Audition d’Olivier Véran par le Sénat : l’influence déterminante des cabinets de conseil dans la gestion de la crise sanitaire
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Le 2 février dernier, Olivier Véran, après d’autres ministres comme Florence Parly ou Amélie de Montchalin en janvier, a été interrogé par la commission d’enquête du Sénat sur l’influence des cabinets de conseil dans les décisions du gouvernement.
De quoi s’agit-il ? Il s’agit d’évaluer la pertinence et donc le coût du recours, par l’administration centrale française, à ces cabinets de conseil privés (plus d’une dizaine de contrats pour le seul cabinet McKinsey) depuis le début de la crise sanitaire. Mais il s’agit aussi d’essayer de voir quel est le rôle de ces cabinets dans la prise de décision des politiques publiques. En clair, les décisions concernant la gestion de la crise sanitaire, et tout particulièrement la stratégie vaccinale, ont-elles été (très) fortement influencées par de prestigieux cabinets privés, et surtout, en l’occurrence, le cabinet McKinsey ? Pour « aider » la commission d’enquête à y voir plus clair, le cabinet du ministre de la Santé a transmis, la veille de l’audition, des milliers de documents : 50 gigaoctets de données, selon Public Sénat. Ou comment « noyer » la commission d’enquête sénatoriale…
Pendant toute son audition, menée sans concession et avec opiniâtreté par la sénatrice communiste Éliane Assassi (rapporteur de la commission) et ses acolytes, Olivier Véran a essayé de jouer la transparence. Les membres du cabinet McKinsey ont, dit-il, été intégrés en renfort RH des équipes administratives. Ils ont donc, à ce titre, participé à des notes transmises notamment au Conseil de défense stratégique, dont le fonctionnement est pour le moins opaque.
Lors de l’audition, le président Arnaud Bazin, sénateur LR du Val-d’Oise, regrette cette non-séparation nette des tâches : « On a l’impression qu’on a pris des agents publics dans un vivier privé sans avoir passé un marché clair sur une mission précise avec les cabinets privés. » Réponse d’Olivier Véran : « Vous sortez du cadre ! » Le ministre reconnaît néanmoins, à la présentation de notes du ministère cosignée par un consultant privé, que « c’est inhabituel, mais encore une fois, nous sommes en guerre ».
Cette audition a permis de donner un chiffre sur le coût de ces missions de conseil depuis 2020 : 26,79 millions d’euros, contre 1,717 million en 2019. « Ce coût reste toutefois modéré au regard de l’ensemble des dépenses sanitaires », n’hésite-t-il pas à dire en comparant aux 30 milliards d’euros de dépenses de crise.
Interviewée sur Public Sénat, Éliane Assassi rappelle que la commission rendra ses conclusions au mois de mars mais, dit-elle, « est-ce qu’on laisse la main au privé ou est-ce que c’est notre gouvernement, l’État et notre administration qui tracent les lignes de nos politiques publiques ? Or, on s’aperçoit qu’il y a une ligne de crête. On passe facilement de l’autre côté et c’est ça que nous reprochons. »
Ce qu’il serait intéressant de savoir, c’est s’il y a un problème de conflit d’intérêts. Le cabinet McKinsey, qui a donc participé à l’élaboration de la stratégie vaccinale – même si le gouvernement ne parle que de support logistique –, met en avant sur son propre site ses compétences en gestion commerciale, marketing et recherche de profit pour... les industries pharmaceutiques : « Nous accompagnons les grands acteurs de l’Industrie pharmaceutique et des Dispositifs médicaux afin de les aider à anticiper les évolutions du secteur, concevoir des approches innovantes et développer les compétences qui garantiront leur performance durable et leur croissance rentable. Notre cabinet s’est imposé comme le leader mondial du conseil dans le secteur biopharma au sens large, avec plus de 3.750 missions effectuées au cours des cinq dernières années, auprès de grands laboratoires pharmaceutiques, mais aussi d’acteurs des biotechs […] Nous avons ainsi contribué au développement de huit des dix principales marques de médicaments sur ordonnance. »
Les passerelles entre le cabinet McKinsey et Pfizer, par exemple, sont nombreuses : citons, par exemple, le cas du nouveau directeur de l’innovation de Pfizer, Aamir Malik, qui est un ancien directeur associé chez McKinsey (BFM.bourse). Ce cabinet, comme il a été souvent dit dans la presse, est proche d’Emmanuel Macron, depuis les travaux de la commission Attali. Le président de la République y a fait la connaissance de Karim Tadjeddine, directeur associé de McKinsey, en charge de l’activité secteur public. Les MacronLeaks ont révélé le rôle de ce cabinet dans la campagne de 2017.
Reconnaissons que cette influence grandissante (pourrait-on même parler de mainmise ?) des cabinets de conseil, aux ramifications mondiales, ne date pas de la présidence d’Emmanuel Macron.
En effet, selon Francetvinfo, « McKinsey agissait déjà pour le compte de l'État à l'époque de Nicolas Sarkozy. Il avait conseillé le ministère de l'Identité nationale sur une « optimisation du processus de naturalisation » ».
