« Au 31 du mois d’août », le chant joyeux d’une glorieuse victoire

Garneray, L'abordage du Kent (détail). Musée de la  Roche-sur-Yon.
Garneray, L'abordage du Kent (détail). Musée de la Roche-sur-Yon.

Au trente et un du mois d’août ! : voilà un chant entraînant que nombre d’entre nous ont entonné au coin du feu, aux scouts, en bonne compagnie ou autour d’une bonne boisson. Mais combien savent qu'outre la célébration d'un joyeux moment d’ivresse où nous « buvons un coup », ce chant commémore aussi une victoire militaire de la France, la prise du Kent, qui eut lieu en 1800.

Surcouf et la Confiance

L'histoire commence au début du XIXe siècle. Contrairement à ce que raconte la chanson, qui connut de nombreuses altérations au cours des deux siècles qui nous séparent de sa création, notre victoire n’a pas eu lieu un « trente et un du mois d’août » mais bien le 7 octobre 1800. Ce jour-là, le célèbre corsaire Robert Surcouf vogue à travers les eaux saphir de l’océan Indien à bord de son navire la Confiance. Le capitaine malouin combat sur les flots au nom de la France depuis l’âge de 14 ans et entretient une haine féroce contre les farouches rivaux de notre nation sur les mers : les Britanniques. Ainsi, en ce début du mois d’octobre, la chance et le destin lui offrent une nouvelle proie voguant dans le golfe du Bengale : le Kent. Ce navire anglais, au service de la Compagnie des Indes orientales, est d’une taille imposante. Son tonnage fait le triple de celui de la Confiance. Il aligne aussi 40 canons et 437 membres d'équipage, tandis que la corvette française ne possède que 24 pièces d’artillerie et 160 marins. La supériorité technique et la force du nombre sont du côté du Kent. Pourtant, l’audacieux Surcouf, au risque d’être vaincu et de périr sans gloire au milieu de l’océan Indien, va se lancer à la poursuite de ce beau butin.

La prise du Kent

Aperçue par la vigie anglaise à l’aube, la Confiance n’inquiète pas le capitaine anglais du Kent. Celui-ci croit en la puissance manifeste de son bâtiment et invite même, selon la légende, les passagers de son navire à venir assister au spectacle qui ne devrait pas durer. Cependant, après une course-poursuite à travers les flots et profitant d’une plus grande maniabilité du fait de sa plus petite taille, la Confiance réussit à aborder le Kent. L’assaut commence et se termine rapidement. Au terme des combats, on dénombre quatorze Anglais tués et quarante-quatre autres blessés. Les Français, pourtant inférieurs en nombre, n’ont à déplorer que cinq morts et une dizaine de blessés.

Par cette victoire immortalisée par le peintre Ambroise Louis Garneray, présent lors des affrontements, Robert Surcouf s’empare du navire anglais. Gagnant fortune et gloire par sa bravoure, il obtient aussi des surnoms, synonymes de terreur pour Albion, qui feront sa renommée à travers les océans, comme « le roi des corsaires », « le tigre des mers » ou encore « l’ogre du Bengale ».

Un chant à boire et patriotique

Cette victoire fait naître le chant Au trente et un du mois d’août. Mais de nombreuses incohérences existent dans le texte de la chanson, comme la date indiquée dans le refrain. Le Kent n’allait pas « attaquer Bordeaux » mais se dirigeait en réalité vers le Bengale. Rappelons aussi qu’en 1800, la France n’est plus un royaume mais un consulat dirigé par Bonaparte, rendant absurde l’exclamation de la chanson « à la santé du roi de France ». Cependant, cette phrase vient faire opposition à l’insulte envoyée au « roi d'Angleterre qui nous a déclaré la guerre », révélant et justifiant la haine d’une France victorieuse contre des Anglais belliqueux. Ainsi, Au trente et un du mois d’août continue à transmettre un sentiment de fierté nationale et fait l’orgueil de nombreux régiments militaires de notre pays qui chantent encore aujourd’hui cet hymne à la gloire de Surcouf.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

14 commentaires

  1. « Rappelons aussi qu’en 1800, la France n’est plus un royaume mais un consulat dirigé par Bonaparte, rendant absurde l’exclamation de la chanson « à la santé du roi de France » ».
    Oui mais nous appelons toujours cette arme de traditions « La Royale ».

  2. Née un 31 août, j’ai souvent entendu cette chanson dont mon père – qui connaissait les divers couplets originaux de cette chanson de marins – avait créé un couplet annonçant ma naissance.

  3. Nos chers « meilleurs ennemis » anglais ! Il n’y a plus qu’au rugby que ça chauffe encore… Pour que perdure la tradition ! Buvons un coup, buvons en deux, à la santé de Charles III !

  4. Comme quoi …
    Comme quoi, bien commandés, matelots, soldats et vrais français en général sont capables de grandes choses !
    Comme quoi nous nous plantons régulièrement en continuant à écouter les « penseurs politiquement corrects», leurs media et leurs autres « mondialisteries », qui nous amènent désormais à voter pour les présidents les plus contestables !
    Comme quoi, s’il n’est pas trop tard, il serait préférable d’ inverser enfin les pensées et de virer les « penseurs » politiquement correctes, qui sans être présidents, fleurent bon le mondialisme et qui, depuis 1969, incitent à confier systématiquement le commandement aux pires plutôt qu’aux meilleurs !

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