Bertrand Cantat manque-t-il de pudeur ?
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Il avait du talent, il en a sans doute encore. Un brin donneur de leçons, il l’avait mis au service de ses convictions, pas des miennes. Mais revendiquer une liberté d’expression pour soi et la refuser aux autres relève de la bêtise, alors c’est une situation normale.
Et puis il y a eu ce « fait divers » de Vilnius, l’homme qui tabasse sa compagne jusqu’à la tuer un soir de beuverie. Ensuite, un procès et un verdict, sans doute équitable : huit ans de prison. Après quatre ans derrière les barreaux, la liberté. Enfin, ce suicide de sa première compagne et mère de ses enfants dans des circonstances compliquées, sans doute très difficilement compréhensibles. Et les adjectifs qui viennent forcément à l’esprit : toxique, vénéneux… C’est sans doute un préjugé, un injuste jugement sans connaître le détail des dossiers, sans approcher d’une personnalité trop complexe pour être réduite à ce genre d’étiquettes, et dont les médias renvoient une image déformée.
Bref, c’est enfreindre l’injonction de Matthieu 7, 1 : « Ne jugez pas afin que vous ne soyez pas jugés. » Confiteor.
L’homme sort un titre de son prochain album sous son nom. L’autoproclamé quotidien de référence de la gauche libérale-libertaire sort, subséquemment, son encensoir et enfume généreusement, comme il se doit : les paroles de sa chanson « Angleterre », qui parlent de Brexit et de migrants.
Fustiger l’égoïsme des nantis de nos contrées, dénoncer le libéralisme qui transforme les migrants en esclaves… Que de la générosité estampillée 100 % gauche bien-pensante AOC. Le naturel est revenu au galop, et le prof dispense derechef ses leçons, avec le bruit médiatique qui convient.
Bien sûr, l’homme a payé : il a purgé sa peine, il est libre et c’est normal. Libre d’exercer son métier de chanteur. Libre d’empocher des royalties sur ses œuvres, de se produire en concert, de susciter l’admiration de la part d’adolescents généreux. Et peut-être même est-il normal de le laisser continuer à dénoncer la violence où qu’elle se trouve.
Est-il crédible pour autant ? Même si la rédemption existe, il est permis d’en douter, de le trouver inaudible et contre-productif sur ce sujet, parce que le "Faites ce que je dis, pas ce que j’ai fait" fuserait trop vite, trop naturellement, comme une évidence.
En fait, ne pas avoir changé de métier à sa sortie de prison pour tenter de devenir un anonyme, est-ce dû à une accoutumance à la drogue « succès » et à l’effet de son éventuel manque ? Ou n’est-ce pas tout simplement un manque de pudeur ? Je n’ai pas la réponse.
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