Assises du journalisme : il paraît que les temps sont au “media bashing ». On se demande pourquoi…
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Du 14 au 17 mars se tiennent, à Tours, les Assises internationales du journalisme. Thème central : "Un journalisme utile ?" J’ai peine à saisir ce que veulent dire nos confrères : entendent-ils, par là, que le journalisme a pour fonction d’être "utile", qu’il ne l’est pas, ou bien qu’il doit le devenir ?
Dans son édito, Jérôme Bouvier, président de l'association Journalisme et Citoyenneté, nous apporte ses lumières : "Les sujets ne manquent pas cette année, écrit-il : la lutte contre les fake news […], la place des femmes dans les rédactions, le journalisme porteur de solutions… Et, tout au long de ces Assises, mettre en débat “l’utilité du journalisme”. Son utilité dans la société."
Épineuse question, donc, qui a fait l’objet d’une enquête. Selon le sondage de Viavoice réalisé en partenariat avec le JDD, les Français jugent donc dans leur ensemble que "le journalisme est utile", essentiellement "pour comprendre le monde". Toutefois, leur confiance va prioritairement à l’info "qu’ils trouvent eux-mêmes". Avec cette précision qui n’étonnera personne : "Plus ils sont jeunes, plus les Français ont confiance en une information relayée par un proche ou sur Internet." Ils estiment néanmoins que "les fake news gagnent du terrain" et pensent majoritairement qu’"il faut plus de journalistes pour lutter contre la désinformation".
Pourtant, les conclusions du rapport annuel de l'Observatoire de la déontologie de l'information (ODI) présenté, jeudi, aux Assises en question ne semblent pas tout à fait coller avec les statistiques mirifiques de Viavoice. On y lit que l’élection présidentielle de 2017 "a été émaillée d'incidents entre hommes politiques et journalistes, les premiers cherchant de plus en plus à se passer des seconds pour diffuser leurs messages formatés à leur seule convenance, ou se livrant à un média bashing [dénigrement des médias] pour se dégager d'informations les mettant en cause ou ne leur convenant pas, au risque d'affaiblir la démocratie dont la liberté d'informer et d'être informé est un des piliers". Est ainsi mise en avant "la décision du FN durant la campagne de priver certains journalistes d'accès à ses événements, ou de leur interdire d'interviewer les militants lors d'un meeting".
Mais le camp des méchants n’est pas circonscrit au FN, le "média bashing" a[yant] aussi été le fait d'autres formations politiques". Et puis, soulignent les rapporteurs, il faut noter "la généralisation de la fourniture d'images sur mesure par les partis politiques à l'occasion de leurs meetings".
Ce qui est intéressant, dans cette histoire, c’est qu’à aucun moment le monde des « journalistes » ne se pose la question de sa propre objectivité, pour ne pas parler tout bonnement d’honnêteté dans l’information. Illustration par cette anecdote qui remonte à la semaine passée, dix mois, donc, après les élections. Marine Le Pen est l’invitée d’Élizabeth Martichoux, sur RTL, à quelques jours du congrès du FN. Je passe sur l’interview, hargneuse comme à l’accoutumée. Mais la fin, franchement ridicule, est du niveau de maternelle : quand elle salue toujours ses invités d’un sonore « Merci Machin… », Mme Martichou susurre cette fois un inaudible "Merci Marine Le Pen". Quant au costaud Yves Calvi, qui reprend toujours en deux ou trois phrases les propos essentiels de l’invité, il reste cette fois muet et embraye sur la météo : Marine Le Pen, qui a récolté 11 millions de voix dans les urnes, n’a rien dit qui mérite d’être retenu ! Ridicule.
Sur la page d’accueil du site Journalisme.com figure cette belle déclaration de Joseph Pulitzer : "Notre République et sa presse graviront ensemble les sommets ou bien elles iront ensemble à leur perte. Une presse compétente, désintéressée, peut protéger cette morale collective de la vertu, sans laquelle un gouvernement populaire n’est qu’une escroquerie et une mascarade."
À méditer…
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