Avec l’arrivée de Trump, l’Europe doit revoir sa politique climatique
Donald Trump ne s’est pas fait attendre : une demi-heure après son investiture, il se retirait pour la seconde fois de l'accord de Paris. Courage, diront certains ; inconscience, proclameront d’autres ; peu importe. Le nouveau locataire de la Maison-Blanche ratifie la mort administrative d’un traité... mort-né dont l’institut européen Copernicus avait, voici deux semaines, signé l’acte de décès. L’année 2024 est la première de l’ère industrielle à avoir dépassé la limite fatidique : la barre des 1,5 °C « horizon 2100 » dont les écologistes avaient fait un totem après la COP21 aura donc été dépassée avec…75 ans d’avance.
Abhorrer la personnalité de Donald Trump n’y changera rien. En signant ce décret, le nouveau président a le grand mérite de renvoyer à l’Europe les images de son égarement écologique et lui conseille implicitement de revoir sa copie de fond en comble. Car les élites européennes sont aujourd’hui les seules à y croire encore béatement.
Un échec multifactoriel
Presque dix années, jour pour jour, après la grand-messe du Bourget, les résultats sont catastrophiques : les émissions continuent de s’accroître régulièrement au rythme des consommations fossiles battant des records année après année. Entre 2015 et 2024, la part de fossiles dans le mix mondial est restée au-dessus de 80 %. Le diagnostic de cet échec cuisant est multifactoriel. Les pays émergents, qui représenteront en 2050 90 % de la population, veulent légitimement continuer leur développement, tandis que la nouvelle logique de blocs (BRICS, États-Unis et Europe) pousse à la confrontation plutôt qu’à la coopération multilatéraliste espérée après la chute de l’Union soviétique.
Quant au business vert européen qui devait générer des millions d’emplois, c’est un malade en phase terminale. Ses trop faibles rendements économiques (inférieurs à 5 %) ne retiennent les investisseurs qu’à coups de centaines de milliards de subventions publiques. En en continuant de mettre en œuvre à la lettre son morbide Pacte vert, l’Europe est en train de suicider « sur l’autel de la vertu » ce qui lui reste de son industrie. Ainsi, le secteur automobile, jadis fleuron de l’économie européenne, se saborde lentement mais sûrement avec, à la clé, la destruction de 13 millions d’emplois. Quant aux grands groupes énergétiques, ils quittent l’un après l’autre le train des renouvelables pour réinvestir massivement dans les énergies fossiles qui fournissent des rendements supérieurs à 15 %. En 2025, les investissements dans le pétrole et le gaz devraient atteindre 1.250 milliards de dollars, soit le deuxième plus haut historique après 2015.
Empreinte carbone et gaz de schiste
Les émissions territoriales du Vieux Continent, qui ont baissé de 30 % depuis 1990, ne sont qu’un trompe-l’œil. Au cours des deux dernières décennies la décarbonation européenne repose surtout sur la délocalisation de l’industrie lourde, alors que les émissions dans le transport et le bâti stagnent. Ainsi, la baisse des émissions 2023 de 5 % dont s’est réjoui le gouvernement sont essentiellement corrélées… aux faillites d’entreprises. Cette délocalisation se lit en filigrane de l’empreinte carbone qui reste quasi constante.
Depuis l’embargo sur le gaz russe qu’il n’importe plus, le Vieux Continent se drogue au gaz (de schiste) naturel liquéfié (GNL) américain, vendu en Europe cinq fois plus cher qu’aux États-Unis. Légitimement, on aurait pu attendre que le nouveau locataire de la Maison-Blanche fasse preuve d’un peu de mansuétude vis-à-vis de son meilleur client. Mais rien n’arrête Trump ! Considérant que l’Europe ne lui achète pas suffisamment de voitures et de denrées agricoles, il a décidé d’assujettir d'une taxe à hauteur de 20 % les importations européennes. Certes inférieure aux 60 % qui seront appliqués aux denrées chinoises, cette taxe devrait particulièrement impacter l’industrie du luxe qui exporte massivement aux États-Unis. La présence de Bernard Arnault à la cérémonie d’investiture n’y fera rien : le Moët & Chandon et les sacs Vuitton seront surtaxés.
Adaptation ou atténuation
Face à cette double attaque climatique et économique, mais surtout face à l’impasse de sa transition avortée, l’Europe doit cesser de jouer aux Bisounours et revoir de fond en comble son logiciel climato-énergétique.
