

  2. Pendant que la France s’enfonce inexorablement dans le mur final, des pays qui il y a quelques années nous ne leur aurions même pas donné un petit kopeck sont en train de nous dépasser a grande vitesse. Pendant ce temps là nous leur versons des aides au développement alors que nous, nous sommes en voie de sous développement.

  3. L’état-providence est le cancer de toutes les sociétés. Rien ne devrait être gratuit. Tout se paye cash,… et pour tout le monde. Celà revalorisera la méritocratie et endiguera le népotisme communautaire qui gangrène toutes nos administration et organismes d’état.

    • Exact, mais on ne retourne pas une baleine avec un doigt… Le travail est gigantesque et dangereux.
      Personne ne sera jamais prêt à l’affronter. Même soutenu par une majorité de Français.
      Il faudrait déjà que l’exemple commence par venir d’en haut. Raboter tous les privilèges de nos dirigeants. n’est-ce-pas Monsieur Attal ? Et tous les autres.

  4. A quant un « Milei » chez nous ? Ce n’est certainement pas avec un Retailleau, membre d’un parti opportuniste LR, avec son équipe de branquignols, qui a rétropédalé concernant Némésis, qui passe son temps à faire le tour de France pour exprimer son autorité (pour l’instant, aucune loi, aucun décret n’est sorti) une sorte de campagne pour 2027. Si je me souviens bien, les RL (Sarkozy, président) étaient bien au pouvoir de 2007 à 2012, et quel a été leur bilan ?…..

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