Encore un symbole de l’interférence menée à grande échelle par ces cabinets de conseil dans la prise de décisions politiques qui, on l’a vu ces derniers mois, sont cruciales pour l’avenir des Français.
Et un élément important à porter au bilan d’Emmanuel Macron.
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74 commentaires
Par qui sommes nous réellement gouvernés et à quoi servent les députés? sommes nous encore en démocratie ou simplement une ramification de ce gouvernement mondial qui n’existe pas.
Dans tous les domaines macron a été un traître face aux citoyens français. Sarko a fait face au tribunal pour de trop nombreux sondages…j’espère que macron sera traité de la même façon pour avoir remplacé les fonctionnaires décisionnaires par des cabinets privés étrangers dont les intérêts sont les mêmes que ceux des labos qu’ils représentent.
Utiliser ces sociétés qui ont des passerelles avec Bigpharma revient à un renvoi d’ascenseur de 27 millions d’euros! Ce gouvernement n’est pas pourri, il est faisandé….
Et quid du rôle joué par Victor Fabius, directeur associé de Mckinsey France dans les décisions relatives au pass vaccinal, si facilement accepté par le Conseil Constitutionnel présidé par son père Laurent Fabius ? Toutes décisions prises sans débat parlementaire au sein d’un opaque « Conseil de Défense » (déviance de l’article 16) auquel participe justement Mckinsey. À rapprocher aussi des liens entre le mari d’Ursula Von der Layen et le groupe Pfizer…Vous avez dit conflits d’intérêts ?
Tous ces gens sont avant tout des rapaces visant la proie : les lieux où ils peuvent se faire beaucoup d’argent facilement ; bien aidés par des élus et fonctionnaires incompétents, qui n’auraient pas besoin d’eux s’ils avaient le niveau et n’oubliaient pas le sens de leur travail et mission. Mais ils préfèrent inventer des guerres, et jouer un théâtre grotesque et violent sans jamais revenir au RÉEL.
je suis étonné que l’accent ne soit pas mis sur le liens possible par victor fabius et le conseil constitutionnel, quant je pense que les députés n’ont pas le droit de travaillé avec leur femme, je m’interroge
Cette fois-ci les « atteintes aux intérets fondamentaux de la Nation » de ce gouvernement et du président par l’usage de cabinets privés étrangers soucieux de la destruction de l’Europe et de ses peuples, sont caractérisés, ils ne doivent plus échapper aux tribunaux
Je m’interroge sur l’utilite D’un staf de hauts fonctionnaires payés un pognon de dingue si il faut en plus payer un cabinet qui sait tout pour en arriver où nous en sommes
ces « hauts fonctionnaires » sont des énarques, ça veut tout dire !
Plus on avance dans cette crise et plus on découvre des magouilles. L’utilisation à répétition de ces cabinets de conseil dont on peut douter de l’impartialité. D’autre part , nos pseudos élites qui nous gouvernent seraient elles incapables de prendre les bonnes décisions. On sait que ces fameuses élites ne savent pas négocier de contrats , il suffit de se souvenir en 2015 la renégociation des tarifs des autoroutes par S. Royal et un certain Macron , les deux roulés dans la farine.
Elles ne font surtout pas appel à nos scientifiques qui eux tiennent la route sur un plan international!:
Un « staff » comprenant ! A Henrion Caude, Le Pr Raoult, le Pr Montagnier (Prix Nobel!), Le Pr Peronne, le Dr Fouché, le Dr Maudrux… Cela aurait eu de la classe, tant humaine que scientifique, bien plus que le Conseil Scientifique nommé par macron et sa bande de bras pourris!
Et nous n’en serions pas là, mais sortis par le haut depuis bien longtemps!
Nous payons des cabinets pour faite le travail pendant que nos élus qui devraient travailler s’engraissent. Vite la chasse!
Le vrai problème n’est pas le conflit d’intérêts, ni même le copinage rémunérateur (je te passe un contrat juteux et tu me fais une rétro commission, j’ai connu ça), mais la lâcheté et et le manque de vison / conviction de nos soi disant dirigeants: tout le contraire de Zemmour.
N’oublions surtout pas que le fils de Laurent Fabius, un bon socialiste président du conseil constitutionnel, est directeur associé du cabinet McKinsey qu’Olivier Véran, encore un bon socialiste ministre de la maladie, a embauché pour gérer la crise du Covid dont le directeur de l’innovation d’entreprise de Pfizer était consultant issu du cabinet McKinsey… Bizarre, vous avez dit bizarre ?
Louche et glauque .
On se demande à quoi servent, alors, tous ces ministres et leurs conseillers pléthoriques, les députés, les sénateurs…
Le plus troublant là dedans est que les décisions sanitaires ont été prises par un Conseil de Défense, et sont donc couvertes par le secret défense : circulez, vous ne saurez rien de ce qui s’y est dit. C’est pratique, pas de comptes à rendre…Il est vrai que « nous sommes en guerre » (Macron avait donc des arrières pensées en formulant son anaphore…).
Mais des cabinets de conseil étrangers ont été associés, de fait, au secret défense. De quoi justifier un passage en conseil de guerre !