Tous les scénarios prospectifs sérieux montrent que les émissions de gaz à effet de serre 2050 auront à peine baissé par rapport à la situation actuelle et que la planète se nourrira toujours de plus de 50 % d'énergies fossiles. Ces scénarios montrent aussi de façon implacable que le réchauffement climatique va se poursuivre pour atteindre, à la fin du siècle, entre 2,5 °C et 3 °C.
À condition de s’y adapter, ce monde n’est pas, comme certains le proclament, invivable. Il est donc indispensable de rééquilibrer de façon drastique le ratio entre atténuation (représentant aujourd’hui plus de 90 % des investissements) et adaptation du parent pauvre du système.
L’adaptation requiert de se protéger contre deux types de fléaux climatiques : d’une part, ceux principalement responsables de dégâts matériels (inondations, tempêtes, cyclones, feux de forêts) et, d’autre part, ceux principalement responsables de dégâts humains (sécheresses, vagues de chaleur, stress hydrique). Par rapport à l’atténuation qui se doit d’être mondiale (les gaz à effet de serre n’ont pas de frontières !), l’adaptation a un avantage compétitif déterminant pour une nation : elle est territoriale. Un pays, une région et même une commune peuvent s’adapter indépendamment de leurs voisins.
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52 commentaires
Philippe
bravo pour ton papier chez Voltaire et ton soutien pour la politique réaliste de Trump concernant le climat et le futur énergétique de la planète ; j’espère qu’il fera cela en douceur , sinon les réactions mondiales pourraient provoquer des catastrophes pire que les changements climatiques ou les problèmes de la transition énergétique ; j’ai quand même quelques questions concernant la fin de ton article où tu as écrit
« » » » »Ces scénarios montrent aussi de façon implacable que le réchauffement climatique va se poursuivre pour atteindre, à la fin du siècle, entre 2,5 °C et 3 °C. » » » »
Ces modélisations , tu y crois ou n’y crois pas ? et est-ce que tu crois que nous serions capable de les atténuer ?
Par contre l’adaptation , je pense que cela ne pose pas de problème ; l’homme s’est toujours adapté aux changements climatiques depuis qu’il a vécu dans les cavernes , mais on pourrait discuter sur un passé plus récent
Mais même dans les années dont je me souviens , inondations, tempêtes, cyclones, feux de forêt, sécheresses, vagues de chaleur, stress hydrique me semblent avoir été plus importants que ce que l’on vit dans les dernières années ; mais depuis la naissance du GIEC nous vivons la météo du monde entier
Le problème , c’est que les politique et les médias ont besoin de cela pour remplir leurs caisses
La pression absurde écologique participe à l’affaissement de la France. Au plan industriel, les charges trop pesantes , taxes, énergie, difficultés techniques conduisent les entrepreneurs à se délocaliser. Ajoutons des choix stratégiques absurdes : les contraintes techniques et de temps imposées à l’industrie automobile, le véhicule alimenté par batterie alors que la Chine et les USA sont leaders. Alors que le créneaux hydrogène était à disposition et pratiquement sans concurrence mais il fallait investir massivement. Pas disposés, solution écartée. L’Europe a raté le train. Ajoutons des écolos sous-doués, tyranniques, qui font porter toute la charge sur l’humain alors que des facteurs non maîtrisables sont les principales causes du réchauffement climatique. Le passage d’une période glaciaire à un réchauffement. L’évolution du positonnement de l’axe de rotation de la terre. Quelle est la part de l’humain dans cet ensemble d’évolutions ? Mystère.
Votre article est très intéressant, seul bémol, vous restez convaincu d’un réchauffement climatique d’origine humaine ce qui n’est pas prouvé scientifiquement, qui nous conduirait à un +3°C à l’horizon 2100, d’après des modulations du climat de la planète que la science ne maitris pas ! Ce qui semble prouvé, c’est que nous vivons un optimum climatique à l’échelle des glaciations qui se renouvellent tous les 150 000 ans conjuguée à une maximal de de l’oscillation multi-décennale de l’océan Atlantique : la température moyenne de la planète a commencé à baisser depuis 5 ans vers un minimum océanique qui se produira dans 30 ans et une glaciation dans 120 000 ans, de quoi voir venir. Il suffit pour s’en persuader de lire « Unsettled : What Climate Science Tells Us, What It Doesn’t, and Why It Matters » de Steven E. Koonin, ou même « Le climat par les chiffres » de Christian Gérondeau
Tout à fait d’accord avec votre analyse…cette décarbonation forcenée des européens est insensée !!