Quel avenir pour La République en marche ?
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Dans une tribune très intéressante accordée au Figaro Vox, l’historien Marc Lazar, spécialiste de l’Italie contemporaine, établit un parallèle stimulant entre la situation politique présente de la France et celle que la Botte connaît depuis un peu plus de vingt ans. En effet, l’Italie du milieu des années 1990 fut frappée par une crise politique majeure dont les vieux partis dits de gouvernement ne se sont toujours pas pleinement remis.
Après les fameuses « années de plomb » marquées par des affrontements violents, allant jusqu’au terrorisme d’extrême gauche et d’extrême droite, sans compter ces attentats dont on ne sait toujours pas s’ils furent directement commandités par un État central corrompu et mafieux, la chute du mur de Berlin couplée à l’opération "Mains propres" achevèrent de dégoûter la population de sa vieille classe politique traditionnelle. Ainsi naquit un phénomène : Silvio Berlusconi.
S’appuyant sur son entreprise Fininvest, Silvio Berlusconi fondait Forza Italia en 1994. Pour la première fois en Europe, un parti politique était pensé comme une entreprise privée, utilisant les ressources du marketing, de la communication et du management. Centrée autour de la personnalité fantasque de Silvio Berlusconi, Forza Italia bouleversa le paysage politique transalpin, ringardisant les autres partis.
Certains durent, d’ailleurs, tirer les leçons des claques reçues, le grand Parti communiste italien, longtemps le deuxième plus puissant d’Europe occidentale, et le Mouvement social italien, ouvertement néo-fasciste, en sont sortis radicalement changés, sans jamais pouvoir regagner l’influence qui fut la leur par le passé.
Comme l’explique monsieur Lazar, Forza Italia a toujours été le parti du propriétaire de l’AC Milan, lequel ne reculait jamais devant la confusion des genres : milliardaire, homme de médias, promoteur immobilier, séducteur et chef d’État. Son profil est donc très différent de celui d’Emmanuel Macron, somme toute plus classique, ayant fait ses classes d’énarque dans l’administration publique, les cabinets ministériels et la banque privée.
Une question majeure se pose : Emmanuel Macron consentira-t-il à laisser La République en marche devenir un vrai parti politique moderne, indépendant de sa personne ? Ou, au contraire, se contentera-t-il d’en faire un parti uniquement mobilisable pour les enjeux électoraux ? Sans Emmanuel Macron, La République en marche n’est plus rien aujourd’hui.
En Israël, le mouvement macronien est plus volontiers comparé au parti Kadima (קדימה), apparu comme une comète lors des élections législatives 2005. Tout comme La République en marche, Kadima revendiquait dépasser les clivages « droite-gauche », réunissant en son sein des personnalités venues de la droite (Likoud/הליכוד) et de la gauche (Avoda/עבודה). Toutefois, le parti n’a pas réussi à s’inscrire durablement dans la vie politique de l’État hébreu, aujourd’hui remplacé par Hatnua (התנועה), dont Tsipi Livni (ציפורה מלכה לבני) a pris la tête.
Sorte de mouvement emblématique de la postmodernité, tenant à la fois de Forza Italia et des études algorithmiques en vogue depuis l’élection de Barack Obama, La République en marche incarne ce populisme transversal, soft et consensuel censé étouffer les colères et les rancœurs accumulées dans un pays échaudé par des décennies d’errements. Gare à ce que La République en marche ne soit pas aussi vite dégagée qu’elle n’est arrivée, subissant à son tour ce qu’elle a infligé aux autres…
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