Attentats à Barcelone : la fausse tolérance d’Al-Andalus
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Nos intellectuels bien-pensants vantent la prétendue tolérance de l’Andalousie musulmane en l’opposant à l’Inquisition espagnole du XVIe siècle. Cette vision faussée imprègne les manuels d’histoire de nos collégiens, et même Sciences Po organise des colloques qui professent les mêmes âneries (ce qui me paraît bien plus grave).
La réalité est autre : pour s’en assurer, il suffit de lire les nombreuses chroniques médiévales ou de consulter Wikipédia (dont les articles à ce sujet sont bien faits, quoique succincts).
En 700, l’Espagne était habitée par des Hispano-Romains dont la langue dérivait du latin et qui étaient catholiques. Vers 400, leur pays avait été conquis par un peuple germanique, les Wisigoths, de confession arienne (une branche du christianisme qui, sous sa forme la plus extrême, pense que Jésus est un homme et non Dieu). Les rois goths s’étaient convertis en 586 au catholicisme mais une grande part de leur noblesse était restée arienne. Entre 713 et 717, une petite armée berbère (les habitants primitifs de l’Afrique du Nord) a conquis par les armes la majeure partie de l’Espagne au nom du calife de Damas.
Les envahisseurs étaient à peine musulmans (le Maroc n’avait été occupé que depuis 709 !). Les ariens ont considéré l’islam comme une hérésie chrétienne proche de leur doctrine et se sont convertis en masse. Néanmoins, malgré une immigration importante (surtout berbère), les musulmans étaient au départ minoritaires et la tolérance s’est imposée d’elle-même. Mais les fidèles du Prophète ont instauré l’apartheid pour les tenants des autres cultes (impôts spécifiques, port de vêtements distinctifs). Les persécutions ont commencé vers 818. Entre 850 et 859, 44 martyrs ont été exécutés à Cordoue, simplement pour avoir affirmé leur foi. Al-Andalus a connu ensuite une alternance de persécutions et de périodes de tolérance mais les impositions et les brimades sont allées croissant, entraînant un exode des dhimmis vers les territoires du Nord dirigés par des chrétiens. Et, finalement, en 1160, les souverains almohades ont interdit le christianisme et le judaïsme en Andalousie.
Les chrétiens ont progressivement reconquis la Péninsule. Au départ, ils se montraient tolérants et permettaient aux musulmans qui habitaient chez eux de vivre leur foi. Par exemple, le roi de Castille Alphonse VI se proclamait, en 1085, empereur des trois religions. En 1492, l’émirat de Grenade, le dernier État musulman de la Péninsule, a été annexé par les chrétiens ; en 1529, tous les musulmans ont été forcés de se convertir avant que leurs descendants ne soient expulsés vers 1609 (mais les deux tiers sont restés ou sont revenus).
Tout historien impartial constate la symétrie totale et parfaite entre les deux situations : conquête par les armes suivie d’une période de liberté de culte en échange d’impôts spécifiques avant la conversion de force. Al-Andalus n’a été ni plus ni moins tolérant que les États chrétiens qui lui ont succédé. Mais, malheureusement pour les nostalgiques d'Al-Andalus, la symétrie n'est totale que pour le temps de la conquête ou de la reconquête, car ensuite, une fois que l'islam ou que le christianisme sont bien installés, la dissymétrie est flagrante, pour les minorités religieuses qui ne sont absolument pas soumises au même régime selon que le pays est musulman ou héritier du christianisme. Toute l'histoire du monde musulman le montre. Et le présent aussi...
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