„Ausweis, bitte!“ : 9 août, jour J d’une nouvelle ère

passe sanitaire

Quelques jours de vacances m’ont conduite dans la France qu’on dit profonde. Il est toujours intéressant d’échapper au tumulte de la ville, ça permet de voir comment opère la contamination. Je parle de celle des idées, bien sûr.

Ainsi, reclus dans un charmant petit village de Touraine entre champs de blé et de tournesol, nous nous sommes fait virer d’une guinguette pour défaut de passe sanitaire. En fait de guinguette, dix tables en plein air, sur la place du village, pour écouter le conteur local. J’ai argumenté : le Conseil constitutionnel n’avait pas rendu sa décision. Rien à faire. Gonflée de son importance et de son téléphone à décrypter les QR codes, masquée jusqu’à la racine des cheveux, la dame qui gardait la place n’a rien cédé : « On est un lieu culturel, et pis chacun fait comme y veut ! (sic) »

Si le Covid, sournois, ne circule pas dans la poussière des moissonneuses-batteuses, il n’en ronge pas moins les cerveaux. Heureux de ce sentiment de supériorité que confère l’arbitraire, certains ont donc pris de l’avance sur les mesures joliment coercitives imaginées par nos politiques, lesquelles entrent officiellement en vigueur ce lundi 9 août.

Désormais, plus de café en terrasse sur le port, le nez au vent du large, sauf à présenter au serveur l’Ausweis de rigueur. Les commerçants contrevenants s’exposent à une fermeture administrative de sept jours, un an de prison et 9.000 euros d’amende s’ils récidivent à plus de trois reprises en 45 jours. Sont également concernés les hôtels, campings et autres clubs de vacances qui disposent d’un bar ou restaurant. Donc, n’oubliez pas de glisser votre passe dans le maillot de bain.

Même chose pour les transports, sauf… les transports parisiens. Ben oui, il est évident que le Covid circule davantage dans l’autorail entre Lucay-le-Mâle et Romorantin qu’entre Saint-Lazare et le Stade de France.

Là aussi, j’attends de voir comment vont se débrouiller les contrôleurs de la SNCF. C’est déjà l’embouteillage pour embarquer dans un OUIGO, alors s’il faut contrôler la santé en plus du billet, on va rigoler…

S’agissant des grands centres commerciaux, la décision est renvoyée aux préfets. C’est à eux qu’incombe, dorénavant, la décision de faire ou non crever ce qui reste de commerces indépendants, cela en fonction de la « gravité des risques de contamination ».

Le point le plus litigieux concerne à ce jour les établissements de santé. Hors l’obligation vaccinale des personnels, il va falloir désormais présenter son passe pour accéder aux hôpitaux, établissements médico-sociaux, EHPAD et maisons de retraite. Celui-ci sera exigé pour tous les accompagnants des malades et les patients qui doivent se rendre dans ces lieux pour des soins programmés. Dans sa grande bonté, le Conseil constitutionnel a toutefois laissé de côté les services d’urgence : on ne sera pas obligé de se faire curer le nez avant d’appeler le SAMU.

Qui est concerné ? Tous les adultes. Les mineurs de 12 à 17 ans ont un sursis jusqu’au 30 septembre : après quoi, il leur faudra aussi y passer. Pour qu’un passe sanitaire soit valide, il faut avoir reçu deux injections (bientôt trois, c’est sûr) ou disposer d’un test PCR ou antigénique négatif ou, encore, d’un certificat de rétablissement d’une contamination au Covid-19 dans les 6 derniers mois.

Voyant monter la gronde et les manifestants, le bon docteur Véran a fait passer la durée des tests de 48 à 72 heures. Il a également autorisé les autotests, à condition qu’ils soient validés par un professionnel de santé. Surtout, on ne sera pas obligé de présenter son passe pour aller chez le médecin de ville… mais à l’hôpital, oui !

Enfin, si vous avez un mariage en vue, sachez que vous serez responsable de vos invités : contrôle du passe pour tout le monde, à moins que vous ne receviez dans votre salle à manger.

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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